Rubrique ‘Discours 2005’

Inauguration du cycle cinématographique Martin Scorsese au Centre Georges Pompidou à Paris

22 novembre 2005

Monsieur le Président du Centre Pompidou, Cher Bruno Racine,

Cher Martin Scorsese,

Mesdames, Messieurs,

Chers Amis,

Je suis très heureux de vous retrouver ce soir. Après avoir eu la
chance d’inaugurer à vos côtés la nouvelle Cinémathèque
française, au 51 rue de Bercy, et découvert, grâce à vous et
grâce à l’action de la Film Foundation que vous avez créée, le
premier film en technicolor de Jean Renoir, Le Fleuve,
magnifiquement restauré.

Ce soir-là, vous aviez évoqué ces films qui vous ont
profondément marqués. « En regardant ces films » – avez-vous
dit – « j’ai réalisé que le cinéma était un langage international et
un art international pour tous ». Depuis, la communauté
internationale a adopté, le 20 octobre dernier, sous les auspices
de l’Unesco, à la quasi-unanimité, la convention qui inscrit pour la
première fois la diversité culturelle dans le droit international.
Depuis aussi, je me suis rendu aux Etats-Unis, pour la première
fois en tant que ministre de la culture, où je vous ai d’ailleurs
retrouvé à New York, cher Bruno Racine.

Et je tiens à vous dire combien le combat pour le respect des
droits des créateurs, pour la diversité culturelle, unit tous ceux
qui, de part et d’autre de l’Atlantique et sur tous les continents,
ont à coeur à défendre l’expression des identités et de la créativité
dans l’égale dignité de toutes les cultures. Ce combat qui est le
nôtre est aussi le vôtre, cher Martin Scorsese.

Je suis d’autant plus heureux de le souligner que c’est à
nouveau la passion du cinéma, votre passion, et la nôtre aussi,
la passion Scorsese, qui nous réunit ce soir, et jusqu’au mois de
mars prochain, ici, au Centre Pompidou, pour un moment
exceptionnel, une rétrospective intégrale, doublée d’une « carte
blanche », que vous a donnée le Centre Pompidou pour choisir,
parmi ceux que vous voulez nous faire partager, les films que
vous aimez.

Comme l’écrit Michael Henry Wilson, dans le livre d’entretiens
qui sort à l’occasion de cet événement, vous avez su canaliser
votre passion « dans une oeuvre qui continue de s’élargir,
jusqu’à embrasser toute la mémoire du monde ». Il est
particulièrement significatif de commencer cet hommage qui
vous est dédié et que vous dédiez à votre passion du cinéma par
Mean Streets, qui n’est bien évidemment pas votre premier film,
mais que l’on a pu décrire comme tel, parce que l’on peut y voir,
sans doute, la matrice, la trame de vos obsessions, de votre
regard sur « Little Italy », sur New York, sur l’Amérique, et sur la
confrontation entre :

– le rêve, par exemple celui de Charlie, joué par Harvey
Keitel, qui se voudrait le Saint-François d’Assise de son
quartier ;

– la violence et l’énergie de Johnny Boy, incarné par Robert
de Niro, qui commence ici son compagnonnage avec vous ;

– et l’aspiration à la rédemption qui gît au coeur de chacun de
vos personnages.

Cher Martin Scorsese, au nom de vos amis du cinéma français
et européens ici réunis, et au nom de tous les amoureux du
cinéma et de tous les Français qui vous aiment, vous le savez, je
vous remercie de nous donner l’occasion de voir et de revoir ce
film.

Remise des insignes d’Officier dans l’ordre national de la Légion d’honneur à Hubert Nyssen

22 novembre 2005

Mesdames, Messieurs,

Chers Amis,

Nous sommes rassemblés ce soir rue de Valois, pour rendre
hommage à quatre grands passeurs de culture, quatre
transmetteurs d’énergies, qui chacun dans leur domaine, l’édition,
le marché de l’art, l’enseignement artistique et la photographie,
sont des acteurs essentiels du rayonnement de notre culture.

Cher Hubert Nyssen,

Vous avez vécu plusieurs vies. Né à Bruxelles, mais élevé en
grande partie par votre grand-mère, qui était originaire de Tours,
et qui vous apprend à lire, dès votre plus jeune âge, dans Dickens
et Cervantès, vous avez acquis la nationalité française en 1976,
et vous êtes aussi aujourd’hui membre de l’Académie royale de
Belgique, où vous avez été élu, comme membre étranger, au
fauteuil d’Alain Bosquet qu’avaient occupé, entre autres, Colette
et Cocteau. Vous avez été apiculteur, publicitaire, homme
d’affaires, aventurier, écrivain, bien sûr, mais vous êtes avant tout
un très grand éditeur, au sens le plus fort et le plus actuel de ce
terme, au sens aussi, où, dans un ouvrage récent que vous avez
préfacé sur l’édition à l’âge romantique, apparaissent dès cette
époque ses fonctions essentielles de sélectionneur, conseiller,
agent, compagnon, accompagnateur.

Et s’il y a bien un homme qui a été, toute sa vie, au service des
Lettres, c'est bien vous, cher Hubert Nyssen. Vous l'avez été
avec une constance, une intelligence, une passion, une
générosité absolues. Et beaucoup de courage, ainsi qu'une belle
audace ! Oui, en 1977, quand vous avez fondé les éditions Actes
Sud, presque seul, sur la rive gauche…du Rhône, d’abord au
pied des Baux, avant de venir vous établir au coeur du « plat
pays » arlésien, qui aurait pu prédire qu’elles deviendraient l'une
des plus grandes maisons d'édition françaises, qui allient
l'exigence et l'ouverture, la rigueur et la liberté, donnent une telle
image de probité, de scrupule et d'indépendance ?

Vous incarnez l'honneur de ce métier, vous êtes, plus que
jamais, un exemple, non pas simplement de réussite, mais de
fidélité obstinée à vos goûts, à vos choix, à vous-même ; et c'est
pourquoi, quand on évoque votre nom, dans quelque milieu que
ce soit, il y a, chez chacun, de l'admiration, de la reconnaissance
et comme une tendresse secrète. Votre maison est une véritable
incarnation de la diversité culturelle et linguistique. Lorsque, vers
le milieu des années quatre-vingts, vous redécouvrez Nina
Berberova, qui, à 85 ans, n’a rien écrit depuis vingt ans, et Paul
Auster, dont la Cité de verre avait été refusée par tous les
éditeurs aux Etats-Unis, lorsque vous nous faites découvrir tant
de chefs d’oeuvre jusqu’alors inaccessibles en français, vous
êtes un pionnier, vous êtes non seulement un défenseur
exemplaire de la traduction, cette « langue de l’Europe » selon
Umberto Eco, vous êtes aussi un précurseur de ce combat pour
la diversité culturelle qui vient de réunir la communauté
internationale quasi-unanime.

Lorsque vous avez repris la
collection de théâtre « papiers », il y a vingt ans, on vous a dit :
« déjà, le théâtre, c’est difficile…alors des textes de théâtre, c’est
de la folie ! ». Aujourd’hui, « papiers » est devenue une véritable
mémoire du théâtre contemporain. De surcroît, Laurent Gaudé,
le prix Goncourt 2004, est entré chez vous par la porte de
« papiers ». La diversité, dont vous avez été le pionnier, c’est
aussi celle de votre groupe indépendant, où vous avez créé ou
repris des collections, comme celle dont je viens de parler, ou
comme Actes Sud Junior, Nature, Photo Poche, Babel et agrégé
de nouvelles maisons, comme par exemple, les éditions du
Rouergue, Jacqueline Chambon, Sindbad. Les livres, dont vous
êtes entouré, restent pour vous les "plus sûrs transbordeurs de
la création et de la pensée", les meilleures preuves de la dignité
de l'esprit humain, ceux qui s'opposent le mieux, avec la force de
leur rayonnement, à toutes les violences, au culte de la vitesse
et à l'empire du profit immédiat. Oui, comme vous l'avez souvent
déclaré, vous êtes pour l'exception culturelle. Vous êtes surtout
pour l'exception de la beauté. La beauté de tant d'oeuvres,
d'univers imaginaires et stylistiques, que vous avez découverts
vous-même, grâce à votre culture, à votre instinct si sûr, à votre
sens de l'originalité littéraire et de la profondeur esthétique.

Les
écrivains, et souvent les plus grands, que vous avez publiés,
vous aiment et vous demeurent résolument, passionnément
fidèles, car vous comprenez intimement leurs angoisses, la
succession de déceptions et de bonheurs qu'ils éprouvent au
cours de leur travail ; un simple signe, un simple sourire de vous
leur suffit pour continuer, pour achever. Mais si vous les
comprenez si bien, c'est parce que vous êtes vous-même
écrivain. Et un magnifique écrivain. Depuis Le Nom de l'arbre
jusqu'à, très récemment, Pavanes et Javas sur la tombe d'un
professeur, en passant par La Mer traversée et Le Bonheur de
l'imposture ou Eléonore à Dresde qui a remporté le prix Valéry
Larbaud, qui vous va si bien, vous avez écrit des romans qui conjuguent la force rêveuse et la vigueur réaliste, la délicatesse
psychologique et l'ampleur romanesque, la majesté du rythme,
celui d'un fleuve qui coule entre la lumière et l'ombre, et la
précision narrative. Des romans qui ont la gravité aérienne de la
musique. Cette musique que vous aimez tant, qui vous porte et
vous irrigue, vous stimule et vous apaise. A laquelle vous
participez vous-même en créant en Avignon, en 2000, un "opera
buffa" : Mille ans sont comme un jour dans le ciel. Et que vous
offrez aux autres au cours des soirées du Méjan, uniques par la
ferveur, la qualité d'harmonie partagées. Car rien ne vous
importe plus que la rencontre, l'union des êtres, de leurs coeurs
et de leurs esprits.

L'amour des lettres se conjugue toujours
chez vous avec la passion du monde que vous nourrissez par
vos voyages, vos rencontres avec les plus grandes
personnalités, vos engagements, la hardiesse, la clarté
combative de vos positions. Car vous ne vous êtes jamais
enfermé dans une citadelle de mots et de lectures, vous avez
été, et vous restez sensible à toutes les injustices sur terre, à
toutes les blessures humaines, à tout ce qui risque d'abîmer et
de détruire la dignité de l'être, de corrompre sa liberté, cette
liberté à laquelle vous tenez tant. Votre famille le sait. Une
famille qui est aussi une véritable équipe, soudée autour de
vous. Si elle est si unie, c'est qu’elle est davantage qu'un cercle,
un même et vaste coeur qui brille, là-bas, au Sud, où votre
maison est un modèle d'accueil, de cosmopolitisme littéraire : Un
endroit où aller, pour reprendre le si juste nom que vous avez
donné à la très belle collection que vous dirigez.

Et nous aussi,
si le monde s'assombrit et perd ses repères, nous avons un
endroit où aller : vers vous. Qui représentez l’expression d’une
« pensée de midi », pour reprendre le titre de la revue littéraire et
de débats d’idées que vous éditez. Un midi qui est d’abord un
point de vue sur le monde, et non plus un théâtre de villégiature.

Une lumière, celle de l'honneur des lettres, de la littérature tout
entière. Et je suis très heureux et fier de vous rendre hommage
aujourd’hui, à l’automne, en pleine saison littéraire, après avoir
distingué votre fille Françoise dans l’ordre des Arts et des
Lettres, ici même au printemps, à l’occasion du Salon du Livre.

Cher Hubert Nyssen, au nom du Président de la République, et
en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous faisons
officier de la légion d'honneur.

Rencontres européennes de Budapest au Parlement Hongrois

17 novembre 2005

Madame la Présidente,

Monsieur le Premier Ministre,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Monsieur le Commissaire,

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,

Mesdames et Messieurs,

Cher Alain Touraine,

Chers Amis,

Tout d’abord, je tiens, Madame la Présidente, Monsieur le Premier Ministre,
Monsieur le Ministre, à vous remercier pour votre accueil chaleureux et à vous
dire l’émotion qui est la mienne de m’adresser à vous, au sein de ce
Parlement, qui est à la fois l’expression de la nation hongroise, le symbole de
la démocratie et l’un des joyaux du patrimoine européen. Notre patrimoine,
c’est d’abord notre mémoire. Et en cet instant, avant que cette conférence
dessine l’horizon de l’Europe en 2020, c’est-à-dire demain, je veux vous dire
un mot d’hier et vous parler d’aujourd’hui.

Hier, c’est d’abord le souvenir vivant de 1956 et de 1989. Et tous les
Européens savent qu’ils doivent la conquête de leur liberté au souffle qui a pris
naissance ici, pour déchirer le rideau de fer qui a longtemps divisé notre
continent.

Nous savons, nous, ministres de la culture européens, ce que l’action que
nous avons enclenchée, à Berlin d’abord, cher Volker Hassemer, et qui s’est
poursuivi à Paris, les 2 et 3 mai derniers, et maintenant à Budapest, avant
Grenade au printemps prochain, doit au levain que votre peuple, Monsieur le
Premier Ministre, Madame la Présidente du Parlement, a répandu ici, avec une
force inexorable et sereine, qui est celle du plus long fleuve de l’Europe.

Puisse cette force nous inspirer aujourd’hui ! Car, avant que ces trois jours de
session nous permettent de préciser notre vision de l’Europe de demain, je
suis venu avant tout, vous parler d’aujourd’hui.

Construire l’Europe de la culture est un défi majeur. Oui, le mot de Milan
Kundera, selon lequel « l’aspiration européenne correspond à une ambition
culturelle » est plus actuel que jamais. Telle est la conviction profonde que je
veux partager avec vous : si nous voulons que le projet politique européen
rencontre l’adhésion de nos concitoyens, il nous faut franchir un pas
supplémentaire, un pas décisif, pour la construction de l’Europe de la culture.

Car la question européenne est avant tout une question d’identité, c’est-à-dire
une question de culture.

Et l’adoption, à une très large majorité, de la convention sur la diversité
culturelle à l’Unesco, le 20 octobre dernier, est une première bataille gagnée
pour l’Europe de la culture que nous voulons construire. En affirmant que les
oeuvres d’art et de l’esprit ne sont pas des marchandises comme les autres,
que les Etats sont fondés à mener leurs propres politiques culturelles, la
communauté internationale n’a pas seulement fait en sorte que la culture ne
puisse se dissoudre dans le commerce international, elle a posé la première
pierre d’un véritable droit international de la culture.

Je tiens à saluer l’unité exemplaire des Européens et l’efficacité de l’action de
la Commission européenne, Cher Jan Figel.

Votre action éclaire les propositions que nous avons élaborées ensemble à
Paris, les 2 et 3 mai derniers, et que j’ai remises à la Commission
européenne. Il s’agit de créer un groupe de coopération avec les Etats
membres qui seraient disposés à apporter une contribution financière et
matérielle à nos actions communes. Les propositions que je vous soumets
aujourd’hui ont été mûrement réfléchies et débattues au sein des ateliers
préparatoires aux rencontres de Paris.

Elles sont issues de ces discussions entre des artistes et des professionnels
européens. Ce ne sont donc pas seulement les propositions de la France. Ce
sont des initiatives concrètes et complémentaires des programmes
européens. J’ajoute que leur coût est limité, afin que le plus grand nombre
d’Etats puissent s’y joindre.

