Mesdames et Messieurs,
A plusieurs reprises, devant le Conseil national des professions du
spectacle, j’ai dit que le Gouvernement prendrait toutes ses
responsabilités afin de construire un système pérenne et équitable de
soutien à l’emploi et d’assurance chômage adapté aux spécificités du
secteur du spectacle.
Je comptais même – et on me l’a assez rappelé ! – que ce système
puisse être mis en place au 1er janvier 2006.
Il est, à mes yeux, le volet indissociable de l’action artistique, des plans
que j’ai présentés à l’automne pour le théâtre, la musique, la danse, le
court-métrage. Le soutien à l’emploi, la préoccupation de la condition
des artistes et des techniciens, cela fait partie de la conception que je
me fais du rôle d’un Ministre de la Culture et de la Communication. Et
tant pis pour ceux qui voudront moquer l’emploi culturel comme une des
missions du ministère de la Culture et de la Communication. J’assume
d’être aussi le « Ministre de l’emploi culturel ».
Vous le savez, la négociation de la convention pour le régime général
d’assurance chômage a été plus longue que prévu ; les décisions des
confédérations pour signer ou non cette convention pour le régime
général sont intervenues jusqu’à la mi-janvier ; et, concernant les
annexes 8 et 10, relatives à l’assurance chômage des artistes et des
techniciens du spectacle, pour ne pas précipiter la conclusion d’une
négociation qui n’avait pas eu le temps de prendre en compte tous les
travaux et propositions intervenus depuis deux ans, qui aurait pu, ce que
j’avais redouté, se li miter la reconduction du protocole de 2003,
plusieurs organisations ont souhaité – et je les en remercie – prolonger le
régime actuel des annexes 8 et 10 jusqu’à la conclusion d’un nouveau
protocole.
Pour qu’il n’y ait ni vide juridique ni incertitude quant à la couverture
sociale et professionnelle des artistes et des techniciens, pour laisser
aux partenaires sociaux le temps nécessaire à une vraie négociation, à
caractère professionnel, le Gouvernement a décidé d’agréer cette
prorogation – et de maintenir en vigueur le Fonds transitoire qui permet
de réintégrer dans leurs droits les artistes et les techniciens qui
effectuent 507 heures en 12 mois, mais n’y parviennent pas dans les
délais fixés par le protocole du 26 juin 2003.
Les partenaires sociaux ont fixé un calendrier de négociations et de
travail, qui a commencé le 14 février et qui devait s’achever le 8 mars.
Au delà
du point d’équilibre économique auquel ils étaient parvenus le 8
mars, après des travaux d’expertise et de vérifications techniques qui ont
nécessité le report de la réunion de conclusion de leur négociation, les
partenaires sociaux ont finalement défini, le 18 avril dernier, dans un
nouveau protocole, ce que devaient être, à leurs yeux, le niveau et le
contenu de la solidarité interprofessionnelle que recouvre le régime
spécifique d'assurance chômage des artistes et techniciens – même si ce
nouveau protocole fait l’objet d’appréciations contrastées de la part des
différentes confédérations.
C’est leur responsabilité – et le Gouvernement entend la respecter.
Je relève que les mêmes qui nous reprochaient, en décembre dernier, de
n’avoir pas obligé les partenaires sociaux à conclure leur négociation dans
les délais prévus regrettent aujourd’hui que nous ne fassions pas pression
sur eux pour qu’ils prolongent leur discussion et aillent au-delà des
avancées significatives qui figurent dans le nouveau protocole du 18 avril !
Je le répète : le gouvernement entend respecter les prérogatives et les
calendriers du dialogue social.
Avant de définir en quoi ce protocole, renforcé par l’expression de la
solidarité nationale, peut contribuer à créer un système équitable et
pérenne de soutien à l’emploi dans le spectacle, je voudrais souligner
plusieurs éléments novateurs, par rapport aux négociations des
protocoles précédents.
Au plan de la méthode, tout d’abord.
