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Relançons l’Europe par la culture !

Identité, fierté, ouverture, racines, création, tradition, modernité, valeurs, autant de mots qui semblent avoir disparu du langage dès qu’il est question d’Europe !

Qui ne voit pourtant que les peuples européens sont en quête de repères, de sens, de réappropriation de leur propre histoire. De liberté et de pouvoir démocratique.

L’actualité, dans sa brutalité et sa violence, trouble en permanence nos concitoyens. Au fur et à mesure que les horizons resplendissants d’un univers mondialisé semblent s’ouvrir, le ciel politique en fait s’assombrit, la réalité quotidienne rappelant à chacun la dureté des temps.

Plus l’étranger est proche, plus les frontières s’estompent, plus est grand le besoin de s’identifier, de se localiser, de s’appartenir. De se retrouver.

L’individu, confronté à des cultures, des religions, des modes de vie qui ne lui sont pas familiers, se sent parfois ignoré, broyé, méprisé. Pour savoir accueillir « l’autre », quel qu’il soit, il faut être soi-même en situation de rayonnement, de réussite, d’harmonie.

Alors que l’Europe est le rempart politique le plus solide et le plus efficace pour que soit protégée et valorisée notre diversité, pour que nous réussissions à être une vraie puissance mondiale, force est de constater que les citoyens ont régulièrement une bonne raison d’exprimer leur refus. Qu’il s’agisse du « plombier polonais » ou de la question de la viande, de la pêche ou de la chasse, il y a toujours matière à se focaliser sur un défi économique, une remise en cause d’acquis jugés menacés par l’aventure européenne. Tel est le paradoxe qu’il nous faut surmonter.

Face à l’inquiétude de l’avenir que manifeste avec force le refus d’Europe lors des consultations référendaires, il est urgent et impératif de parler culture aux citoyens européens. Faire de la mise en valeur du patrimoine, de l’accueil à la création contemporaine, de la circulation des uvres et des artistes, de l’éducation artistique de vraies priorités politiques, n’est plus aujourd’hui l’expression nécessaire d’un simple supplément d’âme ou la manifestation élégante de la vie artistique, c’est plus fondamentalement une réponse à l’attente consciente ou inconsciente des peuples européens. Célébrer une langue, cultiver une tradition, accueillir l’architecture contemporaine, faire vivre les expressions culturelles nouvelles, honorer le répertoire, se projeter dans l’avenir grâce à l’histoire, donner le goût de la découverte et de l’innovation, préserver objets et métiers d’art, s’ouvrir aux cultures urbaines sont autant de projets de réconciliation, qui permettent même l’affirmation de notre identité européenne, et la reconnaissance de chacun.

Il n’y a pas de contradiction entre l’Europe des arts et la révolution numérique, pas de conflit entre la dimension spirituelle et l’impératif du progrès social, pas d’opposition véritable entre la singularité d’une langue à protéger et la nécessité de la traduction, qui selon Umberto Ecco est « le langage de l’Europe ». Ce sont des forces qui se nourrissent les unes des autres, dont nous pouvons et devons être fiers.

Comment ne pas voir, en outre, que notre attractivité et notre développement économiques sont principalement fondés sur notre capital culturel et artistique, sur notre potentiel d’intelligences, de savoirs, de créativité et d’imagination ? Culture et croissance sont une rime riche de sens et de conséquences concrètes pour le citoyen !

Nous devons placer la question de la culture au cur même du projet politique européen. C’est le meilleur moyen d’inspirer une confiance populaire qui nous fera définitivement défaut si nous donnons le sentiment de renoncer à l’atout de la civilisation européenne. Ce n’est pas un repli, une fermeture, un recul de nos ambitions. C’est au contraire l’affirmation dynamique que notre diversité est une richesse et que notre unité est un projet et non un nivellement par le bas. La flamme culturelle européenne nous donne les moyens de tendre la main aux autres cultures du monde, de nouer un dialogue fécond en commençant naturellement par la Méditerranée, « Mare Nostrum ».

Face à l’intégrisme et aux violences, face à l’uniformisation et à la marchandisation excessives de nos sociétés, l’Europe de la culture est notre nouvelle frontière.

C’est le chant des fiertés, la fécondation des racines par la création, la célébration de nos capacités de rayonnement. C’est aussi le respect dû à chacun, à chaque peuple, à son histoire et à son devenir. C’est l’essence même de la démocratie.

Le Président de la République a voulu que la France soit en « tenue » européenne pour mettre en lumière les 26 Etats membres lors de la Présidence française. La saison culturelle européenne qui débute le 1er juillet et qui accueillera partout en France de très nombreuses manifestations artistiques des 26 pays, n’est donc pas un divertissement. C’est un projet politique fondateur !

Commencer par la culture, c’est vouloir enrayer la spirale de la peur qui conduit au refus. C’est centrer notre projet politique sur l’essentiel. C’est conjuguer perspective collective et affirmation de soi. C’est placer l’homme au cur de notre idéal politique et humaniste. C’est faire de l’Europe un modèle envié. C’est agir pour la prospérité et la paix. Cela créera la dynamique populaire d’un oui à l’Europe, qui est le défi des temps actuels.