Elles sont destinées à faciliter la circulation des oeuvres et des artistes au
sein de l’Europe, et à valoriser le patrimoine de notre « vieille Europe », le
patrimoine vivant qui s’enrichit chaque jour des créations d’aujourd’hui.

Ainsi, pour que les Européens voient davantage de films européens, et parce
que 70% des films projetés dans les salles de cinéma de l’Union européenne
sont américains, je vous propose de promouvoir les cinémas européens, en
Europe, sous la forme de « semaines du cinéma européen », notamment
dans les salles membres du réseau Europa Cinéma, dont les dixièmes
rencontres ont lieu en ce moment même à Budapest. Un label commun
pourrait être identifié et cette semaine du cinéma européen se déroulerait
simultanément dans les Etats membres participant à ce projet.

Parce que la diversité linguistique est au coeur de l’identité européenne, et je
suis heureux de le dire ici, sachant l’attachement si fort des Hongrois à leur
langue, si belle et unique, parce que, comme l’a dit Umberto Eco, la
traduction est la langue de l’Europe, parce que je n’aurais jamais pu vibrer
d’émotion devant le Kaddish pour l’enfant qui ne naîtra pas si votre prix Nobel
de littérature n’avait été traduit, mais parce que cette diversité même ne doit
pas être un obstacle à la circulation des oeuvres, je vous propose, dans le
domaine des arts de la scène, de créer un fonds de sous-titrage des oeuvres
théâtrales et musicales. Cette aide permettrait de faciliter les coproductions
européennes, la mobilité des oeuvres et l’accès à un plus large public.

Une
autre mesure suggérée par les professionnels serait d’élaborer un guide des
tournées pour faciliter la circulation des artistes en Europe.

Dans le domaine du livre et de la traduction, pour ouvrir davantage l’accès
des Européens aux littératures des autres pays d’Europe, je vous propose de
mettre en place un réseau de librairies européennes sur le modèle d’Europa
Cinéma. L’idée est de labelliser les librairies dont le fonds est composé
d’oeuvres européennes traduites ou en langue originale.

Parce que l’Europe, tout au long de son histoire, a produit l’essentiel des
savoirs et n’a cessé de rester ouverte sur les nouveaux regards du monde,
elle ne peut rester à l’écart de la nouvelle géographie des connaissances sur les réseaux d’aujourd’hui. C’est pourquoi je tiens à attirer particulièrement
votre attention sur le projet de Bibliothèque numérique européenne, d’ores et
déjà soutenu par six chefs d’Etat et de gouvernement, qui ont écrit au
Président de la Commission européenne. C’est un grand projet pour l’Europe
d’aujourd’hui. Les ministres de la culture en ont débattu pour la première fois
à Bruxelles lundi dernier. Presque tous se sont exprimés. Tous ont soutenu
cette idée. La voie est ouverte pour aller de l’avant tous ensemble ou, si
certains veulent aller encore plus loin et encore plus vite au sein d’un groupe
de coopération.

Afin que les Européens puissent mieux connaître et s’approprier le patrimoine
commun de l’Europe, je vous propose la création d’un label « patrimoine de
l’Europe », sur le modèle du « patrimoine de l’humanité » qui est l’un des
grands succès de l’Unesco. Il s’agit aussi de créer un lien direct entre l’action
de l’Union européenne et le grand public, d’améliorer l’attractivité de nos
territoires en développant le tourisme culturel, et d’engager les gestionnaires
des sites dans une démarche de qualité d’accueil, de conservation et de
restauration, alors que l’Europe a de plus en plus de mal à faire labelliser de
nouveaux sites au titre de l’Unesco. Les sites labellisés pourraient faire l’objet
d’un examen prioritaire dans le cadre des fonds structurels.

Parce que notre patrimoine se nourrit de la vitalité de nos créations
contemporaines, je vous propose, dans le domaine des arts plastiques, de
mettre en place un système d’inter-prêts de longue durée (de l’ordre de cinq
ans) entre lieux de diffusion et de promotion de la création visuelle
contemporaine.

Parce que le cadre de vie des Européens, qui fait partie de leur identité et
dépasse les frontières, est modelé par les professionnels de l’architecture et
du paysage, je vous propose de créer un concours, dans l’esprit d’Erasmus,
destiné à promouvoir les architectes et les paysagistes de moins de 35 ans et
à leur permettre d’étendre leur carrière hors de leur pays d’origine.
Parce qu’il faut mieux assurer le rayonnement international de nos créations
et de nos industries musicales, je vous propose de créer une plate-forme de
promotion des musiques européennes, sur le modèle du bureau pilote que
nous avons lancé à New York.

L’Europe de la culture se construit aussi, et sans doute surtout, par
l’engagement personnel des créateurs et des artistes. Notre responsabilité
politique est de les aider et de les encourager. Les mesures concrètes que je
vous propose n’ont pas d’autre but. C’est ainsi que nous bâtirons l’Europe
des initiatives et des projets, à laquelle tous nos concitoyens aspirent. Et
permettez-moi, puisque la musique est au coeur de l’âme hongroise et de
l’âme européenne, de donner un coup de chapeau aux artistes qui font vivre
notre patrimoine et nos créations. Je pense, par exemple, à l’orchestre
philharmonique de Radio France, dirigé par Myung-Whun Chung, qui est
venu jouer la Huitième Symphonie de Mahler à Budapest, à l’invitation du
Muvesztek, mais aussi à Pascal Dusapin, qui m’accompagne aujourd’hui, et
qui met son immense talent au service du magnifique projet itinérant
d’académie européenne de composition musicale, que j’espère voir bientôt
aboutir.

Avec tous nos artistes, avec tous nos penseurs, tous nos créateurs, et
comme nous y invitait dans son si beau discours à Stockholm, Imre Kertèsz,
en apportant des réponses concrètes aux questions fondamentales de la
vitalité et de la créativité humaines, la construction de l’Europe de la culture
nous engage à dépasser les traumatismes de l’histoire et les fractures du
présent pour penser à l’avenir plutôt qu’au passé.

Je vous remercie.

Conseil national des professions du spectacle – accueil

16 novembre 2005

Mesdames et Messieurs,

Je suis heureux de vous accueillir pour cette nouvelle séance du
Conseil national des professions du spectacle.

Je vous remercie d’avoir pu vous libérer pour participer à cette
réunion, dont la date et l’ordre du jour ont dû être modifiés par
rapport à ceux qui avaient été initialement prévus, pour s’adapter
au calendrier du dialogue social et à ses différentes péripéties.

Je vous rappelle, en effet, que dans le calendrier de travail que je
vous avais proposé au mois de décembre dernier, nous avions
prévu de consacrer notre séance de rentrée, en septembre, à
l’état d’avancement des conventions collectives et à la question
du périmètre du recours à l’intermittence. Sur ces deux sujets,
étroitement liés, vous avez, partenaires sociaux du secteur, avec
le concours très actif de Gérard Larcher et de son Directeur des
relations du travail, imprimé une accélération décisive depuis la
rentrée. J’aurai l’occasion d’y revenir en conclusion.

Il m’est apparu important, sur la proposition du bureau du CNPS,
de réunir notre Conseil pour recueillir officiellement vos avis et
réactions aux pistes et propositions contenues dans les rapports
de Jean-Paul Guillot et d’Alain Auclaire. En conséquence, j’ai
décidé de reporter la séance du Conseil prévue au mois de
décembre au mardi 21 février 2006. Nous y examinerons les
questions qui étaient initialement programmées : orientations en
matière de formation, bilan du fonctionnement et des travaux des
COREPS, analyse des initiatives en matière de mutualisation des
structures.

Exceptionnellement, nos interventions lors de cette séance
seront enregistrées, et leur transcription sera mise en ligne sur le
site du Ministère dans les meilleurs délais possibles – après que
le texte de vos interventions vous aura été soumis pour
relecture. Nous sommes à un moment où chacun de nos propos
doit nous engager.

Depuis ma prise de fonction, j’ai mis toute mon énergie à
défendre la spécificité d’un régime d’assurance chômage adapté
aux pratiques d’emploi des artistes et techniciens.

Je souhaite, au moment où vont commencer les négociations
sur ce régime, que les confédérations d’employeurs et de
salariés, qui ont paritairement la responsabilité de l’assurance
chômage dans notre pays, soient pleinement éclairées sur le
niveau et la nature de l’engagement des partenaires sociaux du
secteur, des collectivités territoriales et de l’Etat dans la politique
de l’emploi dans le spectacle. Elles doivent pouvoir mesurer que
le temps est révolu où chacun s’en remettait à l’assurance
chômage pour réguler et, en grande partie, financer l’emploi
dans ce secteur. Elles doivent pouvoir constater que, sans rien
céder sur les exigences d’une protection sociale et
professionnelle équitable, adaptée aux spécificités des pratiques
d’emploi des artistes et techniciens, le contexte dans lequel va
se dérouler la négociation des nouvelles annexes 8 et 10 qui
vont entrer en vigueur au 1er janvier 2006 est résolument
différent de celui qui prévalait lors des négociations précédentes.

A la demande de plusieurs d’entre vous, fédérations
d’employeurs ou de salariés, j’ai décidé de ne pas inviter la
Coordination des intermittents et précaires d’Ile de France à
cette séance du Conseil national des professions du spectacle.

Les conditions dans lesquelles a été interrompue la réunion des
confédérations d’employeurs et de salariés qui s’est tenue dans
ces locaux le 29 septembre dernier, la remise en cause de leur
représentativité et de leur légitimité pour négocier la future
convention d’assurance chômage et ses annexes, me
conduisent à prendre acte de ce que la Coordination porte, en
l’occurrence, des préoccupations et des enjeux qui ne sont plus
ceux de la protection sociale et professionnelle des artistes et
techniciens qui, seuls, doivent inspirer nos travaux, dans le
cadre de notre Conseil, à la veille d’une négociation décisive.

Je souhaite que puissent s’exprimer aujourd’hui ceux qui ont une
responsabilité directe dans la mise en oeuvre de la politique de
l’emploi dans le spectacle.

Cela ne m’empêche pas de demeurer à l’écoute attentive de
toutes les contributions, enquêtes ou expertises que peut
proposer ou diligenter la Coordination – comme toute autre
organisation ou personnalité, qu’elle soit ou non membre du
Conseil national des professions du spectacle – et qui permettent
d’améliorer notre connaissance de la situation et des attentes
des artistes et techniciens.

J’ai pris connaissance avec attention et intérêt des réactions que
certaines organisations ont déjà eues sur les rapports de Jean-
Paul Guillot et de Alain Auclaire. Elles appellent évidemment de
ma part des réponses – certaines m’interpellent directement.
Mais, avant de les exprimer, je souhaite vous laisser intervenir
d’abord, afin que soient clairement connues les positions de
chacun.

Je vous propose que puissent intervenir en premier lieu les
représentants des organisations d’employeurs, puis des
organisations de salariés, puis des associations de collectivités
territoriales. J’inviterai Jean-Paul Guillot et Alain Auclaire à
réagir, s’ils le souhaitent, aux différentes interventions, ou à
apporter des réponses aux demandes de précisions qui leur
seront faites. Je répondrai en conclusion, avec le concours des
représentants du Ministère du travail, de l’emploi et de l’insertion
professionnelle des jeunes, sur les engagements qui concernent
l’Etat.

Je vous remercie de bien vouloir, compte tenu du grand nombre
de participants, concentrer vos interventions sur l’essentiel, afin
que chacun puisse s’exprimer.

Conseil national des professions du spectacle – conclusion

16 novembre 2005

Je vous remercie de toutes vos interventions. Elles marquent,
permettez-moi de le souligner pour m’en réjouir, que chacune de
vos organisations est prête, avec plus ou moins d’intensité, avec
certaines réserves et conditions, à s’engager dans la politique de
l’emploi dans le spectacle telle que les grandes orientations en
avaient été définies, au printemps dernier, dans la charte pour
l’emploi dans le spectacle.

Je voudrais associer mes remerciements à ceux que vous avez
exprimés à Jean-Paul Guillot pour le magnifique travail qu’il a
effectué, pour l’écoute inlassable qu’il a apportée à chacun
d’entre vous et pour avoir rassemblé vos propositions dans un
rapport où j’ai eu le sentiment que chacun d’entre vous – chacun
d’entre nous ! -pouvait se reconnaître.

Je souhaite également adresser tous mes remerciements à Alain
Auclaire, dont le rapport propose une feuille de route, attendue
par les partenaires sociaux du secteur, aux services centraux et
déconcentrés du Ministère de la culture et de la communication
et, s’ils veulent bien s’en emparer, à ceux des collectivités
territoriales. Les uns et les autres y trouveront des outils très
opérationnels pour que soit mieux pris en compte le lien
nécessaire, indispensable, entre les financements publics et les
conditions d’emploi dans le spectacle.

Je demande à Jérôme Bouët, Directeur de la musique, de la
danse, du théâtre et des spectacles, à Véronique Cayla,
Directrice générale du Centre national de la cinématographie, à
Patrick Raude, Directeur du développement des médias, de
préparer ensemble, en concertation avec vos organisations, une
circulaire à ma signature pour que dans chacun des secteurs de
responsabilité de mon Ministère, sur la base des propositions
d’Alain Auclaire, des mesures effectives, liant mieux les
financements publics et les conditions d’emploi, puissent
s’appliquer sans délai.

Je voudrais enfin exprimer une nouvelle fois devant vous ma
gratitude à Jean-Louis Borloo et à Gérard Larcher, à leurs
cabinets et à leurs services, pour la qualité de la coopération
entre nos ministères et pour leur total engagement à vos côtés
dans le difficile exercice de négociation des conventions
collectives. Grâce à eux, grâce à notre action commune, vous
mesurez la réalité de l’implication de l’Etat. Il ne s’agit pas
d’intentions ou d’incantation – mais de la mise en oeuvre
déterminée, par le gouvernement de Dominique de Villepin,
d’une politique de l’emploi dans le spectacle dans laquelle l’Etat
est prêt à prendre toute sa part.

J’ai bien entendu les diverses interpellations que vous m’avez
adressées, et je voudrais m’efforcer de répondre à chacune
d’entre elles.

La première – et il m’a semblé que c’était la plus consensuelle
parmi vous ! – concerne le soutien financier apporté par l’Etat au
secteur du spectacle.

Je dois rappeler d’abord que, dans l’ensemble du financement
de la politique culturelle, le financement privé, celui des
ménages et des entreprises, représente les deux tiers, les
financements publics représentant l’autre tiers – et qu’il s’agit
d’un secteur en croissance régulière et continue, ce qui
témoigne de l’attachement de nos concitoyens pour le
développement des activités culturelles et artistiques.

J’ai bien conscience que, si l’UNEDIC considère légitimement
qu’elle n’a pas à financer l’activité culturelle dans notre pays,
cette charge doit incomber aux pouvoirs publics, Etat et
collectivités territoriales, chacun pour les responsabilités qui lui
reviennent. C’est la raison pour laquelle, depuis plusieurs
années, le secteur du spectacle vivant représente une part
essentielle dans le budget du Ministère de la culture et de la
communication, en constante augmentation malgré le contexte
difficile de nos finances publiques. C’était le cas en 2005, ce le
sera encore en 2006.

