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Remise des insignes de Chevalier dans l'ordre national de la Légion d'honneur à Patrick Raynaud

Cher Patrick Raynaud,

C’est un très grand plaisir d’honorer ce soir l’artiste aux multiples
facettes que vous êtes, mais aussi l’enseignant, toujours attaché
à la transmission de son savoir, de son savoir-faire et à faire
éclore de nouveaux talents, et le directeur de la prestigieuse
Ecole de la rue d’Ulm, l’Ecole nationale supérieure des arts
décoratifs, où vous avez été nommé il y a trois ans, et dont j’ai
inauguré, le 24 novembre dernier, les nouveaux locaux, sur son
site historique.

Vous avez vu le jour en 1946 à Carcassonne, et pendant 20 ans,
vous resterez fidèle à cette belle région (dont vous gardez une
petite pointe d’accent). C’est à la Faculté de lettres de Toulouse
que vous faites vos études, avant de « monter à Paris » pour
intégrer l’IDHEC (institut des hautes études cinématographiques),
devenu depuis la FEMIS.

Votre diplôme en poche, vous entrez naturellement dans le
monde du cinéma, en devenant, dès 1970, assistant, monteur,
monteur-son, puis chef monteur, auprès notamment de Serge
Leroy, pour Le Ciel est bleu, Jacques Tati pour Trafic et de Jean-
Pierre Melville pour Un flic, tout en vous consacrant à des travaux
graphiques. Vous réalisez notamment des mises en pages de
livres et des couvertures de revues.

En 1973, vous rencontrez Sonia Delaunay. Vous lui apportez
votre assistance pour plusieurs de ses réalisations plastiques.

Vous réalisez ainsi les costumes de la pièce de Pirandello Dix
personnages en quête d’auteur présentée à la Comédie
Française, en 1978, et dont elle signe la scénographie.

Vous lui consacrez également un court métrage, intitulé Prises
de vue pour une monographie et un livre Nous irons jusqu’au
soleil publié chez Robert Laffont en 1974 ; et la même année,
vous réalisez un moyen métrage sur l’oeuvre de Robert Delaunay.

Pendant cette période, votre pratique personnelle évolue et vous
vous révélez artiste-plasticien à part entière.

C’est en 1977 que le galeriste parisien Harry Jancovici organise
votre première exposition. Elle sera suivie de beaucoup
d’autres : plus de deux cents expositions personnelles,
notamment à la fondation Gulbenkian à Lisbonne, au musée des
Beaux-Arts de Rennes, au musée Ludwig d’Aix-la-Chapelle, au
musée national d’art moderne de Vienne, à la galerie Brigitte
March à Stuttgart et au musée de Tel Aviv ; et vous avez
participé à plus de trois cents expositions de groupe, en Europe,
en Amérique et en Asie.

A vos talents graphiques et cinématographiques vous ajoutez la
photographie, la sculpture, le ready-made, et naturellement
l’installation.

Grâce à votre travail, vous sillonnez la planète et devenez un
véritable globe-trotter en quête de visions nouvelles.

Vous intervenez dans l’espace urbain, de manière durable ou
provisoire, notamment à Thiers avec Rivière sans retour en
1985, au Forum des Halles à Paris avec le Sonnet des voyelles,
à Tarbes avec Belvédère en 1997, et en Israël.

Vous réalisez la scénographie de nombreux ballets, par exemple
Dance Power à l’opéra national de Paris.

Votre générosité naturelle vous conduit à faire bénéficier
l’Association nationale des directeurs d’écoles d’art (ANDEA),
que vous présidez un temps, du réseau des liens professionnels
et amicaux que vous avez noués dans le monde entier avec de
très nombreuses personnalités culturelles, mais aussi les écoles
supérieures d’art de Nantes et de Cergy, que vous dirigez tour
à tour, en leur conférant un rayonnement sans précédent, avant
de prendre en 2002 la tête de l’Ecole nationale supérieure des
arts décoratifs, où vous avez su mener à bien la réforme dite
LMD (licence-master-doctorat) et saisir cette occasion pour
accentuer l’interdisciplinarité, le décloisonnement, que votre
propre parcours illustre, et qui sont plus nécessaires que jamais
aujourd’hui. Vous avez organisé, avec vos équipes, plusieurs
expositions qui mettent en valeur la diversité culturelle, artistique
et scientifique des talents qui s'y déploient.

Pierre Restany écrivait que vos objets « n’existent qu’en tant que
prétexte à occuper l’espace, ils n’ont pas de présent, mais une
immense présence. Ils échappent à la durée, ils existent hors du
temps ».

C’est bien à l’artiste, auteur d’oeuvres intelligentes et fortes que
je rends hommage ce soir, mais également à l’infatigable
pédagogue que vous êtes.

Cher Patrick Raynaud, au nom du Président de la République, et
en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous faisons
Chevalier dans l’Ordre National du Mérite.

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