Cette fois-ci, de nombreuses réunions de négociations et de travail
ont eu lieu, officielles ou officieuses, en tous sens et en tous formats,
allant au-delà des canons habituels de la négociation sociale
interprofessionnelle sur les annexes 8 et 10.
Je voudrais relever le souci qui a été celui des organisations confédérales
d’employeurs comme de salariés d’associer étroitement à leurs travaux
les employeurs et les fédérations de salariés du secteur, témoignant
ainsi de leur volonté de donner un caractère pleinement professionnel à
leur négociation. Des propositions importantes, émanant des employeurs
regroupés au sein de la FESAC comme des fédérations de salariés qui
ont participé aux négociations, ont été prises en compte dans le protocole
du 18 avril.
Des rencontres ont été organisées avec les parlementaires, notamment
ceux du Comité de suivi, dont je veux, une nouvelle fois devant vous,
saluer le rôle et le travail depuis plus de deux ans, eux qui ont su, avec les
Commissions des affaires culturelles des deux Assemblées, susciter une
exceptionnelle mobilisation parlementaire en faveur des artistes et des
techniciens du spectacle, en faveur de l’activité culturelle et artistique sur
tout notre territoire.
Des rencontres bilatérales ont eu lieu entre certaines confédérations et
la Coordination des intermittents et précaires d’Ile de France, marquant
ainsi une attention particulière et nouvelle à des contributions émanant
d’artistes et de techniciens qui ont choisi de se regrouper en dehors des
organisations syndicales – mais soulignant aussi, dans le même temps,
que seule l’expression des organisations syndicales doit être prise en
compte dans un dialogue social institutionnel et organisé.
Enfin, les confédérations d’employeurs et de salariés ont tenu à ce que
leur négociation soit éclairée par un travail d’expertise d’une intensité
exceptionnelle, mené en pleine coopération et transparence, tant de la
part de Jean-Paul Guillot, l’expert indépendant désigné par le
Gouvernement et qui a travaillé pour tous les partenaires sociaux qui l’ont
sollicité, que de la part des services techniques de l’UNEDIC. Vous me
permettrez d’exprimer devant vous une gratitude particulière à Jean-Paul
Guillot pour l’intelligence, la rigueur et la constance avec lesquelles il a
accompagné, depuis maintenant près de deux ans, l’élaboration d’un
système pérenne de soutien à l’emploi dans le spectacle.
On peut toujours aller plus loin dans la concertation et la conduite des
négociations. On peut approfondir encore les travaux techniques ; je ne
crois pas qu’une négociation pour définir les annexes 8 et 10 ait jamais
été précédée de tant d’expertises, de chiffrages, de tant de minutie, de
tant de précautions, pour que ceux des partenaires sociaux qui vont
engager leur signature soient bien certains des effets des dispositions du
protocole sur la situation des artistes et des techniciens. Tout ce travail a
été et sera utile, j’en suis convaincu.
Au plan de son contenu, ensuite. Je voudrais m’en tenir à quelques
observations essentielles.
En tant que Ministre de la culture et de la communication, responsable
d’un secteur d’activité essentiel pour le rayonnement de notre pays et
pour sa vitalité économique, je me réjouis très profondément que les
partenaires sociaux aient confirmé l'engagement qu'ils avaient pris
lorsqu'ils se sont réunis à deux reprises, rue de Valois, de maintenir le
régime spécifique d'assurance chômage des artistes et techniciens
au sein de la solidarité interprofessionnelle. Au nom du
Gouvernement, mais aussi, si vous m’y autorisez, au nom des
professionnels du spectacle que ce Conseil représente, je veux
publiquement les en remercier.
