Rubrique ‘Journal 2002-2004’

Remise des insignes de Grand Officier dans l'Ordre National du Mérite à Yves Chauvin

7 octobre 2006

Cher Yves Chauvin,

Je suis très heureux, et très fier, de vous distinguer aujourd’hui, vous qui avez fait de la chimie un outil au service de l’homme, de la société, de l’environnement, vous qui avez offert à la recherche française un rayonnement extraordinaire, dans le monde entier, vous qui avez récemment reçu, avec la simplicité et la modestie que vos collègues et élèves ont tant admirées en travaillant à vos côtés, la récompense suprême, le Prix Nobel de chimie.

Après avoir obtenu votre diplôme d’ingénieur à l’Ecole Supérieure de Chimie industrielle de Lyon, et travaillé trois ans chez Progil Lyon, vous entrez à l’Institut Français du Pétrole, à Rueil-Malmaison, où vous mènerez votre brillante carrière, pendant trente-cinq ans, au Laboratoire de catalyse moléculaire dont vous avez la responsabilité. Le nombre impressionnant de brevets que vous déposez au long de ce parcours témoigne de votre activité débordante, passionnée, de votre curiosité et de votre ouverture d’esprit qui vous mettent à la pointe de la recherche, chaque fois que des développements nouveaux voient le jour.

Je tiens tout de suite à vous rassurer, et à rassurer le public, je ne me lancerai pas dans la description des arcanes de la découverte, le mécanisme de la métathèse des oléfines, qui vous a valu l’honneur du Prix Nobel, parce qu’elle risquerait de heurter cette modestie qui vous caractérise. C’est là, bien entendu, la seule raison qui m’oblige à passer sous silence la complexité des travaux que vous avez menés pour y aboutir, dans le domaine de la catalyse homogène, et plus particulièrement de la catalyse par les métaux de transition appliquée à la chimie des hydrocarbures.

J’en retiendrai le contexte, un dimanche pluvieux propice à la réflexion, où vous avez conçu le lien, jeté une passerelle, un « pont créatif » entre deux domaines de la chimie, et établi les bases théoriques de la métathèse. J’en retiendrai également les conséquences, essentielles. Pour l’environnement, tout d’abord, puisque vous avez développé une chimie « verte », moins coûteuse en énergie, moins toxique, respectueuse de l’homme et de la nature. Pour notre pays, ensuite, puisque vos travaux ont permis l’émergence d’une école française de la catalyse homogène, de réputation mondiale.

Vous avez véritablement ouvert la voie, dans la lignée des illustres pionniers, des découvreurs de votre science – qui est sans doute aussi l’une des plus belles aventures humaines – sur les pas d’Aristote, de Bacon, de Boyle, de Lavoisier, de Dalton, et de Berthelot.

Vous avez prouvé que la chimie, non seulement crée et invente, mais comme l’a écrit Jean-Marie Lehn, « forge la clé qui ouvre la porte aux merveilles ».

Dans cette voie se sont engouffrés vos deux collègues américains, Robert Grubbs et Richard Shrock, qui ont reçu le Prix Nobel avec vous, et de nombreux autres chercheurs s’inspireront de vos découvertes pour faire avancer à leur tour le progrès humain.

Oui, la science et la marche en avant de lhumanité sont à lévidence même indissociables. Nous sommes engagés aujourdhui dans une compétition mondiale pour la suprématie scientifique et technologique. Notre croissance, nos emplois, notre rang dépendent de notre capacité à affronter cette compétition.

Le Président de la République l’a rappelé tout récemment, lors de l’installation du Haut Conseil de la science et de la technologie : « pour la France et pour lEurope, investir dans la science est, en vérité, une question de survie. Face aux grands pays développés, face aux géants en devenir, face aux menaces environnementales ou sanitaires, face à la fin programmée des énergies fossiles, notre avenir passe par le choix de lintelligence, de limagination et de laudace. »

Oui, la science, la recherche et linnovation sont des priorités nationales.

Vous êtes un modèle, une figure tutélaire pour tous les étudiants, pour tous les jeunes chercheurs qui marchent dans vos pas, et ils sont nombreux, dans notre ville de Tours, qui s’honore que vous l’ayez choisie pour une retraite amplement méritée.

Cher Yves Chauvin, au nom du Président de la République, et en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous élevons à la dignité de Grand Officier dans l’ordre national du Mérite.

ESPACE JEAN CARMET DE BOURGUEIL

6 octobre 2006

Madame la Présidente, chère Danièle Delorme,

Monsieur le Député, cher Philippe Briand,

Mesdames, Messieurs,

Chers Amis,

Je suis très heureux de vous retrouver aujourd’hui dans cette maison, chargée du souvenir de Jean Carmet, « l’ami Jean », l’enfant du pays, né à Tours, fils d’un bourrelier-sellier de Bourgueil, qui a grandi au cœur de cette belle cité, accrochée aux coteaux du Val-de-Loire. De ses précieux vignobles, les moines bénédictins de l’abbaye firent jaillir un nectar, dont ils savaient faire apprécier l’arôme et le bouquet à tous leurs visiteurs, et parmi eux certains de nos plus grands poètes.

Chargée de souvenirs, d’émotions et d’histoire, en effet, cette maison a déjà traversé six siècles. Peut-être a-t-elle entendu Rabelais célébrer en ces lieux la Dive Bouteille, et rêver à installer son utopie thélèmite au sein de l’abbaye de Bourgueil ?

A moins qu’elle n’ait vu Ronsard, inspiré par sa « Belle, gentille, honnête et douce Marie », qu’il surnomma « le Pin de Bourgueil », et les arômes enchanteurs de ces vignobles, chanter « Bacchus et Amour » :

« Versons ces roses près de ce vin

Près de ce vin versons ces roses

Et buvons à l’autre afin

Qu’au cœur nos tristesses encloses

Prennent en buvant quelque fin. »

Oui, ces murs, s’ils pouvaient nous parler, nous livreraient des siècles d’histoire de Bourgueil, et nous raconteraient l’enfance de l’un de nos plus grands acteurs, qui a marqué plus de deux cents films de sa cocasserie toute rabelaisienne, des Enfants du paradis de Marcel Carné, à Germinal, de Claude Berri, en passant par les films cultes de Michel Audiard. Jean Carmet a tourné avec tant de réalisateurs illustres, et parmi eux Claude Sautet, Jean Renoir, Henri Verneuil, Jean-Pierre Mocky, Claude Chabrol, Volker Schlöndorff, Jean-Marie Poiré, Francis Veber. Il savait nous faire rire, nous émouvoir, en transmettant toute son humanité à ses personnages, même les plus noirs. Il a incarné tous les rôles, et conquis le cœur de tous les Français.

