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L’hymne au genre humain d’Aimé Césaire est chanté avec fureur et beauté

Un poète héros, un homme rare, une voix brûlante, une passion incandescente, une vie d’engagement absolu…

Rien ne peut justement retracer la force sublime de l’uvre, des combats, des mobilisations politiques et spirituelles de ce rebelle, dont le cri révolté avait la vigueur intacte de la jeunesse, éternellement assoiffée de justice, de liberté, d’égalité fraternelle.

En cet instant, chacun doit se vivre ultra – marin, noir, esclave, opprimé, damné, afin de faire silence et de porter en hommage ultime les violences et les fureurs du monde en s’engageant à les traquer.

Je garde comme un ardent souvenir l’entretien que j’avais eu le 23 septembre 2006 à Fort de France avec Aimé Césaire, heureux de célébrer le combat que j’avais mené pour la reconnaissance par l’Unesco de la diversité culturelle, érigée en principe de droit international.

Sa dédicace résonne aujourd’hui comme une feuille de route pour respecter par l’action cet homme immense :

« A Donnedieu de Vabres
ce recueil de textes
qui disent à leur manière
mon itinéraire
du particulier
à l’universalité
bref la conquête
de l’homme par
lui-même.
Pour dire au ministre D de Vabres
ma reconnaissance
et si j’ose dire
notre fraternité »
Aimé Césaire

Accompagné de Jacques Martial, un moment rare reste dans mon cur : le regard doux et chaleureux de ce très vieux Monsieur contemplant avec étonnement et admiration le Président de la Villette déclamer avec fougue et foi un extrait des Cahiers du retour au Pays natal.

Eternité des mots, permanence salutaire de l’esprit de révolte, génie poétique pour susciter l’amour du genre humain.

Pour reprendre son chemin, et y puiser de l’énergie créatrice, écoutons comme un hymne fécond cette voix éternelle :

« Partir.
Comme il y a des hommes – hyènes et des hommes –
panthères, je serais un homme – juif
un homme – cafre
un homme – hindou – de – Calcutta
un homme – de – Harlem – qui – ne – vote – pas

l’homme – famine, l’homme- insulte, l’homme – torture
on pouvait à n’importe quel moment le saisir le
rouer
de coups, le tuer – parfaitement le tuer – Sans avoir
de compte à rendre à personne sans avoir d’excuses
à présenter à personne

un homme – juif
un homme – pogrom
un chiot
un mendigot

mais est-ce qu’on tue le Remords. beau comme la
face de stupeur d’une dame anglaise qui trouverait
dans sa soupière un crâne de Hottentot ?

Je retrouverais le secret des grandes communications et des grandes combustions. Je dirais orage. Je dirais fleuve. Je dirais tornade. Je dirais famille. Je dirais arbre. Je serais mouillé de toutes les pluies, humecté de toutes les rosées.

Je roulerais comme du sang frénétique sur le courant lent de l’il des mots en chevaux fous en enfants frais en caillots en couvre-feu en vestige de temple en pierres précieuses assez loin pour décourager les mineurs. Qui ne me comprendrait pas ne comprendrait pas davantage le rugissement du tigre. »

Cahiers du retour au Pays natal

3 Réponses à “L’hymne au genre humain d’Aimé Césaire est chanté avec fureur et beauté”

  1. Aurore a écrit:

    Aimé Césaire : tout en lui était plus que beau, plus que bon et faisait de lui un grand humaniste. Il voyait avec son coeur, il entendait et il parlait aussi avec son coeur. Sa sensibilité était si grande, qu’il pouvait sentir la nature vibrer autour de lui,car il semblait être en contact permanent avec l’univers, comme un Dieu…Tout en lui n’était qu’amour, amour de ce que la nature lui a donné chaque jour : la vie, simplement, naturellement, passionnément, telle qu’elle était, et dans laquelle il puisait ses ressources qui l’enmenaient survoler le monde, pour le rendre meilleur, en le forçant d’une caresse poétique, à prendre conscience que chaque élément fait partie d’un tout qui s’appelle : la vie…
    Aimé Césaire portait très bien son prénom. Aimé : si tous les humains en connaissaient véritablement le sens comme Aimé Césaire, la nature humaine serait bien plus belle. « On ne respecte que ceux que l’on aime ».

  2. FANDERENAUDFANDESDIX a écrit:

    Ils sont tout à fait mérités, ces hommages rendus à ce grand Monsieur et tout ce qu’il représentait! Certes célèbre de son vivant, un tel français ilustre aujourd’hui disparu a sa place au Panthéon.

  3. Aristote a écrit:

    « Une civilisation qui s’avère incapable de résoudre les problèmes que suscite son fonctionnement est une civilisation décadente »

    Aimé Césaire.

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