A ce budget du Ministère en faveur du spectacle vivant, s’ajoute
le mécanisme du crédit d’impôt pour le cinéma et l’audiovisuel,
qui a permis une relocalisation des tournages et la création ou la
préservation, en 2005, de 2200 emplois dans le cinéma et de
900 emplois dans l’audiovisuel. Quant au crédit d’impôt en
faveur de l’industrie phonographique, je vous confirme qu’il a fait
l’objet d’un arbitrage favorable du Premier Ministre. Ce dernier a
demandé aux ministères concernés de présenter à la fin de ce
mois un projet qui puisse être notifié à la Commission
européenne.

Ce n’est, évidemment, jamais suffisant pour répondre à toutes
les demandes de soutien et de reconnaissance qui s’expriment –
et le budget du ministère de la culture n’augmentera pas, à
échéance visible, dans les proportions nécessaires pour
remplacer à l’identique le soutien financier que le régime
d’assurance chômage a apporté au secteur du spectacle.

A côté du soutien financier de l’Etat qui se poursuivra, il est
essentiel que le secteur du spectacle puisse conduire des efforts
d’organisation et d’amélioration de la diffusion. Ni les structures
du secteur ni les services de l’Etat qui les accompagnent ne sont
familiers de projets d’organisation et de négociations entre
partenaire sociaux en la matière. C’est la raison pour laquelle,
avec Gérard Larcher, nous voulons proposer le concours de
l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail et
de son réseau en région pour aider les structures qui le
souhaitent à mieux s’organiser.

J’ai demandé, en liaison avec Gérard Larcher, qu’un groupe de
travail soit constitué à cet effet, associant les services de nos
deux Ministères, en lien avec le CNPS, pour examiner, avec
l’ANACT, les voies d’une expérimentation dans deux ou trois
régions. Celle-ci visera à définir, dans le respect des priorités du
contrat de progrès signé entre le réseau ANACT et l’Etat, une
démarche et des outils pour répondre aux enjeux d’organisation
et pour optimiser les aides publiques mobilisables en matière
de soutien à l’emploi dans 4 types de situations qui devront être
précisément définies :

– les marges de manoeuvre dont peuvent disposer les institutions
permanentes,

– l’accueil de projets et la constitution de pôles de diffusion dans
les institutions permanentes,

– la coopération et la mutualisation de certains moyens,
administratifs ou logistiques, entre les petites structures,

– la responsabilisation des donneurs d’ordre dans la chaîne de
sous-traitance.

Si elles concernent l’ensemble des structures du secteur, les
questions d’organisation revêtent, pour les petites structures,
une importance particulière à mes yeux, et je souhaite qu’on y
porte toute l’attention nécessaire, parce que je sais combien
c’est sur les petites structures que repose, en grande partie, la
vitalité et l’originalité de notre politique de création, dans tous les
domaines du spectacle vivant.

Elles présentent souvent la double caractéristique de n’avoir pas
de salarié permanent et d’avoir des responsables qui sont à la
fois, dans les faits, employeurs et salariés. Raison de plus pour les aider à exercer, de manière rigoureuse, leurs responsabilités
d’employeur et assurer aux salariés le respect de tous leurs
droits. Dans cette période où la présomption de salariat des
artistes est contestée au niveau de la Cour de justice des
communautés européennes, rien ne doit conduire à faire
considérer les artistes comme des travailleurs indépendants et à
risquer de les priver des garanties qui s’attachent au statut de
salarié.

La politique de l’emploi dans le spectacle que je veux conduire
doit apporter le meilleur soutien aux petites structures, en les
aidant à s’organiser, en leur réservant des conditions de
financement et de diffusion favorables, en préservant, pour elles
plus que pour tout autre, la possibilité du recours à
l’intermittence. C’est le sens des mesures que j’ai inscrites dans
chacun des plans sectoriels pour le spectacle vivant, que j’ai
présentés au début de l’automne, et dont une présentation
synthétique figure dans vos dossiers.

Dans l’esprit des travaux actuellement conduits par Anne
Chiffert et Dominique Chavigny, visant à ce que l’organisation
de la DMDTS favorise la prise en compte des problèmes vécus
par les compagnies, je demande à Jérôme Bouët, dans le
prolongement du travail mené par les Observatoires des
compagnies, de constituer un groupe de travail, avec la
participation de Directeurs régionaux des affaires culturelles,
pour me faire des propositions sur les meilleures modalités de
financement et d’accompagnement des compagnies.

Dans le même esprit, toutes les actions de simplification et de
synergies administratives engagées par les organismes sociaux
du spectacle doivent retenir toute notre attention. Elles sont de
nature à apporter, notamment aux petites structures, les
allègements indispensables de coût des traitements
administratifs qui mobilisent des moyens qui pourraient être plus
utilement consacrés à leur activité artistique.

Dans l’immédiat, grâce au travail mené avec Jean-Louis Borloo
et son cabinet, le gouvernement est déterminé à ce que, dans
les 100 M- de crédits destinés aux associations pour relancer la
politique d’égalité des chances dans les banlieues, des moyens
forts soient dégagés pour que les acteurs du monde culturel
participent pleinement à cette politique d’intégration. Ces crédits
iront en priorité au soutien aux compagnies, dont nous
connaissons le travail de proximité irremplaçable qu’elles
effectuent dans les quartiers difficiles pour développer l’éveil et
l’intérêt des jeunes pour la création artistique, participant ainsi,
de manière emblématique, au renforcement de la cohésion
sociale.

Enfin, parce que c’est dans les petites structures que débutent
souvent les jeunes, je voudrais inviter les Commissions
paritaires nationales emploi formation (CPNE) dans le spectacle
vivant et l’audiovisuel, en liaison avec l’AFDAS, à orienter la
formation professionnelle continue dans leur secteur en priorité
vers l’aide à l’insertion professionnelle des jeunes entrant dans
le secteur du spectacle. Cela permettrait de stabiliser davantage
les artistes et techniciens, qui confirmeraient leur motivation
professionnelle en s’engageant dans une formation qualifiante.

Les contrats de professionnalisation constituent, dans cette
perspective, un dispositif qui pourrait être plus largement utilisé.

Au-delà des jeunes, dans la perspective de favoriser la
transmission entre les professionnels, des « contrats de
compagnonnage » entre compagnies conventionnées et jeunes
artistes pourraient être élaborés et mis en place.

J’ai relevé avec intérêt que, dans les politiques qu’elles
présentent actuellement, plusieurs régions ont d’ores et déjà pris
des initiatives en ce sens, en coopération étroite et en bonne
intelligence avec l’Etat, comme dans la Région Rhône-Alpes, par
une déclaration commune, que je veux saluer, avec les
présidents des CPNE du spectacle vivant et de l’audiovisuel, ou
même, vous me permettrez de la citer, dans ma propre région,
pas plus tard que ce lundi !

J’attacherais du prix à ce que des propositions puissent être
formulées dans ce sens à l’occasion de notre prochaine séance
du Conseil national des professions du spectacle, le 21 février
prochain.

J’en viens maintenant aux propos qui ont été tenus sur
l’assurance chômage et sur la prorogation du fonds transitoire.

N’en déplaise à certains, nul ne peut dire, à ce jour, que je n’ai
pas été, sur ce sujet, l’homme des engagements tenus.
A travers cette question, c’est aussi la question de l’intervention
financière de l’Etat qui est posée – et je veux y répondre très
précisément.

Il n’appartient pas à l’assurance chômage d’assurer la
structuration de l’emploi dans le secteur du spectacle – et de
supporter des charges qui relèvent de la politique culturelle de
l’Etat ou des collectivités territoriales ou de la politique salariale
qui incombe aux employeurs. Dans un contexte de crise, la
création, en 2004, du fonds spécifique provisoire, devenu, au 1er
janvier 2005, fonds transitoire, a marqué cette reconnaissance
des responsabilités indûment assumées par l’UNEDIC. Et je
comprends que la demande de prorogation du fonds transitoire marque légitimement le souhait de renouveler cette
reconnaissance.

L’effort principal et nécessaire de l’Etat porte, évidemment, sur la
mise en place de la politique de l’emploi dans le secteur du
spectacle. Celle-ci a de multiples facettes, fait intervenir
plusieurs acteurs. Elle produira des résultats progressivement et
dans la durée. Je vous ai indiqué avec quelle détermination le
gouvernement est engagé dans la mise en oeuvre de cette
politique.

Je vous ai dit, aussi, notre engagement pour que, au 1er janvier
2006, un nouveau système d’assurance chômage des artistes et
techniciens soit mis en place. Ici même, rue de Valois, les
confédérations d’employeurs et de salariés ont affirmé leur
intention de maintenir ce régime au sein de la solidarité
interprofessionnelle. Elles ont accueilli favorablement les
propositions, issues des partenaires sociaux du secteur et
présentées par Jean-Paul Guillot.

Toutes les conditions sont réunies pour que puisse se dérouler
avec succès, entre les confédérations, dans le calendrier
qu’elles ont fixé, avec tous les approfondissements techniques
nécessaires, la négociation sur le régime spécifique d’assurance
chômage des artistes et techniciens, qui doit entrer en vigueur
au 1er janvier 2006. Je suis en mesure de vous confirmer, avec
leur accord, que ce calendrier sera tenu et que les premiers
travaux techniques débuteront dans la dernière semaine du mois
de novembre.

Je souhaite comme chacun que la négociation concernant les
annexes 8 et 10 démarrent le plus rapidement possible en
prenant en compte, naturellement, la nécessaire articulation
avec la négociation de la convention générale d’assurance
chômage.

Avec Gérard Larcher, nous avons fait état de notre disponibilité
pour engager avec les confédérations, toutes les discussions
utiles, lorsque leur négociation aura suffisamment avancé, en
vue de parvenir à ce nouveau système.

D’ores et déjà, nous avons relevé que, dans le cadre du groupe
Audiens, vous avez proposé, vous, partenaires sociaux du
secteur, la mise en place d’un fonds spécifique pour les
accidents de carrière, qui concernerait les artistes et techniciens
reconnus qui, pour une raison ou pour une autre, n’ont plus droit
à l’assurance chômage.

Je suis prêt, comme certains d’entre vous me l’ont demandé – et
après m’être assuré de son accord ! – à vous proposer le concours de Michel Lagrave, pour animer un groupe de travail,
avec l’appui du groupe Audiens, chargé de mieux définir les
contours de ce fonds spécifique et de son financement. Michel
Lagrave pourrait rendre son rapport avant la fin de l’année.

En attendant, j’ai toute confiance dans les confédérations
d’employeurs et de salariés pour mener la négociation qui leur
appartient.

Il nous appartient à nous, Etat, collectivités territoriales,
partenaires sociaux du secteur, réunis au sein du Conseil
national des professions du spectacle, de définir notre
engagement dans la politique d’emploi dans le spectacle, dans
des conditions qui manifestent, aux yeux des confédérations,
que le temps est révolu où cette responsabilité était abandonnée
à l’assurance chômage.

C’est incontestablement le sens que nous pouvons donner à
notre séance d’aujourd’hui – et je vous en remercie très
chaleureusement.

Remise des insignes d'officier de la Légion d'Honneur à Jacques Perot

15 novembre 2005

Mesdames, Messieurs,

Chers Amis,

Ce soir, c’est le monde des musées qui est à l’honneur rue de Valois, avec les distinctions
que je vais conférer à deux personnalités très différentes par leur parcours et leur
expérience, mais qui ont en commun leur dévouement au service des ces hauts lieux de
patrimoine, de mémoire, de culture, d’émerveillements partagés.

Cher Jacques Perot,
je suis très heureux de distinguer en vous un très grand conservateur.

Un conservateur qui
a toujours eu à coeur de développer le rôle éducatif des musées. Le musée, aimez vous à
dire, « ce n’est pas uniquement la conservation, c’est également la diffusion ». Oui, pour
vous, le musée est au service de la société. Cette haute exigence du service public,
exigence éthique autant que scientifique, vous l’avez forgée tout au long d’une carrière qui
s’est toute entière et avec quel succès, consacrée au monde des musées, dans les années
de leur plus forte transformation. Cette transformation vous l’avez comprise, accompagnée,
anticipée et vos différentes responsabilités à la tête des institutions patrimoniales dont vous
avez eu la charge ont permis de la mener à bien de façon exemplaire.

Vous êtes sans doute avant tout un homme de l’écrit. Vous êtes historien, archivistepaléographe
de formation. Diplômé de la prestigieuse école nationale des chartes, vous
vous confrontez à l’histoire de France, en débutant votre carrière aux archives, en Vendée
(de 1972 à 1976), puis aux archives du ministère des Affaires étrangères (de 1976 à 1980).

C’est en 1980 que vous intégrez les musées, en rejoignant l’équipe de conservation du
musée national du château de Pau (de 1980 à 1988). Sans quitter le monde des musées, ni
votre goût de l’enseignement et de la formation, vous devenez adjoint au directeur de l’Ecole
du Louvre et de l’Ecole du patrimoine (1988-1992), qui forment la plupart de nos
conservateurs. Puis vous assumez la direction du musée de l'Armée de 1992 à 1998, au
sein de l'hôtel national des Invalides. Vous avez marqué l’histoire de ce grand établissement,
en y créant les instruments majeurs de développement culturel du musée : un auditorium
construit sous la cour d'Austerlitz, une salle d'exposition temporaire et une librairie qui feront
définitivement sortir cette très vénérable et très digne Institution d’une certaine torpeur.

De
nombreuses expositions vous sont dues. Je citerai « Crimée 1854-1856 », « une visite au
camp de Châlons sous le Second Empire », « les spahis cavaliers de l'armée d'Afrique », «
la campagne d'Egypte », « Caran d'Ache ». Et vous avez multiplié les événements culturels
permettant d'augmenter la fréquentation du musée. L’histoire militaire n’est pas que l’histoire
des batailles, c’est avant tout l’histoire de la France et de ses relations avec le reste du
monde. Elle passionne les Français et vous avez su attirer de nouveaux publics dans ce
magnifique musée. Elle vous passionne, en raison bien sûr de votre formation d’historien et
sans doute aussi, pour une part, de votre illustre héritage familial. Votre quatrième aïeul, le
baron Dufour, par ailleurs maire de Metz et pair de France, ne fut-il point ordonnateur en
chef de la Garde impériale ? Aux Invalides, vous lancez aussi le grand chantier de la
création des salles consacrées au Général de Gaulle et à la seconde guerre mondiale,
espaces dont vous avez obtenu l’affectation au musée. Un musée que vous quittez bien
différent que celui dont vous aviez reçu la charge, sans qu’il ait rien perdu de sa qualité
patrimoniale.