Jean Carmet a tourné dans de nombreux films d’Yves Robert, dont je tiens aussi à honorer la mémoire aujourd’hui, en votre présence, chère Danièle Delorme, qui avez été sa compagne, son épouse, sa muse. Vous avez voué votre vie au septième art. Actrice de très grand talent, vous avez tourné avec les plus grands, et notamment Henri-Georges Clouzot, Jacques Demy, Claude Lelouch, Agnès Varda. Inoubliable femme trahie dans Un éléphant ça trompe énormément, d’Yves Robert, vous avez fondé avec lui une maison de production, et vous avez présidé la commission d’avance sur recettes.

Le talent multiple de Jean Carmet n’avait d’égal que sa grande connaissance et son amour des crus de son pays. Je suis donc très heureux que cette Maison, dédiée aux vins depuis 1992, permette à ses visiteurs, professionnels, touristes, comme amateurs, d’apprécier, grâce à sa salle de dégustation professionnelle aux normes INAO (Institut national des appellations d’origine), les divins produits des vignobles de ses différents terroirs, perpétuant la tradition séculaire des moines bénédictins. Étape prisée sur la route touristique des vins du Val-de-Loire, Bourgueil s’apprête à devenir également le lieu de mémoire de l’un des plus grands acteurs français.

Nous ouvrons en effet aujourd’hui une nouvelle page dans l’histoire de la Maison des vins. L’Espace Jean Carmet accueille aujourd’hui, dans la maison qui l’a vu grandir, des souvenirs de cet immense artiste. C’est un très bel hommage, et une merveilleuse façon de faire découvrir ou redécouvrir sa carrière exceptionnelle, en mêlant les joies du palais et les plaisirs du septième art.

Je souhaite que tous les visiteurs de la Maison des vins retrouvent toute la richesse des émotions qu’a su nous faire ressentir Jean Carmet à l’écran.

La gastronomie, l’art culinaire, l’art de vivre font partie de notre culture, de notre attractivité, de notre patrimoine. Ce sont des atouts pour le tourisme et pour le rayonnement de notre région.

Et parce que notre patrimoine est notre richesse, notre bien le plus précieux, il est notre affaire à tous, représentants de l’Etat, élus, acteurs de la société civile, concitoyens. Sa vitalité est le fruit de l’addition des énergies de tous. J’appelle donc tous les habitants du pays de Bourgueil à enrichir l’Espace Jean Carmet en apportant leurs témoignages, leurs souvenirs, de « l’ami Jean », et je sais qu’ils sont nombreux, tant la chaleur, la gentillesse et la générosité de cet acteur hors du commun étaient immenses.

A TOURS UN ENGAGEMENT EXEMPLAIRE DE L’ETAT

30 septembre 2006
EN FAVEUR DE NOTRE PATRIMOINE


Notre patrimoine est notre richesse. C’est aussi un outil de développement touristique, économique, social et culturel, un facteur d’attractivité considérable pour notre pays et notre cité. L’Etat s’engage en France par un effort soutenu en engageant 140 millions d’euros (918 millions de francs) supplémentaires pour notre patrimoine public et privé.

À Tours et plus largement en Indre-et-Loire, le patrimoine monumental bénéficie de moyens budgétaires exceptionnels pour les travaux de rénovation. Sur les 24 millions d’euros (157 millions de francs) supplémentaires réservés au patrimoine régional, 1 460 M€ (9 577 M FF) seront consacrés à la cathédrale Saint-Gatien de Tours, 300 000 € (1 967 871 FF) au Château d’Azay-le-Rideau et 310 000 € (2 033 000 FF) à la Chapelle du Liget à Sennevières.

En 2005 et 2006, l’Etat et le Ministère de la Culture ont soutenu les expositions Bonnefoy et Buren, mais aussi l’acquisition d’un tableau de Lorenzo VENEZIANO par le versement d’une subvention de 100 000 € (655 957 FF).

DE L’ENSEIGNEMENT

L’éducation de notre jeunesse constitue clairement une priorité politique et financière du gouvernement.

A Tours, l’Etat apporte 340 000 € (2 230 254 FF) en faveur du programme de réussite éducative qui doit rendre réelle l’égalité des chances pour toute notre jeunesse.

Dans le cadre du plan 2000-2006 de mise en sécurité des locaux universitaires et conformément à ses engagements, l’Etat a versé à l’Université François Rabelais 7,31 M € (48 M FF), dont 3,471 M € en 2006 (22,8 M FF), pour la mise en conformité du bâtiment de chimie de l’Unité de Formation et de Recherche sciences et techniques, qui viennent compléter les travaux de réhabilitation des sites des Tanneurs, des Deux Lions et de la résidence universitaire à l’IUT.

DE L’INDUSTRIE

L’Etat entend aussi lutter contre les délocalisations des entreprises et redynamiser l’aménagement du territoire en créant des pôles de compétitivité. Le projet porté par ST MICROELECTRONICS impliquant plusieurs entreprises de notre région et l’Université de Tours a été retenu pour Tour (s) Plus, notre agglomération.


DU COMMERCE

Le commerce à Tours n’est pas oublié. Par l’intermédiaire du FISAC (Fonds pour soutenir le commerce, l’artisanat et les services) le gouvernement a apporté 135 000 € (886 000 FF) pour la première tranche des travaux de mise aux normes de notre pôle d’excellence des « métiers de bouche » que beaucoup nous envie : les Halles de Tours. Ces travaux (mise en sécurité complète du bâtiment, nouveau carrelage, accès facilité pour les personnes à mobilité réduite, mise en place d’un rafraîchisseur d’air et d’une VMC…) devraient s’achever cette année.