Au terme de leur négociation, les partenaires sociaux garantissent aux
artistes et aux techniciens la prise en compte des spécificités de leurs
pratiques d’emploi et un niveau d’indemnisation élevé, de 51 – en
moyenne par jour pour les artistes et de 60 – pour les techniciens (quand
ce niveau est, en moyenne, dans le régime général, de 33 – – même s’il
faut, pour être tout à fait juste, rappeler que le taux de cotisation est
double – mais plafonné ! -pour les employeurs comme pour les salariés
du secteur). Le coût, pour l’UNEDIC, est de l’ordre du milliard d’euros par
an, pour un peu plus de 100 000 artistes et techniciens indemnisés.
Ce protocole prend en compte le rythme d’activité et la saisonnalité
spécifiques au secteur du spectacle. Il permet aux artistes et aux techniciens de retrouver, pour la recherche de leurs droits, la période de
référence annuelle qui correspond au rythme de l’immense majorité
d’entre eux, même si c’est au terme d’un mécanisme un peu complexe.
Le protocole du 18 avril définit une formule de calcul de l’allocation qui
encourage à déclarer toutes les heures travaillées, et qui, avec
l’abandon du salaire journalier de référence, prévoit des montants
d’indemnisation proportionnels à la fois à la rémunération et à la durée du
travail effectué et déclaré, de manière à ce qu’un artiste et un
technicien ait toujours intérêt à choisir de travailler et à déclarer tout
son travail plutôt que d’être indemnisé par l’assurance chômage. Ce
n’était le cas ni dans le système de 2003 – ni dans les systèmes qui l’ont
précédé. Et c’est un système équitable, au sens où deux salariés placés
dans des situations comparables de durée de travail et de rémunération
auront un niveau d’indemnisation comparable. Ce n’était pas le cas avant.
La nouvelle formule de calcul est aussi plus juste, et corrige des défauts
du système antérieur : elle améliore le niveau d’indemnisation de ceux
dont les revenus sont les plus faibles et limite le niveau
d’indemnisation de ceux qui tirent déjà de leur travail des revenus
très substantiels. Dans un système d’intermittence, les allocations de
chômage ne doivent pas être un revenu de complément pour des salaires
déjà élevés. Permettez-moi d’insister sur ce point, car il s’agit d’un aspect
essentiel pour la politique de l’emploi – c’est bien la clef de voûte d’un
nouveau système, bien plus encore que tous les curseurs et seuils, qui
peuvent parfois prendre valeur de slogan !
Avec le système de décalage retenu, le nouveau protocole encourage les
employeurs comme les salariés, lorsqu’ils en ont la possibilité, à choisir
des contrats plus longs, voire, pour un travail permanent, un contrat
à durée indéterminée plutôt que de recourir à l’intermittence. Il
concourt ainsi à faire jouer à l’assurance chômage son rôle de revenu de
remplacement et non plus de revenu de complément.
Le protocole du 18 avril prévoit enfin d’importantes améliorations de
protection sociale par rapport au protocole de 2003 : la prise en compte
consolidée des congés de maternité ou d’adoption, la prise en compte
nouvelle des congés liés aux accidents du travail ; la garantie du
maintien de leurs allocations jusqu’à l’âge de la retraite pour les
artistes et techniciens qui ont dépassé 60 ans et demi.
Au-delà du point d’équilibre auquel sont parvenus les partenaires sociaux,
le Premier Ministre a indiqué, le 12 décembre dernier, que l'Etat
prendrait, lui aussi, ses responsabilités, et que, dès lors qu’il existera
un accord, la création d’un Fonds permanent de professionnalisation
et de solidarité pour les artistes et les techniciens manifestera que la
solidarité nationale prend le relais de la solidarité
interprofessionnelle.
L’Etat prendra donc sa part, aux côtés des partenaires sociaux, pour
construire un système pérenne et équitable de protection sociale et
professionnelle pour le soutien à l’emploi des artistes et des
techniciens du spectacle.
On peut débattre, et c’est légitime, de ce qui relève de la solidarité
interprofessionnelle et de ce qui relève de la solidarité nationale, de ce qui
relève des interventions publiques ou des conventions collectives. Au
total, c’est l’appréciation qui sera portée sur l’ensemble qui importe.