Nommé en 1998 à la tête du musée national du château de Compiègne et de son domaine,
et du musée national de Blérancourt, musées et domaine réunis sous la même autorité pour
la première fois, vous vous êtes attaché à les ouvrir vers l'extérieur et à les rapprocher de
leur environnement local, en recréant des liens entre le château et la ville, en accélérant sa
restauration et en mettant en place une politique très dynamique de développement
scientifique et culturel de ce monument emblématique de l'Histoire de France. Vous réalisez
aussi un important programme de travaux et de restauration des collections. Sur le plan
culturel, votre politique volontariste s'est manifestée notamment par l'organisation de
nombreuses expositions, dont la plus importante « Un tsar à Compiègne, Nicolas II, 1901 »,
a attiré plus de 40 000 visiteurs. Il faut citer également de nombreux événements culturels,
concerts, soirées littéraires, visites particulières pour des publics divers et notamment
défavorisés. Grâce à cet effort sans précédent, la chute régulière du nombre des visiteurs a
pu, non seulement être enrayée, mais le mouvement s'est même inversé et a permis une
augmentation de 50 % en quatre ans. C’est un apport que je tiens à citer en exemple, du
directeur d’un musée, moderne, ouvert, reconnu par ses pairs et par le public, qui a su, sans
jamais renier ses responsabilités scientifiques, faire de la politique des publics un axe majeur
du développement de son établissement.

Vos responsabilités au musée national de la coopération franco-américaine de Blérancourt,
depuis 1998, et votre participation à la branche française de la Société des Cincinnati, dont
vous êtes membre honoraire, vous a amené à développer des relations cordiales et suivies
de collaboration avec de nombreux amis américains, tout particulièrement « The American
Friends of Blérancourt » et la « Florence Gould Foundation » qui soutiennent le projet
d'agrandissement de Blérancourt, par un mécénat de 2,1 millions de dollars, grâce à un
contrat de mécénat que mon prédécesseur a signé solennellement le 3 septembre 2003. Et
j’ai eu le plaisir de rendre hommage, lors de mon récent voyage aux Etats-Unis, aux
responsables de la « Florence Gould Foundation ». Vous avez également pour le musée de
Blérancourt, dénommé depuis le décret de juin 2005 « musée franco-américain » et grâce à
l’action permanente d’Anne Dopffer, son conservateur, noué un partenariat étroit avec les
Amis français de ce musée. Je tiens à saluer également leur extrême générosité. C’est grâce
à leur mécénat que la restauration des deux pavillons historiques et de la bibliothèque du
château peut être réalisée.

Conservateur du musée national des Deux Victoires Clémenceau de Lattre depuis 1974,
vous n’avez jamais renoncé à cette responsabilité exercée à titre bénévole depuis 1988.

Désigné comme exécuteur testamentaire de la Maréchale de Lattre de Tassigny, vous avez
veillé, à la suite de son décès en 2003, à l'entrée dans les collections publiques des archives
et souvenirs historiques laissés par la veuve du Commandant en chef de la Première Armée.

C’est à vous que j’ai confié, en raison de ce rôle éminent dans la conservation et la
transmission de la mémoire de la France, une mission de proposition sur les modalités de
mise en oeuvre de ce musée national, petit par sa taille mais hautement symbolique de
l’histoire de notre pays, mais aussi de la coopération culturelle avec les collectivités
territoriales intéressées et notamment le département de la Vendée. Le rapport que vous
m’avez remis permettra de lancer et de valoriser ce beau projet, qui réunit la mémoire de de
Lattre et de Clemenceau, de la Vendée bleue et de la Vendée blanche, dans une même
histoire.

J’ai évoqué votre action internationale et votre contribution au rayonnement universel de nos
musées et de notre culture.

Je veux insister sur votre rôle et votre engagement dans la coopération culturelle
internationale. Votre longue implication personnelle et bénévole dans le Conseil international
des musées (ICOM) vous a permis d'être élu, en 1998, face à une candidature des Etats-
Unis, président de cette organisation non-gouvernementale des musées qui compte
aujourd'hui près de 20 000 membres dans plus de 150 pays. Vous en êtes le troisième
président français, après Georges Salles et Hubert Landais, depuis la création de
l'organisation à Paris en 1946. Cette position, à laquelle vous avez été réélu pour un second
et dernier mandat de trois ans en 2001, vous a permis de soutenir la place de la France et
l'usage du français dans les travaux de l'organisation. Votre présidence n’est pas étrangère
au maintien à Paris du siège de cette grande organisation non gouvernementale auprès de
l’UNESCO. Vous avez voulu qu’elle soit et vous en avez fait « la conscience de la
communauté des musées ». Une communauté universelle, qui a en charge le patrimoine de
l’humanité. Vous avez développé des actions importantes au service de cette ambition,
notamment en faveur de la circulation des biens culturels, de la coopération dans les
situations d'urgence (en ex-Yougoslavie, en Afghanistan, en Irak, et partout où la barbarie
s’attaque à la culture et à la mémoire des peuples en s’en prenant à leurs musées, à leurs
archives et à leurs monuments), mais aussi de la professionnalisation du personnel des
musées, et de la défense de la diversité culturelle. Vos missions à l'étranger, au cours
desquelles vous avez été amené à vous exprimer publiquement, vous ont permis de vous
entretenir avec de nombreux ministres de la culture (en Espagne, en Hongrie, en Slovénie,
en Croatie, mais aussi en Russie, en Corée et au Japon).

Vous avez été l'invité d'honneur d'importantes cérémonies, comme l'inauguration du plus
grand musée créé en Hongrie depuis la guerre, ou le centenaire de « l'Österreichische
Gallerie Belvedere » à Vienne.

Il était logique que vous soyez appelé en 2002 à participer à la Commission de la
République française pour l'Unesco, présidée par Jean Favier, membre de l'Institut. Vous en
avez été élu l'un des vice-présidents, aux côtés de Jean Audouze, Directeur du Palais de la
découverte, de Jacqueline Baudrier, ancienne présidente de Radio-France et ambassadeur
à l’Unesco, Jean Leclant, secrétaire perpétuel de l'Académie des Inscriptions et Belles
Lettres, René Rémond de l'Académie française. Présent sur le territoire scientifique de
l’histoire de l’art, et de l’histoire politique et militaire de la France, promoteur de l’institution
muséale comme instrument majeur de la coopération culturelle internationale, vous avez été
pendant toute votre carrière l’un des meilleurs représentants de la conservation du
patrimoine « à la française ».

J’ajoute enfin que vous avez multiplié les conférences, les communications et les articles sur
des thèmes historiques et muséographiques.

Cher Jacques Perot, au nom du Président de la République et en vertu des pouvoirs qui
nous sont conférés, nous vous faisons officier de la Légion d’Honneur.

Remise des insignes d'Officier dans l'ordre national du Mérite à Thomas Grenon

15 novembre 2005

Cher Thomas Grenon,

Permettez-moi d'évoquer à grands traits la carrière qui est la vôtre.

Vous êtes né à Paris en 1963. Etudiant, votre cursus est d'emblée brillant : après vos études
de mathématiques supérieures et spéciales au lycée Louis le Grand, puis votre admission à
l'Ecole Polytechnique où vous passerez un an dans l'arme blindée cavalerie comme chef de
peloton de chars AMW 30 à Sarrebourg en Allemagne, vous intégrez le corps des Mines où
vous effectuerez deux stages déterminants pour votre avenir, l'un dans le groupe Saint-
Gobain comme ingénieur à Pont-à-Mousson, le second à la direction financière de Certain-
Teed à Philadelphie aux Etats-Unis.

Votre carrière dans la fonction publique d'active débute en 1989, au sein du service du
nucléaire de la direction générale de l'énergie et des matières premières du ministère de
l'Industrie, où vous êtes chargé de la tutelle des entreprises et des établissements de ce
secteur très contrôlé. Vous y êtes rapidement remarqué pour la sûreté de vos jugements, la
précision de vos analyses, et un indéniable pragmatisme.

En 1991, vous rejoignez la direction des relations économiques extérieures du ministère des
Finances ; vous y êtes chargé des relations avec l'ensemble des pays nés de l'éclatement de
l'Union soviétique, ce qui vous amène à effectuer de fréquents déplacements afin de
négocier des protocoles financiers et vous place dans la position d'observateur privilégié de
l'évolution de ces pays. Vous exercez d'ailleurs la responsabilité de secrétaire du conseil
économique, financier, industriel et commercial franco-russe.

En 1993, vous êtes nommé responsable du financement des entreprises au sein de la
direction du trésor où vous exercez la tutelle des institutions financières spécialisées dans le
financement des entreprises : Crédit national, CEPME (le Crédit d'Equipement des Petites et
Moyennes Entreprises), Sofaris (la Société française de garantie des financements de PME),
Sociétés de développement régional. Vous participez activement à la restructuration du
réseau des Sociétés de Développement Régional, à la mise en place d'un plan en faveur des
PME, à la modification de la loi sur les faillites afin de renforcer la garantie des prêteurs.

En 1995 enfin, vous êtes appelé au cabinet de Philippe Douste-Blazy, rue de Valois, où il
vous confie la lourde charge du budget mais aussi des relations sociales, des grands
travaux, des nouvelles technologies et de l'international. Vous suivez à ce titre tous les
dossiers importants du moment. Je pense en particulier à l'achèvement des chantiers de la
Bibliothèque nationale de France et du Grand Louvre, à la rénovation du Centre Pompidou,
mais aussi à la recapitalisation et à la restructuration de la Société française de production,
dans un contexte social assez difficile et sous le contrôle attentif de Bruxelles.

Puis votre carrière, marque un tournant, puisqu'en 1997 vous allez rejoindre pour cinq ans le
secteur privé.

En effet, vous prenez alors le poste de directeur général adjoint de Financière Agache,
holding de contrôle de LVMH, où vous êtes chargé du développement et de la restructuration
financière du groupe. Vos compétences financières et vos talents de négociateur vous
amènent à prendre part à d'importantes opérations de fusion et d'acquisition. J'ajoute que
vous êtes également conseiller du président de LVMH et secrétaire du comité exécutif mis
en place après la réorganisation de cette société par branche.

Puis, en 1999, vous êtes nommé secrétaire général d'AXA France où vous mettez en place
un secrétariat général opérationnel dans le cadre de la fusion avec l'UAP regroupant l'audit,
la communication, le juridique, la qualité et la sûreté. Vos grandes qualités de management
vous permettent de réussir cette fusion qui aboutit au regroupement d'une centaine de
personnes d'origines et de cultures différentes.

Votre exploration du monde des affaires n'est pas tout à fait terminée, puisqu'en 2001 la
Royal Bank of Scotland (RBS) vous propose d'ouvrir un bureau à Paris dans le cadre du
développement de ses activités fonds propres en France.

Mais deux ans plus tard, vous revenez au service public, pour prendre le poste de directeur
général de la Cité des sciences et l'industrie. Vous contribuez alors, sous l'autorité de Jean-
François Hébert, président de cet établissement, à donner un nouvel élan à cette institution,
en veillant à la mise en oeuvre de ces trois priorités :

– le renouvellement de l'offre, en proposant des sujets susceptibles d'attirer un large public,
en prenant en compte les interrogations de nos concitoyens sur les sciences et la société,
en donnant aux visiteurs des clefs et des repères pour comprendre de grands enjeux
contemporains ;

– le resserrement des liens de la Cité avec ses partenaires naturels que sont les
organismes de recherche et la communauté scientifique, le monde industriel, les décideurs
et les médias, les musées, les bibliothèques, à Paris comme en région ;

– enfin, la rénovation d'un bâtiment qui, après 20 ans d'utilisation et le passage de 60
millions de visiteurs, nécessitait d'importants travaux pour améliorer l'accueil et la lisibilité
de l'offre.

Votre double expérience des secteurs public et privé et les qualités dont vous avez témoigné
dans vos postes et fonctions successives m'ont convaincu en 2005 que vous étiez
l'administrateur général qui conviendrait à la Réunion des musées nationaux. Et ce d'autant
qu'en plus d'un scientifique et d'un administrateur de talent, vous êtes indéniablement un
homme de culture. Vous êtes en effet pianiste, et vous avez à votre actif un ouvrage sur le
théâtre de Marivaux et un autre sur le mécénat. Gageons que celui-ci vous sera plus utile,
dans vos fonctions présentes, que celui-là…

Acteur déterminant des échanges et du rayonnement national et international des collections
publiques des musées de France, instrument essentiel de la politique culturelle de l'Etat pour
la diffusion des savoirs, notamment en matière d'édition et d'exposition, la Réunion des
musées nationaux tisse des liens irremplaçables entre toutes les institutions
muséographiques de notre pays.

L'évolution engagée depuis plusieurs années au sein des musées nationaux a modifié ce
paysage institutionnel et rendait nécessaire qu'une réflexion stratégique soit menée, pour
renforcer l'institution, faire évoluer ses missions dans le respect de son histoire, valoriser au
mieux la compétence de son personnel et moderniser son activité, dans le contexte de la
décentralisation culturelle.

J'ai donc souhaité que vous vous attachiez à développer une politique culturelle de niveau
international, au moyen d'une programmation ambitieuse, attirant un large public aux
galeries nationales du Grand Palais – qui viennent d'être affectées à la RMN – mais aussi
d'une politique soucieuse de dialogue par une politique soucieuse du dialogue européen et
prenant clairement en compte la dimension éducative. J'ai souhaité que des relations de
partenariat plus denses et plus confiantes s'instaurent avec les musées nationaux, en
particulier ceux ayant le statut d'établissement public, notamment sous la forme de
coproduction d'expositions et de coéditions. J'attache, vous le savez, une grande importance
aux partenariats que vous pourrez développer avec les musées de France en région.

Les résultats culturels de la Réunion des musées nationaux, si j'en juge seulement par le
prodigieux succès des expositions actuellement présentées sont au rendez-vous et sont une
promesse de réussite pour l'avenir. Je suis persuadé que les mois qui viennent verront se
confirmer l'amélioration de la situation financière et la stabilisation de l'organisation
fonctionnelle de l'établissement, lui permettant d'envisager sereinement son développement.

La distinction qui vous est décernée est pleinement méritée par vos talents. Qu'elle ait,
également de ma part, valeur de reconnaissance et d'encouragement à l'égard de vousmême,
bien sûr, mais aussi de toutes les équipes et de l'ensemble du personnel de la
Réunion des musées nationaux, qui ont su contribuer à des changements, importants et sont
avec vous déterminés à porter le rayonnement des grandes expositions et des éditions
françaises des musées.

Cher Thomas Grenon, au nom du Président de la République et en vertu des pouvoirs qui
nous sont conférés, nous vous faisons Chevalier dans l'ordre national du Mérite.

Audition devant la commission des affaires culturelles familiales et Sociales et la commission des finances de l'Assemblée nationale

15 novembre 2005

Messieurs les Présidents,

Messieurs les Rapporteurs,

Mesdames et Messieurs les Députés,

La nouvelle loi organique relative aux lois de finances entre pleinement
en vigueur au 1er janvier prochain.

J’ai d’emblée voulu — plusieurs d’entre vous m’ont déjà entendu le dire
— que la politique culturelle que je mets en oeuvre rue de Valois
concrétise une alliance entre la création et le patrimoine. Cette alliance
suppose que soit trouvé un point d’équilibre entre l’encouragement de
la création d’aujourd’hui, qui s’inspire pour partie de ce qui a été créé
dans le passé et alimentera le patrimoine de demain, et la conservation
de ce qui a été créé par les générations précédentes et est devenu le
patrimoine d’aujourd’hui. L’un ne peut vivre sans l’autre et cette
symbiose a une traduction concrète sur le plan budgétaire : le ministre
de la culture que je suis ne peut négliger ni les crédits consacrés à la
création, ni ceux consacrés au patrimoine.