6 Réponses à “Relançons l’Europe par la culture !”

  1. Pierre Badelle a écrit:

    Que dire, Renaud? Tout ceci est bien pensé, bien écrit, peut-être trop beau!
    Dans notre grisaille quotidienne, malgré l’été, il y a beaucoup de monde à convaincre des vrais défis à relever.
    Pour moi, s’il est vrai que nous arriverons à poser des ponts entre les peuples – d’Europe ou d’ailleurs – grâce à la culture, il me semble important de ne pas oublier nos défis économiques… Entre autres: Selon moi, le seul moyen réel de donner du pouvoir d’achat aux citoyens, est une meilleur répartition entre le Capital et le Travail: une Economie plus dirigiste sur les Grandes Entreprises me semble donc « le mal nécessaire ».
    D’autant qu’une meilleure structure économique favorise un meilleur budget pour la Culture!

  2. Aurore a écrit:

    Par la Culture, oui, il est possible de connaître rapidement tout un peuple et de s’en rapprocher au plus près. Découvrir sa manière de vivre, sa façon de travailler, de se divertir et surtout s’intéresser à ses traditions et sa Culture. Pour arriver à cela, rien n’égale d’aller séjourner dans le pays. Quelques jours suffisent, mais il faut délaisser les guides et les trajets tous faits et se fondre dans le peuple pour mieux l’observer, le regarder vivre, se laisser envahir par son rythme quotidien pour mieux le ressentir et ainsi entrer dans sa civilisation, sa Culture. Je trouve fort dommage que les guides touristiques ne donnent pas suffisamment de temps libre aux touristes pour qu’ils s’impreignent justement de la vie quotidienne du pays visité. Car visiter un musée, un monument, un pays, sans faire connaîssance avec son peuple, laisse un manque, un vide qui atténue le besoin de tisser des liens humanistes entre les peuples.
    Autour d’une oeuvre d’art, d’un monument, d’un site, il existe un savoir faire et une intelligence qui proviennent d’une civilisation. Rassembler ces civilisations, c’est permettre à leur intelligence, à leur savoir faire, de fusionner avec d’autres et de nouer des relations qui développeront des créations dont le rayonnement s’étendra bien au delà de l’Europe. Un rayonnement qui fera la force de l’Europe.
    Seul, un pays est faible, rassemblé avec d’autres, ce pays sera bien plus fort. Les différences entre les civilisations permettent des découvertes qui font jaillir des nouvelles idées, des nouvelles créations, des nouvelles richesses : « Heureux qui, comme Ulysse a fait un beau voyage ! » Le voyageur qui revient dans sa province après avoir découvert la civilisation d’ un autre pays qu’il ne connaîssait pas, en retire toujours quelque chose de bénéfique.
    Pour être forte, l’Europe doit rassembler différentes civilisations qui feront sa richesse. Mais pour cela, il faut que les peuples commencent par faire connaîssance. Les jumelages entre villes et villages sont un apprentissage des échanges, des connaîssances des différents modes de vie et de Culture. Ils méritent d’être encore encouragés, car ils donnent aux habitants des villes jumelées, la sensation d’être véritablement Européens ou l’envie de le devenir.

  3. Patrice Charrais a écrit:

    S`il fallait commencer la Présidence Européenne, je commencerais par la Culture !

    D`autres y ont pensé, la France le fait !

    « Commencer par la culture, c’est vouloir enrayer la spirale de la peur qui conduit au refus. C’est centrer notre projet politique sur l’essentiel. C’est conjuguer perspective collective et affirmation de soi. C’est placer l’homme au cur de notre idéal politique et humaniste. C’est faire de l’Europe un modèle envié. C’est agir pour la prospérité et la paix. Cela créera la dynamique populaire d’un oui à l’Europe, qui est le défi des temps actuels. »

    Il n`y a rien à ajouter.
    Il n`y a rien à retirer.
    Tout est dit.

    Avis aux peuples et aux Etats qui ont pour projet, et ambition, de rejoindre l`Union européenne (Croatie, Bosnie-Herzegovie, Serbie, Kosovo, Macédoine…)!

  4. chritophe colinet a écrit:

     » Comment ne pas voir, en outre, que notre attractivité et notre développement économiques sont principalement fondés sur notre capital culturel et artistique, sur notre potentiel d’intelligences, de savoirs, de créativité et d’imagination ? Culture et croissance sont une rime riche de sens et de conséquences concrètes pour le citoyen !  »
    Mon cher Renaud, va falloir un jour apprendre les leçons de Malraux. Quand on a les cerbères du marché avec les dents longues en face de soi, on a deux options : se coucher, ou mordre. Faut croquer, là ! Tu as les moyens, non ?

  5. Caroline a écrit:

    Oui mais comment toucher réellement ceux des européens, et des autres, qui ont le plus besoin d’être convaincus?
    Quand pour des raison de manques, quels qu’ils soient, économiques, sociaux, culturels,comment entendre autre chose que des promesses d’amélioration immédiate?
    Si la culture est une condition essentielle à la notion même de société, il faut que l’individu se sente assuré de sa survie, il me semble.La culture est non seulement un facteur de prospérité, mais également un facteur de Bien-Etre, gratuit sous beaucoup d’aspects.
    Reste à trouver des moyens convaincants.

  6. Elizabeth Couturier a écrit:

    Témoignage modeste d’une galeriste à la tête d’une jeune galerie de Province et qui fait de la culture européenne son « pain quotidien ». Nous exposerons à Strasbourg, France, en novembre, un jeune artiste anglais(né en Australie!) et vivant à Berlin depuis 8 ans.
    Vous verrez sur notre site, que nous devançons aussi la très brûlante actualité, en essayant de promouvoir « nos » artistes européens en Syrie et invitons nos compatriotes à découvrir les (talentueux) peintres syriens.
    Donc, vive la Culture Européenne…et Méditerranéenne, qui ne peut être que source de liens, d’ouverture et de paix.
    Bien cordialement et poursuivez vos actions!
    Elizabeth Couturier

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