C’est
sur l’ensemble qui sera constitué par l’accord d’assurance chômage
– s’il recueille les signatures nécessaires – et le Fonds mis en place par
l’Etat que je revendique que soit jugé le système pérenne et
équitable auquel je me suis engagé au nom du Gouvernement.
Au terme de la concertation qui a été menée, ces derniers jours, avec les
partenaires sociaux, je confirme que l’intervention de l’Etat vient renforcer
la protection assurée par le régime d’assurance chômage et s’articule
avec lui. En aucun cas elle n’aboutit, comme la crainte en est parfois
exprimée, à ce que la solidarité nationale se substitue à la solidarité
interprofessionnelle. Et elle respecte les prérogatives et les
responsabilités qui sont celles des partenaires sociaux dans la définition
d’un régime paritaire – spécifique – d’assurance chômage.
Le Fonds exercera six missions principales, sans aucun empiètement
sur le rôle des organismes sociaux et professionnels actuellement en
place dans le secteur.
1. Le Fonds apportera un soutien financier lorsque les artistes et
techniciens arrivent au terme de leurs droits à indemnisation et qu’ils
ne peuvent pas bénéficier de l’allocation spécifique de solidarité.
Cette allocation de fin de droits, d’un montant de 30 – par jour, sera versée
selon une durée modulable en fonction de l’ancienneté des artistes et des
techniciens dans le régime d’assurance chômage : 2 mois pour ceux qui
ont moins de 5 ans d’ancienneté ; 3 mois pour ceux qui ont entre 5 et 10
ans d’ancienneté ; 6 mois pour ceux qui ont plus de 10 ans d’ancienneté.
Cette allocation sera versée une fois dès lors qu’il s’agit de professionnels
qui ont effectué 507 heures dans les 12 derniers mois.
Ainsi sera remplie une des fonctions essentielles de la « date
anniversaire », qui correspond à une des demandes principales des
artistes et des techniciens, à savoir une protection pour tous les artistes et
les techniciens, quelle que soit leur ancienneté dans le régime, d’une
durée, au minimum, d’une année entière, en combinant le temps consacré
à leur activité professionnelle, la durée d’indemnisation (243 jours) et
l’allocation de fin de droits.
C’est un niveau de protection qui marque une valeur ajoutée spécifique de
la solidarité nationale par rapport à la solidarité interprofessionnelle – et
supérieur à tout ce qui a existé avant 2003.
2. Le Fonds assurera une mission d’action sociale
Pour les artistes et techniciens atteints par des maladies remboursées à
100 % par l’Assurance Maladie, le Fonds prendra en charge le coût
correspondant à l’assimilation des périodes de congé de maladie à des
périodes d’activité à raison de 5 heures par jour pour le calcul des heures
ouvrant droit au régime spécifique d’assurance chômage.
Plus généralement, pour les artistes et techniciens qui ne sont pas
couverts par les dispositifs d’action sociale de leur caisse de retraite et qui
ne bénéficient pas d’autres dispositifs d’action sociale, le fonds pourra
assurer, au cas par cas, des aides ponctuelles d’urgence et des secours
individuels prolongés qui permettent de répondre aux situations de grave
détresse ou de risque de désocialisation du demandeur. Les décisions en
la matière devront être prises de manière collégiale et transparente
3. Le Fonds encouragera à dispenser des formations (éducation artistique
et formation professionnelle)
Vous savez tout l’attachement qui est celui du Gouvernement à
développer l’éducation artistique, à encourager les artistes à intervenir
dans les écoles, les établissements scolaires et universitaires. Je
considère, je l’ai dit, que la transmission fait partie intégrante des métiers
des artistes et des techniciens.
Pour encourager les artistes et les techniciens qui le souhaitent à
transmettre leur savoir, leur savoir-faire et leur expérience, le Fonds
prendra en charge le coût correspondant à l’intégration, dans le calcul des
heures ouvrant droit au régime spécifique d’assurance chômage, des
heures de formation dispensées dans un certain nombre de structures
agréées à hauteur de 120 heures par an, comme cela avait été prévu
dans le Fonds transitoire, en complément des dispositions prévues par le
protocole d’accord du 18 avril 2006.
