Imprimer cet article - Envoyer à un ami

Déjeuner en l’honneur de Régine Crespin, soprano

Chère Régine Crespin,

Je suis très heureux de vous accueillir aujourd’hui, et de vous témoigner
toute mon admiration pour votre éblouissante carrière. Gloire de notre scène
lyrique, votre voix et votre présence ont rayonné dans le monde entier,
transportant, charmant, ravissant tous les publics, de Paris où vous avez
régné sur les scènes du Palais Garnier et de l’Opéra Comique, à New York,
de San Francisco au Japon, de Buenos Aires à Vienne, Londres, Milan et,
bien entendu, Bayreuth. Votre timbre, d’une richesse exceptionnelle, la
puissance de votre jeu, et votre diction, d’une clarté absolue, vous ont fait
traverser les frontières et les océans, pour devenir notre plus belle
ambassadrice, sur toutes les plus grandes scènes du monde.

Profondément libre et audacieuse, vous avez fait vibrer de votre immense
talent la belle diversité du répertoire lyrique.

Vous avez incarné, avec la même aisance, les héroïnes tragiques du
répertoire français, Didon, Cassandre, Carmen, les rôles comiques, comme
la Grande Duchesse de Gerolstein, ainsi que les légendaires figures
féminines de Wagner.

Vous avez non seulement créé à Paris et New York le rôle de Madame
Lidoine, la seconde Prieure des Dialogues des carmélites en lui donnant
toute sa profondeur, mais, quelques années plus tard, vous deveniez une
Madame de Croissy stupéfiante de vérité. Je n’oublie pas non plus votre
interprétation mythique de ce personnage complexe qu’est la Maréchale du
Chevalier à la rose.

Vous avez jonglé avec les masques, passant de Kundry, un rôle « adulte,
rauque et meurtrier » que vous avez interprété à Bayreuth, où Wieland
Wagner vous a sacrée « vedette » internationale, à la légèreté de La
Périchole, d’Offenbach.

Chanteuse la plus colorée, la plus rayonnante, la plus libre et diverse de la
scène française, vous n’avez jamais voulu vous enfermer dans votre rôle de
diva, et vous avez pris un malin plaisir à ne jamais vous prendre au sérieux.

A un admirateur pour qui vous étiez tombée de votre piédestal en chantant
Offenbach, vous avez répondu : « Je ne me suis pas fait mal du tout, et j’ai
bien ri ! »

C’est aussi, je le crois, ce qui vous a valu l’amour inconditionnel du public,
cet humour lucide et décapant, cette sincérité, cette humilité qui ne vous ont
jamais quittés, et que vous avez toujours préférés aux artifices et aux fauxsemblants.

A la fois « Lionne », ainsi que l’on vous avait surnommée, diva internationale,
au parcours éclatant, constellé de succès, et femme profondément humaine,
sensible, et dont l’humour ravageur perce sous les masques et le fard, vous
vous êtes assurée d’une place toute particulière dans le coeur de votre
public.

Généreuse, vous vous êtes attachée à transmettre votre art aux jeunes
générations de chanteurs, au Conservatoire de Paris comme lors de
master-classes.

C'est là un don inappréciable de votre part à ces jeunes artistes et à l'art
lyrique.

L'opéra a aujourd'hui un rôle majeur à jouer dans le paysage artistique
et culturel du monde, de l’Europe et de notre pays ; l'événement « Tous
à l'opéra ! » en a encore témoigné il y a quelques jours. Que vous en
traciez le fil rouge de l'excellence et de la mémoire mérite notre
gratitude.

Madame, chère, très chère Régine Crespin, en vous exprimant à
nouveau l'honneur que je ressens à vous accueillir, permettez-moi de
vous dire notre reconnaissance pour le bonheur que vous nous avez
donné, tous nos voeux pour que ce bonheur vous soit rendu à la mesure
de votre talent et de votre générosité, et aussi nos sentiments profonds
d'amitié, d'affection et de fidélité.

Joyeux anniversaire, chère Régine Crespin !

Laisser une réponse