Cette volonté d’équilibre
m’anime depuis dix-huit mois et elle acquiert une visibilité et un
importance symboliques plus grandes encore dans ce projet de loi de
finances pour 2006, avec la mise en oeuvre de la LOLF, et, pour la
mission « Culture », des trois programmes consacrés respectivement
aux patrimoines, à la création et à la transmission des savoirs et à la
démocratisation de la culture. Au sein du budget de la mission
« culture », en y incluant les dépenses de personnel, la répartition des
crédits entre les trois programmes démontre le respect de cet équilibre :
36 % pour le patrimoine, 33 % pour la création et 31 % pour la
transmission des savoirs.

J’ai exposé ma politique en faveur du patrimoine à l’occasion des Journées
européennes du patrimoine et de ma communication au conseil des ministres
le 13 septembre.

Dans le domaine du spectacle vivant, j’ai annoncé mes priorités pour étendre
les territoires de la musique, à Strasbourg, le 23 septembre ; ma politique du
théâtre le 5 octobre ; celle pour les musiques actuelles le 7 octobre à Nancy ;
le 13 octobre mon action en faveur de la danse.

Le 10 octobre, le Premier ministre a présenté le plan du gouvernement en
faveur de la création, en particulier dans le domaine des arts plastiques, lors
de la visite de la FIAC.

Avec mon collègue Gilles de Robien, j’entends également relancer la grande
ambition de l’éducation artistique et culturelle, que j’ai défendue samedi à
Nantes, aux assises nationales de l’éducation artistique.

Vous le voyez, je ne néglige aucune discipline et je dégage des priorités.
Au-delà de ce souci d’équilibre, la politique culturelle contribue à aux objectifs
essentiels de l’action du Gouvernement : l’épanouissement personnel de nos
concitoyens, la cohésion sociale, mais aussi l’attractivité économique de notre
pays. A cet égard, si, le mois dernier, la convention pour la diversité culturelle
de l’Unesco a été adoptée à la quasi unanimité et ce, à l’initiative de la
France, c’est aussi parce que notre politique culturelle est crédible. Le projet
de budget que je vous présente est destiné à la conforter.

LA MISSION « CULTURE »

En 2006, le budget de la mission « culture » est de 2.886 millions d’euros en
autorisations d’engagement et de 2.802 millions d’euros en crédits de
paiement, auxquels il faut ajouter une dotation en capital de cent millions
d’euros issue des recettes de privatisations.

Je souhaite que chacun mesure, au-delà même de son impact budgétaire, la
portée politique et symbolique de cette décision du Premier ministre. Les
recettes des privatisations et de la mise sur le marché des actifs publics de
l’Etat reviennent ainsi dans le patrimoine de l’Etat, c’est-à-dire dans notre
patrimoine à tous. Cette dotation va permettre de payer cent millions d’euros
d’investissement, pas un centime ne sera détourné en fonctionnement.

La nouvelle présentation budgétaire dissocie clairement les crédits qui
relèvent des dépenses de personnel de ceux qui relèvent des moyens
d’intervention et d’investissement. Les crédits de personnel sont de 642
millions d’euros, soit 23 % des crédits de la mission. Ce ministère continuera,
là où c’est possible, à poursuivre la réduction de ses effectifs. Mais, pour
autant, l’accès d’un public plus nombreux à la culture et l’ouverture de
nouveaux lieux nécessitent des moyens nouveaux. Il faut trouver un point
d’équilibre entre la règle du non remplacement, la nécessité de maintenir et
de revaloriser certaines filières, je pense en particulier à l’accueil et à la
surveillance, et l’impératif de mettre la culture à la portée de tous.

Le programme « patrimoines »

Commençons par le programme « patrimoines », dont les autorisations
d’engagement représentent plus de 1,08 milliards d’euros et les crédits de
paiement 976 millions d’euros, sans la dotation en capital que j’ai évoquée.

Ainsi, au total, les moyens consacrés au patrimoine monumental vont
augmenter de cent millions d’euros. Je connais les difficultés sur les chantiers
des monuments historiques et les besoins dans ce domaine. Je tiens à
souligner que grâce à cet effort, l’engagement de l’Etat retrouve un rythme
qu’il n’avait jamais connu avant la tempête de 1999. Mais la gestion 2006
sera, je vous l’avoue, très tendue.

Dès l’an prochain, ce ministère disposera d’une programmation précise des
quelque dix mille chantiers en cours, et nous pourrons ainsi suivre en temps
réel l’avancement des travaux. Les progrès que nous allons réaliser grâce à
l’informatique de gestion nous permettront de répondre plus facilement aux interrogations sur la poursuite des chantiers et de mieux gérer les crédits
disponibles.

La dotation en capital destinée au patrimoine monumental permettra de
garantir la bonne exécution d’un certain nombre de chantiers : il a été choisi
d’en affecter le produit à certains sites pour lesquels un effort particulier était
nécessaire : la cité de l’immigration, la cité de l’architecture et du patrimoine,
le château de Versailles et le Fort Saint-Jean à Marseille.

L’architecture bénéficiera également de nombreuses mesures nouvelles, en
particulier pour la rénovation des écoles, pour la revalorisation du statut des
architectes et pour une meilleure reconnaissance de leur formidable travail.

Cette mobilisation en faveur de l’architecture sera poursuivie en 2007 : elle
accompagne la mise en place du cursus « LMD » [ Licence-Master-Doctorat ]
dans les écoles. C’est la première fois qu’autant de mesures sont prises pour
l’architecture dans le budget du ministère de la culture, signe de l’intérêt de ce
gouvernement pour le cadre de vie des Français.

La dotation en faveur des archives, qui dépasse les cent millions d’euros, est
exceptionnelle. Elle est liée à la construction du nouveau centre des archives
nationales de Pierrefitte, en Seine Saint-Denis.

La réhabilitation du site historique de la Bibliothèque nationale, rue de
Richelieu, va débuter en 2006 à ma demande. Il s’agit d’abord de sa mise aux
normes de sécurité, qui n’a que trop attendue. Puis viendra la réalisation d’un
projet de réhabilitation complète permettant l’accès d’un public plus large à
ses riches collections.

Je terminerai, sur le programme « patrimoines », en parlant des musées.

Le
projet de budget que je vous soumets permettra de lancer plusieurs grands
chantiers ambitieux.

Je pense au département des arts de l’Islam du Louvre, dont le chantier
démarrera l’an prochain. Je pense au château de Versailles, dont le schéma
directeur doit avancer au même rythme que la progression de la
fréquentation. Je pense aussi aux châteaux-musées, comme Compiègne,
Fontainebleau ou Pau. J’ai souhaité les ouvrir à de nouveaux publics. Un
effort pluriannuel important sera engagé, afin que ce patrimoine prestigieux
soit restauré et entretenu correctement.

Les ouvertures d’établissements nouveaux ou réhabilités seront nombreuses
en 2006. Au mois de mai, c’est l’Orangerie qui ouvrira ses portes avec l’aide
de la Réunion des musées nationaux. En juin, ce sera l’ouverture du
magnifique musée du quai Branly, dédié aux arts premiers. Je pense aussi au
centre national du costume de scène à Moulins, qui sera inauguré au
printemps prochain.

Enfin, en septembre, le musée des arts décoratifs rouvrira ses portes dans
l’enceinte du Louvre, après une restructuration complète.

Nous poursuivrons la réalisation du musée des civilisations européennes et
méditerranéennes à Marseille, avec la fin de la réhabilitation du fort Saint-
Jean et l’ouverture du chantier des collections.

Le programme « création »

Vous savez combien je suis attaché, dans le secteur du spectacle vivant, à
développer une politique d’emploi de qualité.

Je vous l’ai dit, cette année la priorité va au patrimoine, mais dans le respect
des besoins liés au soutien à la création, et tout particulièrement au
spectacle vivant et aux arts plastiques.

Dans chacun des domaines du spectacle vivant, la présence des créateurs
sera renforcée, dès 2006, au sein des lieux de production et de diffusion. Des
mesures spécifiques, dans chaque discipline, qui visent à mieux associer les
créateurs aux équipes de direction, à faciliter leur résidence dans les théâtres
généralistes comme dans les institutions spécialisées, sont détaillées dans
les plans sectoriels que j’ai évoqués au début de mon propos.

Il s’agit pour moi d’encourager, dans le réseau très large d’équipements
généralistes dont la France est dotée, la naissance de projets qui, dans le
plus grand respect de l’indépendance artistique des créateurs et des
programmateurs, comme vous avez pu le constater cet été, sont ouverts à la
rencontre entre les disciplines, les artistes, les interprètes et un public en
attente de propositions diverses et cohérentes, signées mais ouvertes.

La création bénéficie de 901 millions d’euros.

Cette dotation conforte à la fois les marges artistiques des grandes
institutions et les compagnies. Dans la nouvelle présentation budgétaire, 601
millions d’euros sont consacrés au spectacle vivant. D’autres crédits, en
particulier les crédits de formation, se trouvent inscrits dans le troisième
programme, celui de la transmission des savoirs. En reconstituant le
périmètre de l’an passé, le total des crédits pour le spectacle vivant s’élève
ainsi à 775 millions d’euros. Une part de ces crédits sera consacrée au plan
pour l’emploi que j’ai initié en 2005.

Le théâtre et la musique seront marqués en 2006 par la réouverture de deux
grands lieux : à la fin du premier trimestre, la salle Claudel du théâtre de
l’Odéon et, à l’automne, la salle Pleyel. Ces deux grands équipements de
renommée internationale manquaient à la France depuis leur fermeture pour
travaux. Je suis heureux qu’ils puissent accueillir à nouveau des productions
de qualité. Parallèlement, la poursuite d’une programmation distincte à la
salle Berthier, partie intégrante du théâtre de l’Odéon, permettra d’accueillir
des compagnies indépendantes ou de régions et d’enrichir la palette des
spectacles proposés à Paris.

Ces réouvertures n’épuisent pas la question des salles de spectacle à Paris
et notamment celle d’un grand auditorium. Le premier ministre l’a appelé de
ses voeux. C’est un projet qui nécessite une réflexion nourrie, dans une
logique de partenariat avec les collectivités locales.

Vingt-neuf millions d’euros seront consacrés à la création, la production et la
diffusion des arts plastiques. Ces investissements concernent le Palais de
Tokyo, mais aussi la manufacture des Gobelins et le Mobilier national.

Comme l’a rappelé le Premier ministre, le Grand Palais accueillera en 2007
une grande exposition consacrée à l’art contemporain français.

Le Premier ministre a également annoncé à la FIAC une série de mesures
destinées à assurer le rayonnement international de la création française
contemporaine. Parmi celles-ci, je rappelle qu’il m’a demandé, en liaison avec
mon collègue de l’économie et des finances, de réduire les disparités liées à
la fiscalité du marché de l’art, en étudiant notamment la possibilité pour les
créations réalisées sur support numérique ou audiovisuel de bénéficier du
même régime de TVA que les autres oeuvres d’art, soit un taux de 5,5 %. Il a
également souhaité que les oeuvres d’artistes vivants puissent être remises
en dation, pour acquitter l’impôt sur la fortune ou les droits de succession ou
de donation, comme c’est déjà le cas pour les oeuvres plus anciennes.

Il convient aussi que les particuliers soient encouragés à acquérir des
oeuvres, par exemple par une déduction fiscale sur les achats d’oeuvres
d’artistes ayant leur foyer fiscal en France et vendues par des galeries.

Par ailleurs, si la loi du 1er août 2003 a créé des conditions très favorables
pour le mécénat d’entreprise, l’instruction du 13 juillet 2004 sur cette loi en a
réduit la portée en imposant aux entreprises des conditions très exigeantes
de présentation au public des oeuvres acquises. Aussi le premier ministre a –
t-il demandé qu’une nouvelle instruction soit prise, veillant plus simplement à
ce que l’oeuvre soit exposée dans un lieu accessible aux salariés, clients et
partenaires de l’entreprise.

Le programme « transmission des savoirs et démocratisation de la culture »
Enfin, le troisième programme de la mission « culture » est celui qui comporte
l’essentiel des coûts de personnel et de fonctionnement du ministère, mais
aussi l’éducation artistique et culturelle et les enseignements artistiques,
auxquels j’attache la plus haute importance.

Ces efforts pour l’éducation artistique et culturelle se font en majorité dans les
directions régionales des affaires culturelles, mais également dans les grands
établissements publics : ces aides représentent 40 millions d’euros.

Notre idée centrale est de demander à l'ensemble des établissements
scolaires de s'associer avec une équipe artistique, une structure ou un lieu
culturel, pour assurer une ouverture des élèves au monde des arts et de la
culture, par la présence conjointe, dans un projet commun, d'une parole
pédagogique et d'une parole artistique et culturelle. C’est ce que j’appelle le
principe du jumelage.

Enfin, sur le plus long terme, une vraie réflexion est à mener entre la rue de
Valois et la rue de Grenelle, sur la place de l'éducation à la culture dans les
cursus éducatifs, au-delà des seuls enseignements artistiques traditionnels,
et de leur intégration au sein du socle fondamental des connaissances.

Tel
est le rôle essentiel du Haut Conseil de l'éducation artistique et culturelle, qui
devra aussi, bien entendu, travailler sur les excellentes propositions de votre
mission et du rapport de Mme Marland-Militello.

Je terminerai par mes priorités pour le cinéma, la production audiovisuelle et
l’industrie du disque. Elles sont en premier lieu la poursuite d’une politique de
l’emploi et d’une politique fiscale ambitieuses.

Le crédit d’impôt en faveur de la production cinématographique que vous
avez adopté en 2004, puis que vous avez étendu, à ma demande, à la
production audiovisuelle en 2005, ont permis, en accueillant et en
relocalisant, avec le concours des régions, de nombreux tournages, de créer
ou de sauvegarder 3000 emplois dans les secteurs de la production
cinématographique et audiovisuelle.

Ce bilan positif nous incite à porter l’effort, en 2006, sur la consolidation de
ces mesures.

L’effet structurant de telles mesures fiscales, pour soutenir et défendre la
diversité de nos créations, de nos emplois et de nos industries culturelles,
pour relancer l’investissement et permettre la prise de risque, peuvent nous
inciter à les étendre, et je pense en particulier au domaine du disque.

C’est
pourquoi j’ai proposé la création d’un crédit d’impôt pour les PME du disque,
ainsi qu’un fonds d’avance remboursable, qui pourrait permettre de recréer
1500 emplois directs et indirects dans ce secteur.

Le projet de budget pour 2006 marque une stabilisation des crédits destinés
au cinéma et à l’audiovisuel. Au titre du soutien aux industries
cinématographique et audiovisuelle, le budget d’interventions du CNC pour
2006, s’élève à 495,5 millions d’euros.

Ce budget est alimenté par les taxes affectées à la mission cinéma,
audiovisuel et expression radiophonique locale, pour les programmes
« industries cinématographiques et audiovisuelles ». Au titre des actions
financées par le ministère de la culture, dont les crédits d’intervention et
d’investissement sont gérés par le CNC, le budget, pour 2006, s’élève à 41,9
millions d’euros.