ET DE LA REHABILITATION DES LOGEMENTS

La politique de la ville dont le programme de rénovation urbaine est l’un des axes majeurs est bien sûr une priorité. C’est pourquoi le Gouvernement a créé l’ANRU qui soutient au nom de l’Etat les projets de rénovation portés par les collectivités locales. Ce programme vise à renforcer la mixité sociale et à assurer le développement durable des quartiers. Dans notre agglomération, l’Etat apporte plus de 17 millions d’euros (112 millions de francs) pour permettre sa réalisation dans les quartiers fragilisés de notre cité.

A la fin de cette année, au Sanitas le groupe scolaire Diderot et un immeuble de la rue de Luynes devraient être restructurés. Aux Fontaines, devrait être achevée la « résidentialisation » des espaces extérieurs. A Tours Nord aura débuté la construction de 31 logements à Monconseil, 8 au Beffroi et sera poursuivie la réhabilitation des logements de Chateaubriand.


Alors que Jean GERMAIN, Maire de Tours, justifie tous les projets « en panne » de notre ville par le refrain du « désengagement de l’Etat », l’opposition croit utile d’informer nos concitoyens de la réalité des sommes que le gouvernement a investies à Tours et dans l’agglomération.

Journée européenne des langues

26 septembre 2006

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Monsieur le Président du Centre Georges Pompidou, cher Bruno Racine,
Monsieur le Président du Forum des instituts culturels étrangers à Paris, Cher Giorgio Ferrara,
Mesdames et Messieurs les Directeurs d’instituts et de centres culturels étrangers à Paris,
Monsieur le Directeur de la Bibliothèque publique d’information,
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,

Je suis très heureux d’être présent parmi vous aujourd’hui pour célébrer la diversité culturelle, au cœur de cette Semaine des cultures étrangères, placée cette année sous le signe de la diversité linguistique et culturelle. Nous fêtons en effet aujourd’hui la Journée européenne des langues, instituée en 2001 par le Conseil de l’Europe.

Je tiens tout d’abord à vous remercier, Monsieur le Président, cher Bruno, d’accueillir cette manifestation au Centre Georges Pompidou ; je tiens également à vous exprimer, Monsieur le Directeur [Giorgio Ferrara, directeur de l’Institut culturel italien] – qui présidez le Forum des Instituts culturels étrangers à Paris (FICEP) – toute notre reconnaissance pour avoir associé à cet évènement les 33 établissements culturels étrangers présents dans notre capitale. La richesse des programmes qu’ils ont imaginés pour cette semaine dédiée aux « créateurs d’ailleurs », est exemplaire à mes yeux du rôle moteur qu’ils jouent dans notre vie culturelle.

Car c’est bien de la diversité culturelle et de son expression la plus parlante, la diversité linguistique, qu’il s’agit ce soir, et cette manifestation s’inscrit très directement dans la politique que je mène dans tous les secteurs de la vie culturelle pour défendre le droit des peuples à la valorisation de leur patrimoine, à la libre expression de leur culture et de leurs créations. Parce qu’au-delà de la France, bien au-delà même des frontières européennes, il s’agit d’une aspiration universelle.

C’est dans cet esprit que la France met tout en œuvre, autour du Président de la République et avec le Président de la Commission européenne, pour que la Convention internationale sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, adoptée le 20 octobre dernier à la quasi-unanimité de la communauté internationale, soit ratifiée avant la fin de l’année, et que les Etats membres et l’Union européenne fassent partie des trente premiers membres de l’Unesco qui détermineront son orientation, son interprétation et son application.

C’est au nom même des échanges dans un monde ouvert, auxquels nous croyons passionnément, que nous menons cette bataille. Une culture, en effet, n’est pas un composé stable ; ce n’est pas un élément chimiquement pur ; ce n’est rien d’autre que le dialogue singulier, et toujours réinventé, qu’elle entretient avec d’autres cultures. C’est en ce sens que, comme le disait André Malraux, « la culture ne s’hérite pas, elle se conquiert ». Autrement dit, elle est toujours devant nous, à construire, à créer. Et ce dialogue, dans un monde global, nous n’avons d’autre choix que de l’organiser, de le faire progresser ensemble.

La France l’a affirmé avec force, lors des Rencontres pour l’Europe de la culture, qui se sont tenues en mai 2005 à Paris. Elle le réaffirme avec force aujourd’hui, encore et toujours, en accueillant de nouveau des créateurs venus d’ailleurs, des écrivains, artistes, cinéastes, architectes, musiciens dhier ou daujourdhui que vos instituts nous invitent à découvrir ou à redécouvrir – célèbres ou méconnus, déjà classiques ou contemporains, chacun deux jouant un rôle de passeur emblématique vers sa langue et sa culture.

Comment être soi parmi les autres ? Comment préserver, sous la menace de l’uniformisation, une « esthétique du divers », pour reprendre la très belle expression de Victor Segalen ? Telle est l’exigence politique vitale qui est la nôtre aujourd’hui.

Elle vaut singulièrement pour les langues. « Le premier instrument du génie dun peuple, cest sa langue », disait Stendhal. Dans un monde "global", comment faire coexister les langues, comment éviter qu’elles ne renoncent à leur génie, à leurs capacités expressives, au profit d’une langue unique ? Comment préserver ce que les linguistes appellent leur « fonctionnalité » ? Au sein de la construction européenne, notamment, la reconnaissance de 20 langues officielles, et bientôt de 23, confère à cette question un caractère de brûlante actualité. Elle nous a conduits à esquisser les contours d’une politique européenne de la langue – qui n’est pas seulement une politique des langues européennes – afin d’organiser la coexistence des langues, en multipliant entre elles les échanges, les passerelles, les possibilités de conversion. Je me félicite que mon ami Ian Figel, le Commissaire européen chargé de l’Education, de la formation, de la culture et du multilinguisme, situe son action dans la même perspective. Pour faire avancer concrètement ces échanges, je souhaite que les chefs-d’œuvre de nos littératures soient traduits dans toutes les langues de l’Europe. Je souhaite également que les librairies européennes s’associent en un véritable réseau solide et efficace.

Notre politique tient en trois mots : comprendre, parler, traduire, et je suis heureux de constater qu’ils correspondent, symboliquement, aux trois espaces de démonstration proposés à l’occasion de cette Journée par la BPI.