4. Le Fonds soutiendra les actions d’aide à la pérennisation des emplois
En accompagnement des expérimentations lancées par l’Etat, avec le
concours de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de
travail (ANACT), en matière d’aide à la structuration du secteur, et dans la
perspective de leur généralisation, le Fonds pourra apporter un soutien
financier aux structures en vue de l’aide à la pérennisation des emplois,
soit directement, soit par une démarche de mutualisation.
L’UNEDIC pourra être associée à cet effort en signant des conventions
d’aides actives à la création d’emplois permanents.
5. Le Fonds permettra de détecter les artistes et techniciens en situation de
vulnérabilité professionnelle et, sur la base du volontariat de leur part,
de leur proposer un soutien professionnel adapté.
Sur la base des données recueillies par Audiens (le groupe de
prévoyance du secteur), pourront être détectés, de manière systématique
et exhaustive, les artistes et techniciens qui, dans les cinq dernières
années, sans que ce soit obligatoirement le signe d’une fragilité
professionnelle de leur part, sont sortis au moins une fois du régime
d’assurance-chômage, ont eu un volume d’activité qui reste durablement
fixé autour du seuil minimum d’affiliation ou qui perçoivent des revenus
durablement faibles de leur activité.
En complément de la mise en oeuvre de l’accompagnement personnalisé
prévu par le protocole d’accord du 18 avril 2006, grâce à une coopération
étroite avec le réseau ANPE spectacle, l’AFDAS (organisme de formation
du secteur) ou l’AFPA, ces personnes, si elles répondent volontairement à
l’invitation qui leur sera faite à un entretien, pourront se voir proposer un
soutien en terme d’appui professionnel, de formation dans le secteur ou
de formation en vue d’une aide à la reconversion.
Cette démarche pourra être renouvelée tous les cinq ans et apportera
ainsi aux artistes et techniciens un suivi de leur carrière sur la durée.
Ce repérage systématique n’est pas exclusif de démarches individuelles
volontaires d’artistes ou de techniciens qui voudraient bénéficier d’un
soutien professionnel adapté.
De manière plus spécifique, mais également systématique, un
accueil sera prévu pour les femmes enceintes, pour les informer très
précisément de tous les droits qui leur sont ouverts – et que, bien
souvent, au-delà de ceux dont elles sont informées par leur caisse
primaire d’assurance maladie ou leur caisse d’allocations familiales,
elles ne connaissent pas – et pour les aider à préparer leur reprise
d’emploi, au terme de leur congé de maternité.
6. Le Fonds accompagnera la mise en oeuvre progressive de l’accord.
Pour tenir compte des premiers effets attendus des conventions
collectives, il prendra en charge au plus tard jusqu’à la fin de l’année
2007, le coût de l’indemnisation des artistes et des techniciens qui
ne remplissent pas les conditions de réadmission dans les annexes
mais qui réalisent 507 heures sur 12 mois.
Par rapport à la situation de 2005, où, grâce au Fonds transitoire, les
artistes et les techniciens pouvaient bénéficier des annexes dès lors
qu’ils avaient effectué 507 heures sur 12 mois, le protocole du 18
avril reprend les conditions d’entrée plus exigeantes fixées par le
protocole de 2003.
Les nouveaux seuils d’affiliation prévus pourront très certainement
être atteints, comme le montre l’analyse fine des premiers chiffres
disponibles du Fonds transitoire, au terme d’une période
d’adaptation et par l’effet des conventions collectives en cours de
négociation.