Les crédits de subventions sont destinées pour l’essentiel au « 51 Rue de
Bercy », à la nouvelle Cinémathèque française, qui vient d’ouvrir et dont le
succès ne se dément pas. Les crédits d’investissement concernent la
poursuite du plan de restauration des films ainsi que des travaux de
construction réalisés aux Archives françaises du film du CNC.

Le budget du CNC devra aussi être modernisé avec, à terme, une fusion des
comptes et une suppression du compte d’affectation spéciale au profit d’une
taxe affectée directement au CNC, ce qui devrait dégager des économies de
gestion.

J’en viens donc à la modernisation.

Pour répondre aux défis de l’action de l’Etat dans un contexte budgétaire
contraint, il est une priorité stratégique : c’est la modernisation de mon
administration.

Tout d’abord, j’ai décidé de créer un poste de secrétaire général au sein du
ministère de la culture et de la communication, permettant de coordonner la
mise en place des réformes, dans un ministère qui comporte dix directions
d’administration centrale et soixante-dix établissements publics.

J’ai également décidé d’engager une réforme de la Direction de la Musique,
de la Danse, du Théâtre et des Spectacles (DMDTS). Je souhaite que les
compétences de cette direction trouvent, dans le cadre d’une organisation
rénovée et plus proche des réalités de la vie artistique, à s’exprimer
pleinement.

Dans ce but, j’ai confié à l’inspection générale de l’administration de la culture
une mission d’analyse du fonctionnement de la DMDTS. Les professionnels
du spectacle, dans toutes les disciplines, seront largement associés à cette
réflexion, afin qu’elle aboutisse à une réforme que je souhaite mettre en
oeuvre avant la fin du 1er semestre 2006.

Vous le savez, l’accès de tous à la culture, et le service du public, se jouent
aujourd’hui, essentiellement, dans les régions, avec la déconcentration des
crédits, la décentralisation des missions et les projets, partout exprimés par
les élus, pour répondre aux envies, aux demandes, aux besoins de culture de
leurs populations.

Dans le cadre de la réforme de l’administration régionale de l’Etat, j’ai créé
cette année des « pôles culture » auprès du préfet de région. Ils sont animés
par les Directeurs régionaux des Affaires culturelles (DRAC) et regroupent
tous les services et établissements culturels de l’Etat, afin de mieux
coordonner leur action. J’ai également voulu la création dans chaque DRAC
d’un service régional de l’architecture et du patrimoine pour donner plus de
lisibilité et d’efficacité à notre action.

Enfin, j’ai décidé que se tiendraient deux fois par an des conférences d’action
culturelle de l’Etat. Ces conférences, qui sont une innovation, ont pour objet
de rassembler tous les acteurs du ministère de la culture afin de bien mettre
en oeuvre, en dépassant tous les cloisonnements, les priorités de l’action de
l’Etat.

Ce ministère doit simplifier son action, la rendre plus visible et plus lisible.

Ainsi, par exemple, les SDAP que je viens de citer, doivent devenir à terme
un véritable guichet unique pour toutes les questions de patrimoine et
d’architecture dépendant de mon ministère, sans déposséder de leurs
prérogatives les conservations régionales des monuments historiques : c’est
à l’administration de gérer la complexité des dossiers et au citoyen de trouver
la simplicité. La gestion de notre patrimoine doit être exemplaire sur ce point.

Tel est l’objet des mesures que j’ai présentées au conseil des ministres, le
13 septembre dernier.

Enfin, le comité de pilotage de la bibliothèque numérique européenne, que je
préside, avance et sera doté de 400 000 euros l’an prochain, si vous adoptez
le budget qui vous est soumis, afin que de ce grand et beau projet, voulu par
le Président de la République, jaillissent de nouvelles sources de
connaissances et de découvertes accessibles à tous les publics.

Ce ministère est bien géré et il est important que cela se sache. J’en veux
pour preuve l’excellente exécution de son budget pour 2004, que le Sénat a
soulignée lors du débat qu’il a organisé avant le vote de la loi de règlement.

Pour terminer, je voudrais vous parler du chiffre symbolique du 1% du budget
général de l’État consacré à la culture. Je vous avais dit l’an passé que ce
chiffre symbolique, qui n’était pas tout à fait atteint, me semblait bien en deçà
des besoins réels. Cette année, avec les changements de périmètre, la
culture représente 1,11 % du budget général : il n’en demeure pas moins que
même à ce niveau, le chiffre est encore bien inférieur aux besoins qui,
notamment en termes d’investissements, restent immenses.

Je vous remercie.

Audition devant la commission des affaires culturelles du Sénat

15 novembre 2005

Monsieur le Président,

Messieurs les Rapporteurs,

Mesdames et Messieurs les Sénateurs,

La nouvelle loi organique relative aux lois de finances entre pleinement en
vigueur au 1er janvier prochain. Et le Sénat a innové en organisant un débat en
séance publique le 12 octobre dernier sur la loi de règlement 2004 avant la
présentation de mon projet de budget. Votre Haute Assemblée est ainsi
pleinement éclairée sur la gestion du ministère de la culture et sur la
préparation du budget 2006.

Au sein du budget de la mission « culture », en y incluant les dépenses de
personnel, la répartition des crédits entre les trois programmes démontre le
respect de l’équilibre que j’ai souhaité : 36 % pour les patrimoines, 33 % pour
la création et 31 % pour la transmission des savoirs.

J’ai exposé ma politique en faveur du patrimoine à l’occasion des Journées
européennes du patrimoine et de ma communication au conseil des ministres
le 13 septembre.

Dans le domaine du spectacle vivant, j’ai annoncé mes priorités pour étendre
les territoires de la musique, à Strasbourg, le 23 septembre ; ma politique du
théâtre le 5 octobre ; celle pour les musiques actuelles le 7 octobre à Nancy ;
le 13 octobre mon action en faveur de la danse.

Le 10 octobre, le Premier ministre a présenté le plan du gouvernement en
faveur de la création, en particulier dans le domaine des arts plastiques, lors
de la visite de la FIAC.

Avec mon collègue Gilles de Robien, j’entends également relancer la grande
ambition de l’éducation artistique et culturelle, que j’ai défendue samedi à
Nantes, aux assises nationales de l’éducation artistique.
Vous le voyez, je ne néglige aucune discipline et je dégage des priorités.

Au-delà de ce souci d’équilibre, la politique culturelle contribue à aux objectifs
essentiels de l’action du Gouvernement : l’épanouissement personnel de nos
concitoyens, la cohésion sociale, mais aussi l’attractivité économique de notre
pays. A cet égard, si, le mois dernier, la convention pour la diversité culturelle
de l’Unesco a été adoptée à la quasi unanimité et ce, à l’initiative de la France,
c’est aussi parce que notre politique culturelle est crédible. Le projet de budget
que je vous présente est destiné à la conforter.

LA MISSION « CULTURE »

En 2006, le budget de la mission « culture » est de 2.886 millions d’euros en
autorisations d’engagement et de 2.802 millions d’euros en crédits de
paiement, auxquels il faut ajouter une dotation en capital de cent millions
d’euros issue des recettes de privatisations.

Je souhaite que chacun mesure, au-delà même de son impact budgétaire, la
portée politique et symbolique de cette décision du Premier ministre. Les
recettes des privatisations et de la mise sur le marché des actifs publics de
l’Etat reviennent ainsi dans le patrimoine de l’Etat, c’est-à-dire dans notre
patrimoine à tous. Cette dotation va permettre de payer cent millions d’euros
d’investissement, pas un centime ne sera détourné en fonctionnement.

La nouvelle présentation budgétaire dissocie clairement les crédits qui
relèvent des dépenses de personnel de ceux qui relèvent des moyens
d’intervention et d’investissement. Les crédits de personnel sont de 642
millions d’euros, soit 23 % des crédits de la mission. Ce ministère continuera,
là où c’est possible, à poursuivre la réduction de ses effectifs. Mais, pour
autant, l’accès d’un public plus nombreux à la culture et l’ouverture de
nouveaux lieux nécessitent des moyens nouveaux. Il faut trouver un point
d’équilibre entre la règle du non remplacement, la nécessité de maintenir et
de revaloriser certaines filières, je pense en particulier à l’accueil et à la
surveillance, et l’impératif de mettre la culture à la portée de tous.

Le programme « patrimoines »

Commençons par le programme « patrimoines », dont les autorisations
d’engagement représentent plus de 1,08 milliards d’euros et les crédits de
paiement 976 millions d’euros, sans la dotation en capital que j’ai évoquée.

Ainsi, au total, les moyens consacrés au patrimoine monumental vont
augmenter de cent millions d’euros. Je connais les difficultés sur les chantiers
des monuments historiques et les besoins dans ce domaine. Je tiens à
souligner que grâce à cet effort, l’engagement de l’Etat retrouve un rythme
qu’il n’avait jamais connu avant la tempête de 1999. Mais la gestion 2006
sera, je vous l’avoue, très tendue.

Dès l’an prochain, ce ministère disposera d’une programmation précise des
quelque dix mille chantiers en cours, et nous pourrons ainsi suivre en temps
réel l’avancement des travaux. Les progrès que nous allons réaliser grâce à
l’informatique de gestion nous permettront de répondre plus facilement aux
interrogations sur la poursuite des chantiers et de mieux gérer les crédits
disponibles.

La dotation en capital destinée au patrimoine monumental permettra de
garantir la bonne exécution d’un certain nombre de chantiers : il a été choisi
d’en affecter le produit à certains sites pour lesquels un effort particulier était
nécessaire : la cité de l’immigration, la cité de l’architecture et du patrimoine,
le château de Versailles et le Fort Saint-Jean à Marseille.

L’architecture bénéficiera également de nombreuses mesures nouvelles, en
particulier pour la rénovation des écoles, pour la revalorisation du statut des
architectes et pour une meilleure reconnaissance de leur formidable travail.

Cette mobilisation en faveur de l’architecture sera poursuivie en 2007 : elle
accompagne la mise en place du cursus « LMD » [ Licence-Master-Doctorat ]
dans les écoles. C’est la première fois qu’autant de mesures sont prises pour
l’architecture dans le budget du ministère de la culture, signe de l’intérêt de ce
gouvernement pour le cadre de vie des Français.

La dotation en faveur des archives, qui dépasse les cent millions d’euros, est
exceptionnelle. Elle est liée à la construction du nouveau centre des archives
nationales de Pierrefitte, en Seine Saint-Denis.

La réhabilitation du site historique de la Bibliothèque nationale, rue de
Richelieu, va débuter en 2006 à ma demande. Il s’agit d’abord de sa mise aux
normes de sécurité, qui n’a que trop attendue. Puis viendra la réalisation d’un
projet de réhabilitation complète permettant l’accès d’un public plus large à
ses riches collections.

Je terminerai, sur le programme « patrimoines », en parlant des musées.

Le
projet de budget que je vous soumets permettra de lancer plusieurs grands
chantiers ambitieux.

Je pense au département des arts de l’Islam du Louvre, dont le chantier
démarrera l’an prochain. Je pense au château de Versailles, dont le schéma
directeur doit avancer au même rythme que la progression de la
fréquentation. Je pense aussi aux châteaux-musées, comme Compiègne,
Fontainebleau ou Pau. J’ai souhaité les ouvrir à de nouveaux publics. Un
effort pluriannuel important sera engagé, afin que ce patrimoine prestigieux
soit restauré et entretenu correctement.

Les ouvertures d’établissements nouveaux ou réhabilités seront nombreuses
en 2006. Au mois de mai, c’est l’Orangerie qui ouvrira ses portes avec l’aide
de la Réunion des musées nationaux. En juin, ce sera l’ouverture du
magnifique musée du quai Branly, dédié aux arts premiers. Je pense aussi au
centre national du costume de scène à Moulins, qui sera inauguré au
printemps prochain.

Enfin, en septembre, le musée des arts décoratifs rouvrira ses portes dans
l’enceinte du Louvre, après une restructuration complète.

Nous poursuivrons la réalisation du musée des civilisations européennes et
méditerranéennes à Marseille, avec la fin de la réhabilitation du fort Saint-
Jean et l’ouverture du chantier des collections.

Le programme « création »

Vous savez combien je suis attaché, dans le secteur du spectacle vivant, à
développer une politique d’emploi de qualité.

Je vous l’ai dit, cette année la priorité va au patrimoine, mais dans le respect
des besoins liés au soutien à la création, et tout particulièrement au
spectacle vivant et aux arts plastiques.

Dans chacun des domaines du spectacle vivant, la présence des créateurs
sera renforcée, dès 2006, au sein des lieux de production et de diffusion. Des
mesures spécifiques, dans chaque discipline, qui visent à mieux associer les
créateurs aux équipes de direction, à faciliter leur résidence dans les théâtres
généralistes comme dans les institutions spécialisées, sont détaillées dans
les plans sectoriels que j’ai évoqués au début de mon propos.

Il s’agit pour moi d’encourager, dans le réseau très large d’équipements
généralistes dont la France est dotée, la naissance de projets qui, dans le
plus grand respect de l’indépendance artistique des créateurs et des
programmateurs, comme vous avez pu le constater cet été, sont ouverts à la
rencontre entre les disciplines, les artistes, les interprètes et un public en
attente de propositions diverses et cohérentes, signées mais ouvertes.

La création bénéficie de 901 millions d’euros.

Cette dotation conforte à la fois les marges artistiques des grandes
institutions et les compagnies. Dans la nouvelle présentation budgétaire, 601
millions d’euros sont consacrés au spectacle vivant. D’autres crédits, en
particulier les crédits de formation, se trouvent inscrits dans le troisième
programme, celui de la transmission des savoirs. En reconstituant le
périmètre de l’an passé, le total des crédits pour le spectacle vivant s’élève
ainsi à 775 millions d’euros. Une part de ces crédits sera consacrée au plan
pour l’emploi que j’ai initié en 2005.

Le théâtre et la musique seront marqués en 2006 par la réouverture de deux
grands lieux : à la fin du premier trimestre, la salle Claudel du théâtre de
l’Odéon et, à l’automne, la salle Pleyel. Ces deux grands équipements de
renommée internationale manquaient à la France depuis leur fermeture pour
travaux. Je suis heureux qu’ils puissent accueillir à nouveau des productions
de qualité. Parallèlement, la poursuite d’une programmation distincte à la
salle Berthier, partie intégrante du théâtre de l’Odéon, permettra d’accueillir
des compagnies indépendantes ou de régions et d’enrichir la palette des
spectacles proposés à Paris.

Ces réouvertures n’épuisent pas la question des salles de spectacle à Paris
et notamment celle d’un grand auditorium. Le premier ministre l’a appelé de
ses voeux. C’est un projet qui nécessite une réflexion nourrie, dans une
logique de partenariat avec les collectivités locales.

Vingt-neuf millions d’euros seront consacrés à la création, la production et la
diffusion des arts plastiques. Ces investissements concernent le Palais de
Tokyo, mais aussi la manufacture des Gobelins et le Mobilier national.
Comme l’a rappelé le Premier ministre, le Grand Palais accueillera en 2007
une grande exposition consacrée à l’art contemporain français.