Comprendre, d’abord. Je le dis souvent : être Européen, c’est s’exprimer dans sa langue et comprendre celle des autres ; et pour ma part, en situation de communication internationale, je m’exprime toujours en français, chaque fois que je le peux, en souhaitant que nos partenaires, et parfois nos compatriotes eux-mêmes, manifestent le même attachement à l’égard de leur langue. Mais, bien entendu, cette attitude n’est tenable que si je comprends la langue de mon interlocuteur et s’il comprend la mienne. A cet égard, nous n’avons sans doute pas encore tiré suffisamment partie des liens de parenté entre les langues – par exemple nordiques, germaniques, latines – et je suis de ceux qui croient profondément à l’avenir de nos solidarités latines, notamment, qui peuvent venir renforcer nos solidarités francophones et européennes. Il se trouve qu’il existe des pédagogies qui, prenant appui dans les premiers stades de l’apprentissage sur les similitudes entre les langues, conduisent progressivement à introduire, en les soulignant, les facteurs de différence. J’ai demandé à la délégation générale à la langue française et aux langues de France de prendre des initiatives pour promouvoir ces méthodes d’intercompréhension, à la lumière des travaux entrepris par les linguistes. La présentation qui nous en est faite à la BPI en est un premier témoignage, étant entendu, bien évidemment, que la simple compréhension d’une langue ne remplacera jamais sa pratique effective.

Parler, ensuite. L’enseignement des langues, dans notre société comme dans toutes les autres, est d’abord la responsabilité de l’école ; et de grands progrès ont été effectués récemment, dans le système éducatif français, avec la mise en application du cadre européen de référence, qui permet d’évaluer les compétences linguistiques de nos jeunes concitoyens et de leur fixer des objectifs d’apprentissage. La généralisation de l’apprentissage de deux langues en plus de la langue maternelle va dans le même sens.

Les progrès du numérique et les nouvelles techniques de communication peuvent contribuer à encourager cet apprentissage tout au long de la vie, au-delà du seul cadre scolaire, en permettant notamment l’auto-formation. Si nous nous retrouvons aujourd’hui à la BPI, c’est que le Centre Georges Pompidou a joué un rôle pionnier en la matière, en offrant au public la possibilité d’apprendre quelque 208 langues ! Sur ce modèle, les médiathèques placées sous l’autorité du ministère de la Culture et de la Communication ont été, elles aussi, incitées à s’équiper, il y a plusieurs années déjà, afin d’introduire l’apprentissage des langues comme une dimension essentielle de l’accès à la culture. Enfin, le « passeport pour les langues » que votre Forum, Monsieur le Directeur, offre au public parisien, en collaboration avec le ministère de la culture et de la communication, souligne l’apport inestimable des représentations culturelles étrangères, aux côtés de l’initiative privée et des efforts de l’Etat, pour inciter nos concitoyens à s’ouvrir au plurilinguisme.

Traduire, enfin. Sans traduction, il ny a pas de circulation de la pensée, des concepts, des informations, en Europe et dans le monde. La vraie langue de lEurope – et je dirais la seule langue commune sur la quelle nous puissions nous accorder – cest la traduction, comme le dit magnifiquement Umberto Eco.

La traduction est dabord une haute activité de lesprit, mais aussi un véritable métier qui a besoin dune qualification professionnelle, tant les concepts évoluent rapidement, et dune reconnaissance légitime. Aussi, je tiens à saluer en premier lieu ces femmes et ces hommes, les traducteurs, qui sont des passeurs de cultures et contribuent au progrès humain.

Avec le développement dInternet, la mondialisation des échanges et la mise en commun des savoirs, le volume dinformation circulant dans toutes les langues a beaucoup augmenté et nécessite aujourd’hui des technologies nouvelles. La traduction automatique, et plus généralement ce que lon nomme le traitement automatique des langues, sont des domaines de la recherche quil faut continuer à encourager en France. Ce sont également des secteurs industriels où nos entreprises sont très performantes et compétitives sur le marché mondial. Je suis heureux quun certain nombre dentre elles aient accepté de jouer le jeu lors de cette manifestation à la BPI, en mettant en valeur leur contribution à la diversité linguistique.

Je suis très heureux que le grand écrivain voyageur, le grand essayiste italien à l’âme vagabonde, Claudio Magris, qui nous a entraîné sur les rives du Danube, puis dans l’intimité de ses Microcosmes, en pensant si brillamment les liens entre l’altérité et l’identité, se joigne à nous aujourd’hui, pour éclairer notre réflexion sur le dialogue et la diversité des langues.

Cher Claudio Magris, vos analyses magistrales, je pense par exemple à celles de L’Anneau de Clarisse, qui prolongent les leçons que vous avez données au Collège de France, nous invitent à de passionnantes lectures ou relectures de monuments de la littérature européenne. A chaque page, vous nous montrez combien les créations de l’esprit humain permettent aux individus que nous sommes, dans leur multiplicité, de trouver des repères et des sens nouveaux, au sein de la grande et diverse « prose du monde ». Je sais combien vos étudiants, vos lecteurs, dans toutes les langues, vous sollicitent, et je tiens à vous dire combien nous sommes sensibles à votre présence parmi nous ce soir.

La diversité culturelle ne se divise pas, et la diversité linguistique en fait partie intégrante. Mieux encore : parce qu’une langue n’est jamais seulement un outil de communication, mais aussi un marqueur d’identité et un matériau de création, la diversité des langues dans le monde en est l’expression privilégiée. C’est au rappel de cette évidence, de cette exigence, que nous convie la Journée européenne des langues, et je me réjouis que vous soyez venus si nombreux ce soir à la BPI pour la célébrer.