Pour aider les professionnels à s’adapter aux nouvelles conditions
de réadmission, le Fonds comprendra, en accompagnement des
dispositions transitoires déjà prévues par les partenaires sociaux
dans le protocole du 18 avril, des mesures qui permettront aux
artistes et aux techniciens de conserver, jusqu’aux premiers effets
des conventions collectives, au plus tard jusqu’au 31 décembre
2007, un seuil de 507 heures sur 12 mois pour bénéficier de
l’indemnisation correspondant aux annexes 8 et 10 – et d’avoir ainsi,
pendant cette période, des conditions d’indemnisation plus
favorables que celles qui sont prévues avec l’allocation de fin de
droits.
C’est le signe de la confiance que le Gouvernement place dans le
bon aboutissement des conventions collectives, sur lesquelles
Gérard Larcher interviendra dans un instant, pour structurer l’activité
dans le secteur. C’est aussi le signe de la détermination avec
laquelle nous entendons accompagner la négociation de ces
conventions !
Tirant les enseignements du fonctionnement du Fonds transitoire en
2005 (plus des trois quarts des artistes et des techniciens ont
bénéficié de l’allocation du Fonds transitoire pour une durée de
moins de 3 mois, pour un montant moyen d’allocation journalière de
45 euros), les mesures transitoires du Fonds prévoient un
plafonnement de l’allocation à 45 euros par jour, et une limitation de
durée de 3 mois. Il s’agit de concentrer l’aide de la solidarité
nationale sur les artistes et les techniciens qui sont placés dans les
situations d’activité ou de revenu les plus fragiles.
Telles sont les fonctions que le Fonds de professionnalisation et de
solidarité assurera pour les artistes et les techniciens du spectacle. Elles
feront l’objet, en fonction de la nature des prestations, de conventions de
délégation de gestion passées avec l’UNEDIC et avec Audiens, le Groupe
de prévoyance du secteur du spectacle.
Un comité d’orientation associera, aux côtés de l’Etat, les partenaires
sociaux du secteur. Il sera consulté sur les missions de
professionnalisation et jouera un rôle de suivi et de conseil. Un bilan
périodique des actions lui sera présenté, et un rapport d’activité du Fonds
sera présenté, en fin d’exercice, au Conseil national des professions du
spectacle.
Telle est, Mesdames et Messieurs, l’économie générale d’un système
pérenne et équitable de soutien à l’emploi, de protection sociale et
professionnelle pour les artistes et les techniciens du spectacle, où
l’assurance chômage joue pleinement son rôle, mais seulement son rôle –
et non plus, comme cela a été trop longtemps le cas, celui de financeur
indu et de régulateur quasi exclusif du secteur !
J’ai demandé à Jean-Paul Guillot d’établir, à partir de quelques situationstypes
d’artistes ou de techniciens, une comparaison du niveau de
protection assuré par le nouveau système par rapport aux systèmes
antérieurs, de manière à ce que chacun puisse objectivement apprécier
son effet concret sur la situation des artistes et des techniciens – dont je
sais bien qu’elle demeurera difficile et incertaine ! Ce document vous sera
remis en annexe du texte de nos interventions, avant d’être mis en ligne
sur le site du Ministère.
C’est l’exemple des informations concrètes qui devront figurer sur le site
du Fonds de professionnalisation et de solidarité, qui devra constituer, en
liaison avec tous les autres sites (de l’UNEDIC, des organismes sociaux
du spectacle, des différentes institutions et ministères) un portail
professionnel pour les artistes et les techniciens.
Au-delà des informations, les améliorations concrètes et très attendues à
apporter dans le fonctionnement des systèmes informatiques et la
constitution des dossiers par les ASSEDIC, devraient faciliter l’accès des
artistes et des techniciens aux prestations auxquelles ils ont droit.
Est-ce à dire que le nouveau système est parfait ? Evidemment non ! Il
devra être amélioré, aménagé, au fur et à mesure que seront conclues les
conventions collectives et qu’elles produiront leurs effets, au fur et à
mesure que le renforcement des contrôles dissuadera les abus qui ont
trop longtemps marqué le secteur – et qui sont encore loin d’avoir disparu.