Le Premier ministre a également annoncé à la FIAC une série de mesures
destinées à assurer le rayonnement international de la création française
contemporaine. Parmi celles-ci, je rappelle qu’il m’a demandé, en liaison avec
mon collègue de l’économie et des finances, de réduire les disparités liées à
la fiscalité du marché de l’art, en étudiant notamment la possibilité pour les
créations réalisées sur support numérique ou audiovisuel de bénéficier du
même régime de TVA que les autres oeuvres d’art, soit un taux de 5,5 %. Il a
également souhaité que les oeuvres d’artistes vivants puissent être remises
en dation, pour acquitter l’impôt sur la fortune ou les droits de succession ou
de donation, comme c’est déjà le cas pour les oeuvres plus anciennes.
Il convient aussi que les particuliers soient encouragés à acquérir des
oeuvres, par exemple par une déduction fiscale sur les achats d’oeuvres
d’artistes ayant leur foyer fiscal en France et vendues par des galeries.

Par ailleurs, si la loi du 1er août 2003 a créé des conditions très favorables
pour le mécénat d’entreprise, l’instruction du 13 juillet 2004 sur cette loi en a
réduit la portée en imposant aux entreprises des conditions très exigeantes
de présentation au public des oeuvres acquises. Aussi le premier ministre a –
t-il demandé qu’une nouvelle instruction soit prise, veillant plus simplement à
ce que l’oeuvre soit exposée dans un lieu accessible aux salariés, clients et
partenaires de l’entreprise.

Le programme « transmission des savoirs et démocratisation de la culture »

Enfin, le troisième programme de la mission « culture » est celui qui comporte
l’essentiel des coûts de personnel et de fonctionnement du ministère, mais
aussi l’éducation artistique et culturelle et les enseignements artistiques,
auxquels j’attache la plus haute importance.

Ces efforts pour l’éducation artistique et culturelle se font en majorité dans les
directions régionales des affaires culturelles, mais également dans les grands
établissements publics : ces aides représentent 40 millions d’euros.

Notre idée centrale est de demander à l'ensemble des établissements
scolaires de s'associer avec une équipe artistique, une structure ou un lieu
culturel, pour assurer une ouverture des élèves au monde des arts et de la
culture, par la présence conjointe, dans un projet commun, d'une parole
pédagogique et d'une parole artistique et culturelle. C’est ce que j’appelle le
principe du jumelage.

Enfin, sur le plus long terme, une vraie réflexion est à mener entre la rue de
Valois et la rue de Grenelle, sur la place de l'éducation à la culture dans les
cursus éducatifs, au-delà des seuls enseignements artistiques traditionnels,
et de leur intégration au sein du socle fondamental des connaissances. Tel
est le rôle essentiel du Haut Conseil de l'éducation artistique et culturelle, qui
devra aussi, bien entendu, travailler sur les excellentes propositions de votre
mission et du rapport de Mme Marland-Militello.

Je terminerai par mes priorités pour le cinéma, la production audiovisuelle et
l’industrie du disque. Elles sont en premier lieu la poursuite d’une politique de
l’emploi et d’une politique fiscale ambitieuses.

Le crédit d’impôt en faveur de la production cinématographique que vous
avez adopté en 2004, puis que vous avez étendu, à ma demande, à la
production audiovisuelle en 2005, ont permis, en accueillant et en
relocalisant, avec le concours des régions, de nombreux tournages, de créer
ou de sauvegarder 3000 emplois dans les secteurs de la production
cinématographique et audiovisuelle.

Ce bilan positif nous incite à porter l’effort, en 2006, sur la consolidation de
ces mesures.

L’effet structurant de telles mesures fiscales, pour soutenir et défendre la
diversité de nos créations, de nos emplois et de nos industries culturelles,
pour relancer l’investissement et permettre la prise de risque, peuvent nous
inciter à les étendre, et je pense en particulier au domaine du disque.

C’est
pourquoi j’ai proposé la création d’un crédit d’impôt pour les PME du disque,
ainsi qu’un fonds d’avance remboursable, qui pourrait permettre de recréer
1500 emplois directs et indirects dans ce secteur.

Le projet de budget pour 2006 marque une stabilisation des crédits destinés
au cinéma et à l’audiovisuel. Au titre du soutien aux industries
cinématographique et audiovisuelle, le budget d’interventions du CNC pour
2006, s’élève à 495,5 millions d’euros.

Ce budget est alimenté par les taxes affectées à la mission cinéma,
audiovisuel et expression radiophonique locale, pour les programmes
« industries cinématographiques et audiovisuelles ». Au titre des actions
financées par le ministère de la culture, dont les crédits d’intervention et
d’investissement sont gérés par le CNC, le budget, pour 2006, s’élève à 41,9
millions d’euros.

Les crédits de subventions sont destinées pour l’essentiel au « 51 Rue de
Bercy », à la nouvelle Cinémathèque française, qui vient d’ouvrir et dont le
succès ne se dément pas. Les crédits d’investissement concernent la
poursuite du plan de restauration des films ainsi que des travaux de
construction réalisés aux Archives françaises du film du CNC.

Le budget du CNC devra aussi être modernisé avec, à terme, une fusion des
comptes et une suppression du compte d’affectation spéciale au profit d’une taxe affectée directement au CNC, ce qui devrait dégager des économies de
gestion.

J’en viens donc à la modernisation.

Pour répondre aux défis de l’action de l’Etat dans un contexte budgétaire
contraint, il est une priorité stratégique : c’est la modernisation de mon
administration.

Tout d’abord, j’ai décidé de créer un poste de secrétaire général au sein du
ministère de la culture et de la communication, permettant de coordonner la
mise en place des réformes, dans un ministère qui comporte dix directions
d’administration centrale et soixante-dix établissements publics.

J’ai également décidé d’engager une réforme de la Direction de la Musique,
de la Danse, du Théâtre et des Spectacles (DMDTS). Je souhaite que les
compétences de cette direction trouvent, dans le cadre d’une organisation
rénovée et plus proche des réalités de la vie artistique, à s’exprimer
pleinement.

Dans ce but, j’ai confié à l’inspection générale de l’administration de la culture
une mission d’analyse du fonctionnement de la DMDTS. Les professionnels
du spectacle, dans toutes les disciplines, seront largement associés à cette
réflexion, afin qu’elle aboutisse à une réforme que je souhaite mettre en
oeuvre avant la fin du 1er semestre 2006.

Vous le savez, l’accès de tous à la culture, et le service du public, se jouent
aujourd’hui, essentiellement, dans les régions, avec la déconcentration des
crédits, la décentralisation des missions et les projets, partout exprimés par
les élus, pour répondre aux envies, aux demandes, aux besoins de culture de
leurs populations.

Dans le cadre de la réforme de l’administration régionale de l’Etat, j’ai créé
cette année des « pôles culture » auprès du préfet de région. Ils sont animés
par les Directeurs régionaux des Affaires culturelles (DRAC) et regroupent
tous les services et établissements culturels de l’Etat, afin de mieux
coordonner leur action. J’ai également voulu la création dans chaque DRAC
d’un service régional de l’architecture et du patrimoine pour donner plus de
lisibilité et d’efficacité à notre action.

Enfin, j’ai décidé que se tiendraient deux fois par an des conférences d’action
culturelle de l’Etat. Ces conférences, qui sont une innovation, ont pour objet
de rassembler tous les acteurs du ministère de la culture afin de bien mettre
en oeuvre, en dépassant tous les cloisonnements, les priorités de l’action de
l’Etat.

Ce ministère doit simplifier son action, la rendre plus visible et plus lisible.

Ainsi, par exemple, les SDAP que je viens de citer, doivent devenir à terme
un véritable guichet unique pour toutes les questions de patrimoine et
d’architecture dépendant de mon ministère, sans déposséder de leurs
prérogatives les conservations régionales des monuments historiques : c’est
à l’administration de gérer la complexité des dossiers et au citoyen de trouver
la simplicité. La gestion de notre patrimoine doit être exemplaire sur ce point.

Tel est l’objet des mesures que j’ai présentées au conseil des ministres, le
13 septembre dernier.

Enfin, le comité de pilotage de la bibliothèque numérique européenne, que je
préside, avance et sera doté de 400 000 euros l’an prochain, si vous adoptez
le budget qui vous est soumis, afin que de ce grand et beau projet, voulu par
le Président de la République, jaillissent de nouvelles sources de
connaissances et de découvertes accessibles à tous les publics.

Ce ministère est bien géré et il est important que cela se sache. J’en veux
pour preuve l’excellente exécution de son budget pour 2004, que le Sénat a
soulignée lors du débat qu’il a organisé avant le vote de la loi de règlement.

LES MISSIONS « MEDIAS » ET « AVANCES A L'AUDIOVISUEL PUBLIC »

Dans ces domaines essentiels pour la vie quotidienne de nos concitoyens et
la cohésion de notre société, l'action de l'Etat est également confrontée à de
nouveaux défis, à de nouvelles ambitions. C’est dans cet esprit que
l'audiovisuel public, tout en renforçant son identité, doit s'adapter aux
mutations provoquées par les nouveaux supports, notamment numériques.

Le démarrage de la télévision numérique de terre (TNT) a été conduit avec
succès. Il y a à peine un an, 70% de nos concitoyens ne recevaient que six
chaînes. Six mois à peine après son lancement, la TNT permet désormais à
un Français sur deux de recevoir seize chaînes gratuites et bientôt dix-huit.

Les ventes des adaptateurs numériques se poursuivent à un rythme rapide.

800 000 adaptateurs ont été vendus entre mars et novembre et le cap du
million sera dépassé d'ici la fin de l'année. C'est un progrès formidable auquel
le service public participe pleinement. Je souhaite que les étapes suivantes
de son déploiement soient menées au plus tôt et que la télévision haute
définition et la télévision mobile bénéficient d'un cadre qui permette leur
développement. J'y travaille activement.

L'arrivée des chaînes payantes donnera une assise supplémentaire à la TNT
et contribuera aussi à son succès. L'enjeu est considérable, et il ne vous a
pas échappé : la richesse et la diversité des programmes des chaînes de la
TNT modifient en profondeur l'offre et la manière de regarder la télévision
pour un très large public.

C'est pourquoi la priorité est maintenant de généraliser l'accès à la télévision
numérique gratuite pour tous.

Chantier prioritaire de l'audiovisuel public, les contrats d'objectifs et de
moyens ont, dans le domaine des médias, mis en oeuvre la LOLF avant la
LOLF. Le bilan des contrats souscrits est largement positif. Le secteur des
médias a été précurseur que ce soit pour l'AFP, France Télévisions ou Arte
France et bien sûr l'Institut national de l'Audiovisuel. Je m'en félicite.
En 2006, la réforme de la redevance audiovisuelle entrera pleinement et
définitivement en vigueur. Cette nouvelle organisation du recouvrement
permet une collecte plus performante d'une taxe plus juste et plus simple.

Au total, le budget du service public de l'audiovisuel qui vous est soumis
augmentera de 109 M- en 2006, soit 3,1%.

Ces contrats seront en pleine cohérence avec la logique de la LOLF, que
nous avons tous à coeur de mettre en oeuvre, dans un souci partagé de
transparence et d'efficacité.

Je tiens à ce que le budget que je vous demande d'adopter permette de
renforcer la qualité et la diversité des programmes, et de financer la
modernisation indispensable des sociétés de l'audiovisuel public.

L'adaptation des programmes aux personnes sourdes et malentendantes constitue également un objectif prioritaire du Gouvernement. France
Télévisions et Arte France ont engagé un plan progressif de sous-titrage qui
concernera 50% des programmes dès 2006.

France Télévisions consacrera la majeure partie de ses moyens
supplémentaires, soit 53 M- HT, résultant de l'augmentation de 3 % de la
dotation publique du groupe et des économies réalisées, à l'amélioration de
l'offre de programmes.

Les priorités pour 2006 sont notamment :

– le renforcement de l'attractivité de France 4 et de France 5 ;

– l'affirmation pour RFO de son identité de diffuseur public de proximité ;

– la participation au développement des nouveaux modes de consommation
audiovisuels avec notamment la haute définition et la télévision mobile ;

– un engagement encore accru dans la création, et dans la production
audiovisuelle et cinématographique ;

– Arte France, qui bénéficiera d'une augmentation de 3,1% de sa dotation
publique par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2005, s'attachera
à consolider sa grille de programmes. Elle maintiendra son effort en faveur
de la création d'oeuvres audiovisuelles innovantes, dans le contexte de
l'élargissement de sa diffusion permis par la TNT.

– Radio France renforcera sa capacité d'innovation et se rapprochera de tous
les auditeurs.

– Radio France Internationale devra consolider sa place de média de
référence. Dans l'attente de la signature du premier contrat d'objectifs et de
moyens entre RFI et l'État, ce projet de budget lui permet de poursuivre la
numérisation de sa production, engagée depuis 2003. RFI s'attachera
également à développer ses sites Internet.

– La sauvegarde et la mise en valeur de notre patrimoine audiovisuel par
l'Institut national de l'Audiovisuel constituent un chantier d'ampleur que j'ai
souhaité inscrire dans le long terme. Il y va de la mémoire audiovisuelle.

La
poursuite de l'accélération du " plan de sauvegarde et de numérisation " qui
permettra de numériser à l'horizon 2015 l'intégralité des fonds audiovisuels
en fonction de leur état de dégradation, est l'une des priorités du budget de
l'audiovisuel public pour 2006, justifiant une dotation en progression de 4,1
% avec une hausse de 3 M- HT.

Le contrat d'objectifs et de moyens de l'INA va être prochainement signé.
La presse est en crise, au sens étymologique de ce terme. Elle est
aujourd'hui à la croisée des chemins. Elle doit se régénérer pour assurer son
avenir et faire face à l'émergence de nouvelles habitudes de consommation, à
l'essor toujours accéléré des nouvelles technologies, au développement d'une
culture de la gratuité, et à l'ensemble des évolutions structurelles qui
bousculent les repères anciens.

Le projet de budget que je vous présente pour 2006 consolide à la hausse
l'effort sans précédent consenti en 2005.

Cette constance dans le soutien à la presse écrite marque la cohérence de
l'action du Gouvernement en même temps que notre volonté de préparer
efficacement l'avenir.

Ce projet de budget traduit les quatre priorités de notre politique en faveur de
la presse : contribuer à la diffusion la plus large de la presse écrite ; soutenir
la modernisation du secteur ; respecter les engagements de l'État, avec le
souci de la plus grande efficacité ; enfin, favoriser le développement à long
terme du lectorat, en menant une action spécifique en direction des jeunes
lecteurs. L'objectif est clair : contribuer à la diffusion la plus large de la presse
écrite française.

Plus de 60 millions d'euros seront mobilisés en 2006 pour accompagner la
modernisation du secteur, afin de soutenir les initiatives dites structurantes ou
innovantes.

L'effort en faveur de la modernisation du réseau des diffuseurs sera renforcé,
afin de prendre en compte notamment les besoins liés à l'informatisation des
points de ventes.

Les crédits du fonds d'aide à la modernisation de la presse, destinés aux
projets de modernisation des entreprises augmentent, dans ce projet de
budget, de près de 20 %.

La budgétisation du compte d'affectation spéciale, que vous aviez souhaitée,
améliore sa lisibilité.