Châteaux de la Loire cherchent mécènes américains pour restauration

23 septembre 2006

TOURS, 23 sept 2006 (AFP) – Patrimoine dune valeur inestimable mais dun entretien très coûteux, les châteaux de la Loire ont décidé de faire appel à des mécènes américains pour contribuer à la sauvegarde et à la mise en valeur de cet ensemble historique et artistique unique au monde.
 A linstar de Versailles, du Louvre et dautres monuments historiques français, le mécénat américain dotera les châteaux de la "Loire Valley" de moyens financiers nouveaux venant abonder les crédits publics et leurs ressources propres.
   "Cest une excellente idée", sest félicitée Mme Laure Ménier, propriétaire de Chenonceau. "Il existe vraiment une volonté commune, un grand enthousiasme, pour ce projet".
   Cette collaboration se concrétisera par la création dune association française composée des châteaux et dun organisme de droit américain, "The American friends of the Loire Châteaux".
   Les châteaux auront pour mission douvrir leurs portes aux mécènes américains appelés à recueillir outre-Atlantique des fonds privés. Les donateurs pourront profiter des avantages fiscaux importants quautorise la législation américaine.
   "Dici trois semaines, lassociation française sera créée", a annoncé samedi dernier le ministre de la Culture Renaud Donnedieu de Vabres, à lorigine du projet, à lissue dune première réunion de travail ayant rassemblé une trentaine de propriétaires ou de représentants de châteaux, grands et moins grands.
   "Nous souhaitons faire du mécénat actif: accueillir les Américains, organiser des repas, des concerts, et bénéficier de fonds pour la restauration, lentretien de nos monuments", précise Henry Carvallo, propriétaire de Villandry.
   "Tous les propriétaires publics et privés ressentent le besoin de fonds car un château historique est toujours une lourde charge", ajoute Mme Ménier.
   Les fonds récoltés ne serviront pas à alimenter une caisse commune mais à réaliser des projets précis sur tel ou tel site.
   "Linitiative est très intéressante", reconnaît Pierre Bizard, propriétaire du château de Champchevrier. "Mais il faut travailler ensemble. Les grands doivent parrainer les petits pour que leur notoriété bénéficient à tous".
   Pour Géraud De Lafond, propriétaire du Château de Gizeux, "cest une belle opportunité. Nous navons pas les moyens, le temps, le savoir-faire et le carnet dadresses pour toucher ces gens".
   "Il y a une crainte, minime mais légitime, celle de voir les mécènes se tourner dabord vers les grands sites", estime M. De Lafond. "A nous dêtre de vrais lieux daccueil et surtout de faire partager notre passion pour que les mécènes se plaisent et ne se sentent pas uniquement des financiers".
   Selon le ministre de la Culture, les premiers dossiers pourraient profiter "dans un délai de six mois" aux châteaux du Val de Loire qui attirent chaque année environ 45.000 visiteurs américains.

Jacques Martial à la présidence de la Villette

21 septembre 2006

Cette désignation intervient en vue de la nomination par le Président de la République de Jacques Martial à la présidence de l’établissement, sur proposition du conseil d’administration. Il remplacera à cette fonction Bernard Latarjet, atteint par la limite d’âge.

A travers son parcours professionnel et artistique dans le domaine du théâtre, du cinéma et de la télévision, Jacques Martial a fait la preuve des qualités de programmation, d’animation, et de pédagogie requises pour assurer la continuité des actions menées par l’établissement public du Parc et de la Grande Halle de la Villette, et pour développer de nouveaux projets qui contribueront à renforcer son identité et son attractivité.

Parmi ceux-ci, Jacques Martial souhaite donner une impulsion nouvelle à la « valorisation des cultures de la marge et de la périphérie », à la promotion d’un plus large métissage culturel dans la programmation de manifestations afin d’illustrer les multiples apports des migrations à notre pays. Il souhaite faire du parc de la Villette un lieu plus ouvert aux rencontres et aux débats notamment sur les questions relatives à la cohésion sociale et à la diversité culturelle. Pour Jacques Martial, « la Villette » doit devenir un espace de création et d’échanges dédié au « vouloir vivre ensemble ».

Renaud Donnedieu de Vabres souhaite remercier Bernard Latarjet pour l’immense travail qu’il a accompli à la tête de l’établissement, afin de l’ouvrir à toutes les formes d’expressions artistiques et de création et lui donner un rôle déterminant dans l’accueil de publics aux origines sociales les plus
variées. Il salue son engagement permanent en faveur d’une plus grande démocratisation culturelle.

Présentation de la maquette Nouvelle Orléans

21 septembre 2006

Monsieur l’Ambassadeur,
Madame Pierre Atlan,
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,

Je suis très heureux de vous accueillir aujourd’hui ici, pour vous dire un grand merci, Madame. C’est un grand plaisir et un grand honneur pour moi de recevoir à vos côtés le don vous avez fait à l’Etat : celui de cette œuvre exceptionnelle de Pierre Atlan, votre époux, et de son ami Pierre Merlin. Cette maquette, qui reproduit au 1/87e les quartiers de la Nouvelle Orléans, tels qu’ils existaient en 1915, est le fruit de leur travail méticuleux, de leur patience, de leur passion, de leur enthousiasme et de leur talent, mais avant tout de leur amour du jazz et de la Nouvelle-Orléans. Un amour que nous partageons.

Je reconnais d’ailleurs dans cette salle quelques grands noms du Jazz, Jean-Christophe Averty ou encore Claude Luter qui ont eux-mêmes participé et accompagné cette incroyable réalisation. Je crois savoir, Madame, que pour la mener à bien, votre époux vous avait convaincue de consacrer une pièce de 60 m² de votre appartement parisien à ce projet, engagé en 1956 et qui aboutira en 1980. Soit 25 ans d’un patient travail de reconstitution à l’identique, à partir de documents d’archives, de milliers de photos et de nombreux séjours dans cette ville.

Le réalisme et la qualité de cette reconstitution sont tels, que Louis Malle l’utilisera en 1977 en vue aérienne de nuit, pour le générique d’ouverture de son film La Petite, dont le scénario se déroule dans les maisons de plaisirs du centre de la ville, maisons dans lesquelles se produiront les plus grands noms du Jazz à leurs débuts.

Précisons que le souci d’exactitude des auteurs est allé jusqu’à remplir les voies d’eau de l’eau même du Mississipi transportée en bouteilles !

Au-delà même de la qualité de sa réalisation, cette maquette est un symbole, celui de l’hommage que nous rendons aujourd’hui à cette cité, à laquelle nous rattachent les liens de l’histoire et du cœur, cette cité qui fait vibrer tous les amoureux de la musique, cette cité envoûtante, effervescente, rayonnante et aujourd’hui meurtrie, mais qui sait pouvoir compter sur notre soutien et notre solidarité concrète.