Je vais, dans un bref instant, laisser la parole à Gérard Larcher qui vous
décrira l’engagement de son département ministériel sur ces deux sujets.
Mais au moins, ce nouveau système reposera sur des bases saines. Et il
a, à mes yeux, quels que soient ses défauts ou ses imperfections,
l’incomparable mérite d’être le fruit de la négociation entre les partenaires
sociaux interprofessionnels, de leur volonté de maintenir au sein de la
solidarité interprofessionnelle un régime spécifique d’assurance chômage
pour les artistes et les techniciens du spectacle et d’assurer, à leurs côtés,
l’engagement durable et déterminé de l’Etat. Et ce mérite-là lui donne une
supériorité absolue sur toute autre solution !
Ma conviction est que, sur la base du protocole du 18 avril, s’il est signé et
renforcé par le Fonds de professionnalisation et de solidarité, il est
possible de bâtir le système équitable et pérenne que nous appelons tous
de nos voeux sans recourir à la loi, et de le rendre effectivement
opérationnel dans des délais et dans une sécurité juridique qu’une
démarche législative ne permettrait pas de garantir.
On ne va pas nous reprocher, maintenant, de préférer le respect dû au
dialogue et à la responsabilité des partenaires sociaux à une démarche
législative qui consisterait à se substituer à eux – et dont les résultats
concrets seraient incertains et tardifs et, pour tout dire, aventureux, car
aucune loi ne pourra définir tout le contenu d’une négociation conduite par
les partenaires sociaux !
Plutôt qu’à une loi, je préfère que nous consacrions, tous ensemble, notre
énergie à la construction d’une politique de l’emploi dans le secteur du
spectacle, à la négociation des conventions collectives, à la vigilance
quant à leur application. Je souhaite que la mobilisation exceptionnelle
des parlementaires, que je voudrais une nouvelle fois saluer, encourage
l’Etat comme les collectivités territoriales, qui ont des responsabilités
essentielles en la matière, à jouer pleinement leur rôle, ainsi que le
rapport d’Alain Auclaire nous y a invités.
Il y a, en effet, et je ne veux pas manquer de le rappeler en terminant, au delà
de l’assurance chômage, tant d’actions à conduire pour organiser
l’activité dans le secteur du spectacle !
Le plan pour l’emploi dans le spectacle vivant, qui se décline dans
chaque région ; les crédits d’impôt pour le cinéma et l’audiovisuel, qui
ont permis la relocalisation des productions et une augmentation, en
2005, de 35 % du nombre de semaines de tournage sur notre territoire ;
demain, j’espère, les crédits d’impôt pour l’édition phonographique et le jeu vidéo, ce sont des volets aussi importants que l’assurance
chômage pour la construction d’un système pérenne de soutien à l’emploi.
La négociation des conventions collectives, la lutte contre les abus, un
cadre juridique mieux adapté pour les pratiques amateurs, qui doivent
être encouragées, mais qui ne doivent pas constituer, en particulier dans
le secteur musical, une concurrence déloyale pour les professionnels, la
régularisation engagée du recours à l’intermittence ou aux contrats
précaires dans l’audiovisuel public, qui devra se traduire dans le
« volet emploi » des contrats d’objectifs et de moyens que l’Etat va passer
avec chaque société du secteur public de l’audiovisuel, ce sont de grands
chantiers, essentiels, pour lesquels toute notre énergie commune doit être
mobilisée.
Je veux vous dire, enfin, combien je sais pouvoir compter sur le Conseil
national des professions du spectacle, dont j’ai pu apprécier le soutien,
tout au long des deux années écoulées, pour accompagner la mise en
oeuvre d’un système pérenne et équitable de soutien à l’emploi dans le
secteur du spectacle – et vous en exprimer, par avance, toute ma
reconnaissance.
Soyez assurés que vous pouvez, aussi, en retour, pleinement compter sur
notre engagement et notre détermination.
Je vous remercie.