Enfin, de nouvelles mesures, et c'est tout à fait essentiel, sont destinées à
améliorer l'autonomie financière et la capacité d'investir des entreprises de
presse, afin de remédier au défaut de fonds propres qui les caractérise.
La création d'un fonds de garantie dédié aux entreprises de presse au sein de
l'Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC)
facilitera leur accès aux prêts bancaires nécessaires au financement de leurs
investissements. Il sera mis en oeuvre d'ici au 1er janvier 2006.

La dotation prévue pour les abonnements de l'État à l'Agence France-Presse
est conforme à la norme de progression fixée dans le contrat d'objectifs et de
moyens conclu avec l'Agence.

Pour l'aide au transport postal de la presse d'information politique et générale
aussi, l’Etat tient les engagements pris dans le cadre de l'accord signé le 22
juillet 2004 entre l'État, la presse et La Poste.

L'aide à la distribution de la presse quotidienne nationale d'information
politique et générale, créée en 2002, est maintenue.

L'engagement traditionnel de l'État en faveur du pluralisme est poursuivi et
renforcé. Ainsi, l'aide aux quotidiens nationaux d'information politique et
générale à faibles ressources publicitaires, qui est au coeur de notre action,
verra sa dotation progresser de 7,5 %.

Enfin, l'effort spécifique en direction des jeunes lecteurs, amorcé en 2005,
sera prolongé et amplifié en 2006. Une première série de projets innovants a
été mise en route cette année.

Je veux terminer cette présentation par la chaîne d'information internationale
qui vous tient à coeur, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les
Sénateurs. Cette chaîne sera dotée de 65 millions d'euros pour 2006. Je l'ai
répété à maintes reprises, il s'agit là d'une nécessité stratégique. Il y va de
notre vision du monde et de l'influence de nos idées. C'est la raison pour
laquelle cette chaîne devra être très vite diffusée en anglais, en arabe, puis
en espagnol. Financée par l'argent public, il est légitime, comme beaucoup
d'entre vous l'ont souligné, ainsi que le Président de France-Télévisions,
qu'elle soit diffusée en France et qu'elle participe à ce titre au pluralisme de
l'information. Pour cet enjeu national et international majeur, il fallait
rassembler les talents, les expériences et les énergies, unir des sociétés dont
le rôle est fondamental en matière d'information. Je vous confirme donc que,
dans les tout prochains jours, la société réunissant à parité France
Télévisions et TF1 va être constituée, et que le contrat de subvention entre
l'Etat et la chaîne va être signé. Cette chaîne pourra donc démarrer avant la
fin de l'année 2006.

C’est un très beau projet emblématique de la diversité culturelle, qui est une
valeur plus que jamais essentielle dans le monde et la société française
d’aujourd’hui.

Je vous remercie.

Assises nationales de l'Éducation artistique à Nantes

12 novembre 2005

Madame la Conseillère régionale,

Madame la Vice-présidente du Conseil général,

Monsieur l'Adjoint au Maire de Nantes,

Monsieur le Président de l'Association nationale de recherche et d'action théatrale (ANRAT), cher Jacques Lassalle,

Monsieur le Directeur de l'enseignement scolaire,

Mesdames et Messieurs,

Chers Amis,

J'ai personnellement tenu à venir à Nantes ce matin. II m'a paru essentiel de vous écouter, de débattre, d'échanger, de
réfléchir avec vous, de recueillir vos propositions, de saluer votre travail et votre mobilisation.

Parce que I'éducation
artistique et culturelle est un enjeu majeur. Parce que nous sommes au coeur de I'ardente nécessité, de I'ardente
obligation de I'éducation, dans son sens le plus large, c'est-à-dire de l'éducation à la citoyenneté, à la liberté et à
l'intelligence.

Permettez-moi de vous proposer de placer vos assises, cher Jacques Lassalle, sous le parrainage, non pas
seulement des professionnels ici rassemblés, de votre association qui les organise, des collectivités qui nous accueillent
et de l'État qui vous soutient, mais d'abord de la figure tutélaire de Condorcet, lorsqu'il rappelait que I'éducation " est pour
la puissance publique un devoir imposé parl'intérêt commun de la société, par celui de l'humanité entière ".

Je I'ai dit en installant, à l'école du Louvre, le 19 octobre dernier, le Haut Conseil de I'éducation artistique et culturelle,
dont vous etes membre, cher Jacques Lassalle, et je le redis aujourd'hui : l'heure n'est plus à l'incantation, mais à
l'action. Des quinze jours de violences qui ont déchiré notre tissu social urbain, notre conviction à tous sort, non pas
ébranlée mais renforcée. Faisons la partager et avancer ensemble !

Oui, I'éducation artistique et culturelle s'affirme plus
que jamais comme la premiére clef de l'égalité des chances qui doit être donnée à chaque enfant. La culture doit prendre
le chemin de l'école et I'école s'ouvrir davantage encore à l'art et à la culture. Ce qui est en jeu, c'est la construction d'un
bien commun, d'un avenir commun, d'une volonté de vivre ensemble, l'épanouissement de chacun dans notre
République, et dans un monde, où la reconnaissance de la diversité culturelle est non seulement une valeur, mais aussi,
à présent, un principe de droit international, consacré par la conférence générale de l'Unesco – par les représentants des
191 Etats qui la composent – le 20 octobre dernier, à l'unanimité moins deux voix.

C'est dire combien vos propositions, et
le travail que vous faîtes pendant ces trois jours sont précieux. Ici et maintenant. D'autant que ces trois jours d'assises
nationales sont, je le sais, le résultat de cinq années de rencontres régionales. Du Creusot en octobre 2000 jusqu'à
Nantes aujourd'hui, c'est de votre état des lieux, de vos expériences, de vos analyses, de vos observations, de vos
débats, que nous allons tirer les leçons pour « inventer l'avenir », selon votre belle formule, et, ce cap tracé, agir dans le
présent. Mais sans faire table rase du passé. Car ce sont aussi plus de vingt ans d'action et d'initiative de I'ANRAT, qui
ont inventé, accompagné et développé ces rencontres avec le spectacle vivant, que vous appelez le « théatre-éducation
».

Et je sais que le fait que vos assises nationales se tiennent à Nantes ne doit rien au hasard. Je I'ai dit
lorsque je suis venu à la Folle journée. Nous sommes dans une région, un département, une ville qui se sont toujours
illustrés par leur passion, leur mobilisation, leur énergie, leur sens de l'initiative, leur rayonnement. Je tiens à vous en
rendre hommage, Mesdames et Messieurs les élus.

L'action des cinq associations de théatre-éducation », membres de I'ANRAT, qui ont plus particuliérement contribué à
l'organisation de ces journées, est uaussi exemplaire. Je tiens à les citer et à vous en féliciter, Mesdames les Présidentes,
Messieurs les Présidents : pour la Loire-Atlantique, I'association Comète, pour le Maine-et-Loire, l'association En jeu, pour la Vendée, I'association Vents et Marée, pour la Mayenne, I'association Amlet, pour la Sarthe, I'association Théâtre
pour l'avenir, en y associant les scènes nationales de la région et les scènes conventionnées, également partenaires de
ces assises, aux c6tés des collectivités et de I'Etat. Et je sais que la Maison de la Culture de Loire-Atlantique, qui nous
accueille aujourd'hui, Monsieur le Directeur, mène depuis plusieurs années une politique ambitieuse « d'école du
spectateur » qui concerne 85 classes, soit plus de 2000 élèves de collège.

Je suis, je l'ai dit, venu à Nantes, d'abord pour vous rencontrer et recevoir vos propositions. Mais permettez-moi
auparavant de rappeler certains objectifs, certains faits, certaines responsabilités et certaines vérités qui me tiennent à
coeur.

Je reviens un instant, tout d'abord, sur le plan de relance que j'ai présenté en conseil des ministres le 3 janvier dernier, et
sur la circulaire du même jour, qui, pour la première fois, a demandé à toutes les structures subventionnées par le
ministère de la Culture et de la Communication, de mener une action éducative. Parallèlement, au ministère de
I'Education nationale, tous les projets d'établissement devront désormais comporter un volet d'action artistique et
culturelle. L'idée centrale est de demander A l'ensemble des établissements scolaires de s'associer avec une équipe
artistique, une structure ou un lieu culturel, pour assurer une ouverture des éléves au monde des arts et de la culture, par —
la présence conjointe, dans un projet commun, d'une parole pédagogique et d'une parole artistique et culturelle. C'est ce
que j'appelle le principe du jumelage.

II s'agit de franchir un pas décisif, en demandant aux établissements scolaires de s'associer ainsi avec un artiste, une
structure ou un lieu culturel. Ce jumelage, compagnonnage ou parrainage réciproque doit éveiller l'esprit des enfants aux
formes artistiques et culturelles et inscrire cet apprentissage dans une compréhension de notre héritage culturel et de nos
créations contemporaines.

Les élèves pourront ainsi s'approprier une oeuvre de création, un édifice, un quartier, un musée, sans chercher à
privilégier le passé par rapport au présent, mais en apprenant à se situer dans une continuité qui n'est jamais exempte de
ruptures. Ainsi, le viaduc de Millau comme le pont du Gard, sont à la fois des symboles et des édifices, insérés dans leur
environnement, qui réunissent des mondes nouveaux et anciens, en témoignant de la créativité des hommes.

En second lieu, le dispositif gouvernemental des contrats aidés du Plan d'urgence pour l'emploi, décliné pour la Culture et
l'éducation nationale, permet aux Directeurs régionaux des affaires culturelles et aux Recteurs, d'utiliser avec les
structures concernées et les collectivités partenaires, toutes les possibilités de ces emplois aidés pour l'éducation
artistique et culturelle. La constitution des pôles Culture dans les régions, que j'ai souhaitée et mise en oeuvre, permet
cette synergie nouvelle.

Je pense précisément à l'emploi d'artistes ou de médiateurs culturels dans les services éducatifs des structures
culturelles ; mais aussi à l'emploi de jeunes en contrats vie scolaire qui, au sein des établissements, pourront contribuer à
une meilleure découverte de leur environnement culturel de proximité.

Les collectivités territoriales, je m'empresse de le dire, devront copiloter cette politique.

Je tiens à rendre hommage aux collectivités locales, comme je le fais à chacun de mes déplacements à travers la
France, parce qu'elles ont accompli un effort décisif en faveur de la culture, pour toucher des publics de plus en plus
larges et sensibiliser les plus jeunes, dans le cadre scolaire et péri-scolaire. On n'a pas encore, à mon sens, tiré
totalement parti de l'effort de maillage culturel du territoire qui a été réalisé, depuis trente ou quarante ans ! Je pense aux
réseaux de bibliothèques, de centres d'art, de musées, de lieux patrimoniaux et de mémoire, d'écoles de musique, et au
premier chef aux équipes théâtrales et tous les lieux consacrés au spectacle vivant, qui contribuent, de façon
déterminante, à I'éducation aux arts et à la culture dans chacun des équipements de proximité.

Je pense aussi à l'ouverture des lieux, de tous les lieux, en dehors même de l'école, aux activités artistiques et
culturelles, aux jeunes, à tous les publics, au spectacle vivant, bien sûr, mais aussi aux tournages de films, par exemple,
qui toucheront de nouveaux publics. J'ai voulu multiplier les occasions de rencontres, d'échanges, d'ouvertures, entre les
artistes, les institutions et les publics. Je tiens à ce que tout lieu qui bénéficie du soutien de I'Etat soit engagé dans cette
responsabilité. L'Etat dispose là d'une vraie marge de manoeuvre, aux côtés des collectivités territoriales.

Bien sûr, sur le plus long terme, il nous faut approfondir la réflexion, entre la rue de Valois et la rue de Grenelle, sur la
place de I'éducation à la culture dans les cursus éducatifs, au-del8 des seuls enseignements artistiques traditionnels, et
de leur intégration au sein du socle fondamental des connaissances. C'est l'une des missions essentielles du Haut
Conseil de I'éducation artistique et culturelle, qui devra aussi, bien entendu, travailler sur vos propositions.

Je ne suis pas, et je ne serai jamais, le ministre du désengagement de I'Etat. Mesdames et Messieurs les élus, je vais
défendre mardi 15 novembre mon budget devant les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat. J'ai besoin de
votre soutien, de vos incitations à faire plus, et mieux, mais aussi de vos encouragements. Je sais qu'il faut faire plus. Le
rapport de Mme Marland-Militello, au nom de l'Assemblée nationale, va aussi nous y aider. Mais, pour 2006, je vous
rappelle que le ministère de la Culture et de la Communication consacrera à I'éducation artistique et culturelle près de 40
millions d'euros.

– Cette somme se décompose, tout d'abord, en 29 millions d'euros inscrits au projet de loi de finances 2006, pour
accompagner la mise en oeuvre du Plan de relance de I'éducation artistique et culturelle, qui est une priorité de la
politique que je mène depuis vingt mois, avec le soutien des élus locaux et nationaux, et des professionnels, pour
replacer le spectacle vivant, l'art et la culture, au coeur de la cité. Dans ce même esprit, j'ai conforté les moyens
alloués aux structures artistiques et culturelles subventionnées, afin qu'elles puissent présenter un projet d'action
éducative dès 2006.

II faut y ajouter les crédits consacrés, sur leur budget de fonctionnement, par les établissements publics et les
structures artistiques et culturelles subventionnées par le ministère, aux actions d'éducation artistique et culturelle,
estimés à environ 11 millions d'euros en 2006.

Ma politique en faveur de I'éducation artistique et culturelle constitue l'un des volets du plan pour l'emploi que j'ai mis en
oeuvre en faveur du spectacle vivant. Je souhaite d'ailleurs mieux asseoir les interventions en milieu scolaire sur des
projets de création, parce que le plateau n'est plus le seul espace de création.

L'éducation artistique n'est donc plus une mission périphérique. Elle devient ce qu'elle est, une mission centrale.

La volonté politique est là. Vous connaissez la mienne. Elle engage l'ensemble du gouvernement. Le Premier ministre, l'a
exprimée Ifortement A la FIAC, en déclarant, à propos de I'importance de l'intervention des artistes dans le domaine de
I'éducation : « dans un temps qui gomme les aspérités des choses et laisse grandir l'uniformité, leur présence est plus
que jamais nécessaire. Donnons-leur la place et le r61e qu'ils réclament. Apprenons à nos enfants à regarder, à écouter,
à être ouverts à la création artistique dans son ensemble ».

Mon collègue de I'Education nationale, lors de l'installation du Haut conseil, est allé dans le même sens. Nous pouvons
nous en réjouir. Je suis lucide. Mais je suis optimiste, car je sais que toutes les conditions sont aujourd'hui réunies pour
que votre mobilisation, à laquelle je m'associe pleinement, soit entendue et suivie d'effets. Parce que jamais les attentes
n'ont été aussi fortes, jamais les énergies aussi grandes, jamais, sans doute, notre volonté aussi partagée, par les
enseignants, par les élus, par tous les partenaires de la communauté éducative, mais aussi par les artistes et les
responsables d'institutions culturelles que vous représentez. Je suis très sensible à I'importance de vos expériences, de
vos initiatives, et de vos propositions.

Sachez que je vous en remercie, car je sais que cela représente le fruit de vos
travaux, de la longue expérience de votre réseau, comme des projets et des réussites qu'il a menés à bien. Vous me
trouverez toujours à vos côtés pour les faire aboutir, et je compte sur vous pour m'y aider.

Je vous remercie.