J’ai tenu, l’an dernier, deux mois après les ravages de l’ouragan Katrina, à me rendre à la Nouvelle-Orléans et à rencontrer son maire, Ray Nagin, pour lui proposer notre aide pour la reconstruction de la vie culturelle de la ville.

Je suis fier de ces chantiers que nous avons engagés :
– des concerts de soutien aux musiciens louisianais ;
– des accueils en résidence dans nos Centres Culturels de Rencontre ; l’Abbaye de Fontevraud, le Château de La Borie, la Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon, l’Abbaye d’Ardenne et l’Abbaye aux Dames de Saintes ont répondu à l’appel ;
– l’organisation d’une exposition prévue du 3 mars au 2 juin 2007 de plus de 60 œuvres peintes, prêtées par des musées français au New Orleans Museum of Art ;
– des dons de livres aux bibliothèques sinistrées ;
– une exposition d’archives sur la Louisiane, provenant de la Bibliothèque nationale de France avec la Historic New Orleans Collection ;
– une convention de jumelage entre lopéra national de Bordeaux et lopéra de La Nouvelle-Orléans ;
– Enfin, le pilotage d’un projet fondateur d’une riche coopération patrimoniale a été confié à Pierre-Antoine Gatier, architecte en chef des Monuments historiques. Une coopération efficace avec le Consulat général de France à la Nouvelle-Orléans a permis d’engager un projet de restauration du « Passebon Cottage », dans le quartier Tremé, en partenariat avec l’université de Tulane et la French Heritage Society.

En témoignage de l’ensemble de ces projets de coopération et en accord avec Madame Atlan, j’ai décidé d’offrir en dépôt à la ville de La
Nouvelle-Orléans cet ouvrage extraordinaire dont nous ne voyons aujourd’hui qu’une partie.

L’ensemble de la maquette, dont la restauration a été prise en charge par les services de ce Ministère et confiée à l’atelier d’Alain Pras sera, après complète remise en état, envoyée à la Nouvelle-Orléans, où je souhaite me rendre au printemps 2007 pour la remettre officiellement à son maire.

Comme Madame Atlan, je suis convaincu que cette œuvre connaîtra là-bas sa juste destination et que nous sommes pleinement fidèles, par ce geste, à l’esprit et à la mémoire de Pierre Atlan.

En vous exprimant une fois de plus ma gratitude, Madame, je tiens enfin à remercier, en notre nom à tous, les musiciens du High Society jazz band, fondé par Pierre Atlan en 1947, qui vont faire vibrer cette maquette de leurs notes bleues.

FRANCE 3 REGION CENTRE en direct d’AZAY LE RIDEAU

16 septembre 2006

ANTHONY MASTEAU : Monsieur bonsoir. Merci d’avoir accepté notre invitation. Cet après-midi à Azay-le-Rideau, vous avez posé les premiers jalons d’une fondation de droit américain. Est-ce que cela veut dire que la France n’a plus les moyens d’entretenir ses monuments et qu’elle doit faire appel aux riches mécènes venus d’outre Atlantique.

Renaud DONNEDIEU de VABRES : Non pas du tout. Comme vous le savez, le Gouvernement et l’Etat ont décidé de s’engager puissamment autour du patrimoine et des monuments historiques, le 1er Ministre jeudi à Amiens a annoncé des mesures immédiates pour l’ensemble du patrimoine sur le territoire national plus de 140 millions d’euros à la fin de cette année – 24 millions d’euros débloqués immédiatement. Cela veut dire pour la Région Centre des chiffres très importants. Ce sont 10 millions d’euros supplémentaires qui, dès cette année, seront engagés, au-delà des 14 millions d’euros actuellement dépensés.

Donc, l’Etat s’engage, va renforcer son action ! Mais c’est vrai que je souhaite que se nouent des partenariats et notamment avec des mécènes et des mécènes étrangers. J’ai réuni ici, d’ailleurs pour leur donner un coup de chapeau, un certain nombre de propriétaires privés de monuments historiques pour essayer d’organiser, effectivement pour eux le mécénat américain.

Donc un Etat qui s’engage, des collectivités territoriales également et des mécènes privés.

Le patrimoine, c’est très important pour notre avenir, pour l’emploi et l’attractivité de notre pays !

A M : Alors justement, vous avez bien entendu ces nombreux propriétaires privés de monuments classés qui ont profité de cette 23ème édition des Journées du Patrimoine pour dire leur inquiétude. Ils dénonçaient notamment le désengagement de l’Etat et la baisse des aides publiques pour la restauration des monuments historiques. Vous leur répondez quoi aujourd’hui ?

RDDV : Je leur réponds que chaque année, grosso modo, l’Etat engageait 320 millions d’euros. Que cette fois ci, avec la décision du 1er Ministre qui est une décision pluriannuelle, il y a plus de 140 millions d’euros au-delà du budget traditionnellement reconnu.

Ce sont donc des moyens considérables qui sont donnés à la fois aux propriétés de l’Etat, aux collectivités territoriales et aux propriétaires privés qui ont une mission délicate n’ayant pas toujours les moyens suffisants.

Nous agissons ! Dominique de Villepin a pris ces décisions – j’en suis heureux – parce qu’elles étaient attendues. Les emplois vont ainsi être soutenus comme les métiers d’arts, les métiers de charpentiers, de tailleurs de pierre, de vitriers, de restaurateurs des objets d’art … Bref, c’est bon pour l’attractivité si l’on veut que notre pays, notre région restent une grande destination touristique. C’est bon aussi pour l’emploi!

A M : Il n’en reste pas moins que le désengagement de l’Etat est bien réel ! Rien qu’en Région Centre par exemple, votre Ministère a proposé de céder 14 monuments aux collectivités locales. Par exemple c’est le cas du Château de Chaumont dans la Région Centre. Est-ce un problème d’argent ou une priorité ?

RDDV : Pas du tout, il n’y a pas de désengagement de l’Etat ! Je viens de vous dire que je vais annoncer, tout à l’heure et je le fais devant vous, la relance d’un certain nombre de chantiers dont les 5 plus grandes cathédrales de la région. Ce sont des sommes très importantes au-delà de la dotation actuelle vis-à-vis des monuments historiques qui était de 15 millions d’euros, 10 millions d’euros supplémentaires sont affectés à la Région Centre.

