Pour parler fort et juste, il faut savoir d’abord aimer l’autre. Chacun. La foule qui sait parfois se rassembler en célébrant sa diversité. C’est la clé pour entrer dans les esprits et les cœurs et se forger un destin.
Le peuple se méfie des démagogues et les disqualifiera au moment du vote, même s’il les écoute dans un premier réflexe avec une fugace délectation.
L’enjeu de 2017 est d’une gravité peut-être sans précédent pour notre pays. Aucun candidat à l’élection présidentielle ne saurait l’ignorer.
La haine ordinaire dans la rue semble parfois être devenue une réplique de légitime défense et de vengeance, tant les esprits ont été marqués par la renaissance de la violence barbare.
L’état d’urgence, qu’aucun principe républicain et humaniste ne saurait contrecarrer, est devenu permanent.
Il n’y a plus de symphonie gouvernementale, mais une sonate sécuritaire souvent inefficace, à la mesure des peurs qui ont galopé au sein du peuple français.
Qui, au-delà des fonctionnaires de l’État, des enseignants, de quelques artistes, des élus et des personnels municipaux, véritablement en première ligne c’est-à-dire « au front », va au contact des jeunes des quartiers pour tout à la fois leur tendre la main, leur parler avec conviction et exiger le respect de la loi, et ainsi éviter la contagion des dérives et le repli communautariste ? Qui ose encore parler de la diversité française comme chance ?
Les enjeux et les débats sur notre politique étrangère sont relégués à quelques cénacles d’esprits éclairés, dont certains savent résister à l’intimidation américaine, qui a obtenu une rupture de notre tradition diplomatique à partir de 2007. Il semble bien loin le temps où nous affirmions notre propre vision, libre et indépendante, parfois dérangeante, mais nécessaire comme un contrepoint fécond pour enrayer les escalades meurtrières, dont le vrai bilan est d’attiser les haines et les représailles sur notre sol. Comment ne pas penser ici à la clairvoyance du Président Chirac ?
Nous assistons médusés au chœur des surenchères racistes de certains de nos « grands » élus qui renient des siècles de fierté française en souhaitant interdire leur territoire à tout migrant. Ce faisant, ils déshonorent tout à la fois notre pays et l’action politique dans une même veulerie. Leurs calculs reflètent leur renoncement à se distinguer des plus abjects politiciens. L’électoralisme qui surfe avec les amalgames, en comptant encaisser le dividende par referendum, renforce la spirale du communautarisme qui devient alors un refuge.
Rares sont ceux, parmi les forces politiques ou spirituelles de notre pays, qui ont tracé le chemin escarpé de la fraternité agissante : si chaque commune, si chaque famille avait été incitée à agir concrètement, nous aurions pu éviter la multiplication des syndromes de « mini-Calais » qui sont aujourd’hui à l’œuvre. Cela nous autoriserait collectivement, avec la force de notre exemplarité, à nous insurger et à bannir ceux qui ont répandu la mort et la terreur en blasphémant au passage et la religion et la civilisation. Pour gagner la guerre contre les obscurantistes et les intégristes, ayons le courage de proclamer que nos valeurs humanistes sont nos meilleures armes. Ce n’est pas la posture du faible et du peureux, mais celle du conquérant, sûr que l’Histoire lui donnera raison. Ce n’est pas la stratégie du lâche, mais celle qui « frappe » plus efficacement qu’un avion de chasse à 10 000 mètres des populations civiles.
L’heure est naturellement aux grandes décisions, à certaines révisions « déchirantes ». En France, en Europe, dans le monde.
Nous n’attendons pas d’un futur chef d’État qu’il alimente les peurs et attise les feux déjà ravageurs.
Contrairement aux apparences trompeuses, les Français attendent qu’on leur parle vrai, qu’on les mobilise efficacement pour retrouver notre grand destin et affirmer aux yeux du monde notre fierté et la spécificité toujours rayonnante de notre modèle de société. Sachons célébrer avec panache les valeurs de notre civilisation au lieu d’en avoir honte et de les renier. Faisons respecter immeuble par immeuble, école par école, ville par ville, les lois de la République. Et faisons rimer autorité avec fraternité. Recentrons l’école sur sa mission fondamentale : le savoir pour l’égalité des chances. Donnons à la culture sa place stratégique .Les demi-mesures sont des leurres. L’action est urgente. Impérative. Pour réconcilier la nation avec elle-même.
Les coups de menton, les rodomontades irréalistes sont de véritables injures à l’intérêt général. Point n’est besoin de donner de la voix pour avoir la main ferme et juste.
Garantir la sécurité, rétablir l’autorité de l’État comme celle des enseignants, rappeler les familles à leurs responsabilités, libérer les énergies et les forces de création de richesses, respecter les diversités légitimes, tout cela suppose une forte volonté, pour briser les résistances et tous les conservatismes stériles. Pour enrayer l’engrenage de la peur.
Il va falloir oser. Dépasser les lignes jaunes habituelles. Périmer les vieilles recettes. Innover et revenir sur certaines erreurs passées. Avoir l’esprit de rassemblement et de réconciliation nationale. La laïcité n’est plus un concept suffisant, puisqu’elle est souvent vécue comme une discrimination. L’égalité absolue, sans aucune exception recevable, doit alors devenir l’uniforme de la fraternité. À l’école. Comme dans un service national et civique universel qu’il faut inventer de toute urgence. Et faire adopter par referendum, qui, dans ce cas, créera l’unité nationale…
Au lieu de ressentir avec amertume le déclin, de nous complaire dans une crise psychologique profonde aux relents de pré-guerre civile, passons à l’offensive. La France le mérite. Les Français l’exigent. Il se fait tard si nous voulons éviter la victoire des extrémistes. Ce n’est pas en leur ressemblant qu’on gagnera la bataille. Mais par l’action concrète, énergique et positive. Par l’affirmation de valeurs fortes. Repartons à la conquête de notre destin collectif ! Et choisissons la personnalité qui incarne dans une même énergie autorité et humanisme.