Maintenant l’Etat propose aux collectivités qui le souhaitent un certain nombre de propriétés. C’est le cas dans notre région, par exemple du Château de Chaumont sur Loire, parcs et jardins, c’était très important de faire en sorte qu’il y ait une unité de gestion. Je vous rappelle que sur la base du volontariat, le Conseil Régional s’est porté acquéreur. Je vais regarder la qualité de leur proposition. Si elle me semble satisfaisante, je donnerai suite.

Donc, je ne cherche pas à me désengager. Je suis au contraire pour le renforcement de l’action. Il y a donc des collectivités qui veulent s’occuper d’une propriété et c’est une très bonne chose.

A M : Monsieur le Ministre, je vous remercie.

LANCEMENT DU PROJET « AMERICAN FRIENDS OF THE LOIRE CHATEAUX »

16 septembre 2006

Monsieur le Ministre Conseiller,
Monsieur le Député, cher Hervé Novelli,
Monsieur le Président du Conseil général, cher Marc Pommereau,
Monsieur le Président du Centre des monuments nationaux, cher Christophe Vallet,  
Monsieur le Directeur de l’architecture et du patrimoine, cher Michel Clément,
Monsieur le Directeur régional des affaires culturelles, cher Jean-Louis Leprêtre,
Mesdames et Messieurs,

C’est un plaisir pour moi de vous accueillir aujourd’hui au château d’Azay-le-Rideau. Ce monument national est l’un des édifices les plus célèbres de notre patrimoine. Construit par Gilles Berthelot, il reflète avec une grâce particulière l’engouement des élites du règne de François Ier pour la Renaissance italienne.

Je vous remercie très vivement d’avoir répondu à mon invitation. Mon souhait était de vous présenter, à l’occasion des « Journées européennes du patrimoine », un projet qui s’inscrit dans la politique que j’ai engagée pour développer le mécénat culturel en France.  S’agissant du mécénat des entreprises et des particuliers français, nous disposons maintenant, depuis la loi du 1er août 2003, d’un cadre juridique et fiscal parmi les plus incitatifs au monde. Mais la recherche de partenariats avec l’étranger, et notamment avec les Etats-Unis, constitue un axe prioritaire de l’action de mon Ministère et de ses établissements.

Vous avez tous en mémoire ce que la résurrection de Versailles, au lendemain de la Première Guerre mondiale, puis dans les années cinquante, doit à John D. Rockfeller Jr. Cette action se poursuit grâce aux American Friends du château, qu’anime Mme Katherine Hamilton : la magnifique restauration du Bosquet des Trois-Fontaines, par exemple, n’aurait pu se faire aussi vite sans leur mobilisation. Des associations américaines se sont constituées autour de l’Opéra de Paris, du Centre Pompidou, du musée du Louvre qui dotent ces établissements de moyens nouveaux venant abonder les crédits publics. Le petit musée national franco-américain de Blérancourt, symbole de l’amitié franco-américaine, lui-même a pu se lancer dans des projets de rénovation et d’extension grâce au soutien de l’association que préside Mme Eugénie Anglès qui a bien voulu se joindre à nous. Elle nous fera partager tout à l’heure son expérience.

Ce sont là, me direz-vous, des établissements nationaux dont le rayonnement est pour la plupart international. Mais j’observe aussi combien est positive, de part et d’autre de l’Atlantique, et notamment au profit du patrimoine et des savoir-faire qui s’y rattachent, l’action de la French Heritage Society, présidée par Mme Marie-Sol de la Tour d’Auvergne.

Les châteaux de la Loire, situés de part et d’autre de ce Val de Loire qui a été classé au patrimoine mondial par l’UNESCO,  constituent un ensemble historique et artistique unique au monde : c’est l’un des éléments majeurs du rayonnement culturel et touristique de notre pays, que nos amis américains connaissent bien. Leur sauvegarde et leur animation constituent un enjeu important de développement économique pour le Val de Loire.  

Au printemps dernier, lors d’une visite au château de Chenonceaux, j’ai donc lancé, en liaison avec M. Craig Stapleton, l’ambassadeur des Etats-Unis en France, le projet de création d’un organisme de droit américain qui concourra à la sauvegarde et à la mise en valeur des châteaux de la Loire publics et privés. Le Duc de Luynes, Mme Menier, propriétaire de Chenonceaux, M. Philippe Martel, directeur général du château de Chambord ont adhéré d’emblée à cette idée.

Intitulée  The American Friends of the Loire Châteaux, cet organisme américain dont le statut offrira à ses donateurs les avantages fiscaux importants qu’autorise la législation américaine, aura pour missions de recueillir Outre-Atlantique des fonds privés destinés au financement de travaux sur les parties classées, de favoriser et d’organiser, dans le strict respect de l’indépendance et des possibilités des différents sites, l’accueil de personnalités et de mécènes dans les châteaux de la Loire, et plus largement d’y développer un tourisme américain haut de gamme. Les fonds seront levés, non pour alimenter une caisse commune mais pour permettre la réalisation de projets précis sur tel ou tel site, ce qui suppose l’élaboration préalable de dossiers, en liaison avec les services des monuments historiques des directions régionales des affaires culturelles.

Pour la réalisation de ce projet, la démarche que je vous propose est de procéder en deux temps :

– Il convient d’abord de présenter l’offre culturelle, c’est-à-dire les châteaux qui souhaitent adhérer au projet, ce qui peut se faire rapidement à travers une association loi 1901 dont le fonctionnement ne sera pas seulement assuré par les droits d’adhésion de ses membres. Elle bénéficiera en effet, je m’y engage devant vous, d’une subvention de lancement de 100.000 € versée par la délégation au développement et aux affaires internationales de mon Ministère et par le Centre des monuments nationaux. Elle pourra ensuite prélever un pourcentage sur les mécénats recueillis.

– Dans la foulée, il appartiendra aux membres de cette association, de créer, avec l’aide de l’Etat, l’organisme de droit américain destiné à la collecte des dons. J’en ai parlé à plusieurs reprises avec M. Craig Stapelton, ambassadeur des Etats-Unis en France : convaincu du bien fondé de ce projet, il est prêt à  contacter des personnalités américaines qui pourraient être les fers de lance de ce projet, et à apporter son soutien à la recherche des premiers mécènes. Je salue d’ailleurs ici la présence de M. Jim Bullock, ministre conseiller pour les affaires culturelles auprès de M. Stapelton.

Il importe évidemment que ces deux organismes, l’association américaine et son relais opérationnel en France, soient clairement articulés. La mission centrale de l’association française sera donc d’élaborer, en liaison avec les services des monuments historiques de nos directions régionales des affaires culturelles, les dossiers présentant les projets de travaux qui seront proposés aux mécènes américains par l’organisme de droit américain. Elle pourra également jouer un rôle important dans la promotion des sites membres de l’association. Son activité sera complémentaire et non concurrente de celle des autres associations nationales de sauvegarde du patrimoine bâti et paysager déjà existantes, la Demeure Historique, les Vieilles Maisons françaises, le Comité des parcs et jardins de France dont je remercie les représentants ici présents de leur collaboration.
Sur le périmètre de ce projet, je suis bien conscient que l’appellation historique de châteaux de Loire n’ayant pas de définition géographique précise, bien d’autres sites pourront légitimement souhaiter y être associés. Il semblait néanmoins plus efficace de commencer avec un premier cercle : les demeures privées les plus connues, que vous représentez, ainsi que des sites relevant de l’Etat, comme Azay-le-Rideau, de collectivités territoriales comme Loches, de fondations comme Langeais (Institut de France) ou Amboise (Fondation Saint-Louis). Mais il importe que cette action se développe dans un esprit d’ouverture.

Pour avancer sur ce projet, je vous propose qu’un comité de pilotage se constitue rapidement et j’invite ceux d’entre vous qui souhaitent y participer à se faire connaître dès aujourd’hui. Ce comité, qui pourrait se réunir sous quinze jours, aura pour mission d’élaborer les statuts de l’association française ; il bénéficiera pour cela de l’appui et de l’expertise de mes services. J’ai demandé par ailleurs à notre ambassade aux Etats-Unis de mobiliser son conseil juridique sur le projet de création de l’association américaine.

Je livre ce schéma à votre réflexion, j’espère que vous y adhérerez et qu’ainsi ce projet prendra forme rapidement. C’est un lien supplémentaire que nous tisserons dans l’amitié ancienne de la France et de l’Amérique, c’est une ambition que nous porterons ensemble pour sauvegarder et faire mieux connaître l’un des patrimoines artistiques et historiques les plus riches au monde.

Je vous remercie.

Journal de 20H de TF1

16 septembre 2006

Claire CHAZAL

C’est le ministre de la Culture, Renaud DONNEDIEU de VABRES, qui a inauguré ces journées européennes dont le thème est cette année : faisons vivre notre patrimoine. Nous le retrouvons à l’instant dans le donjon de Vincennes, l’un des nombreux chantiers de l’Etat. Bonsoir Renaud DONNEDIEU de VABRES, merci d’être avec nous.

Renaud DONNEDIEU de VABRES, ministre de la Culture et de la Communication

Bonsoir.

Claire CHAZAL

Alors au total cette année, 17.000 manifestations, 12 millions de visiteurs l’an dernier, est-ce qu’on peut se fixer un objectif pour cette année ?

Renaud DONNEDIEU de VABRES

Ecoutez, c’est une grande fête populaire. J’invite chacun de nos concitoyens à aller partout, à aller découvrir cette splendeur française, ces lieux qui tout simplement sont à transmettre aux générations futures, ces lieux qui sont restaurés progressivement par le travail exceptionnel des artisans, des maîtres d’art, des restaurateurs, allez partout, allez découvrir les endroits devant lesquels vous passez ; cet esprit de découverte, je pense que c’est important parce que c’est la fierté, ce sont nos racines, ce sont des repères dans un univers parfois violent où on se pose plein de questions, eh bien le patrimoine c’est une chance pour notre pays et il faut aller le découvrir, l’aimer, c’est peut-être ce qu’il y a de plus beau dans notre pays.

Claire CHAZAL

Alors l’inquiétude de nombreux propriétaires privés et aussi des acteurs publics du patrimoine s’est fait jour ces temps derniers ; de nombreux chantiers ont été arrêtés faute de moyens ; est-ce que les 70 millions d’euros annoncés par le Premier ministre vous semble suffisants ?

Renaud DONNEDIEU de VABRES

Vous savez, chaque année, l’Etat dépense à peu près 320 millions d’euros ; eh bien dans le magnifique bureau que vous avez vu, du Premier ministre, il a pris une excellente décision qu’il a annoncée à Amiens, c’est-à-dire deux fois 70 millions, 140 millions d’euros supplémentaires, au-delà de ces 320 millions pour relancer les chantiers. Aujourd’hui, je gère 4.000 chantiers soutenus par l’Etat ; il y en avait 300 qui faisaient l’objet d’un ralentissement. Grâce à la décision de Dominique de VILLEPIN, dès hier j’ai pu annoncer le redémarrage de 102 chantiers ; d’ici la fin de l’année, tous auront redémarré. C’est une responsabilité très importante, j’allais dire stratégique pour l’emploi, pour l’attractivité si l’on veut que la France reste la première destination touristique mondiale. Alors oui, c’est un élan nouveau que Dominique de VILLEPIN a donné à l’ensemble de ce patrimoine historique français.

Claire CHAZAL

Et est-ce qu’on peut envisager, est-ce que vous êtes d’accord avec le fait qu’au fond les fonds privés viennent aussi soutenir les efforts de l’Etat en matière de patrimoine ?

Renaud DONNEDIEU de VABRES

Bien sûr. J’appelle chacun à s’engager. L’Etat s’engage et ça c’est très important, je souhaite que les collectivités locales, que les mécènes privés français ou étrangers s’engagent également pour notre pays. C’est essentiel pour son rayonnement et pour nos concitoyens ; je crois que l’art de vivre, la cohésion sociale supposent que chacun considère que ses propres racines sont préservées. Et puis nous devons transmettre ce patrimoine en bon état aux générations futures. C’est j’allais dire une responsabilité morale.

Claire CHAZAL

Merci beaucoup Renaud DONNEDIEU de VABRES