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7e réunion annuelle du RIPC (Réseau international sur la politique culturelle) à Shanghai

Permettez-moi tout d’abord de remercier mon collègue, M.Sun Jiazheng, de son invitation
qui nous permet de nous réunir à un moment historique, puisque viennent de s’ouvrir à
l’UNESCO, le 20 septembre dernier, les négociations gouvernementales en vue de
l’élaboration d’une Convention sur la protection de la diversité des contenus culturels et des
expressions artistiques.

Analyse de l’avant-projet

Le texte proposé par les experts indépendants nous semble constituer une bonne base de
travail. J’ai noté que cette appréciation était partagée par la grande majorité des délégations
présentes à l’UNESCO notamment par les représentants de la Chine. Il répond en effet aux
principaux objectifs que nous nous sommes fixés. Il peut toutefois être amélioré et je crois
que notre réunion d’aujourd’hui doit nous conduire à proposer des améliorations.

– Il affirme le droit souverain des Etats à se doter de politiques culturelles. Je m’associe
pleinement à mes collègues (canadiens, finlandais norvégiens, portugais, et tous les autres
pays) qui ont pris la parole à l’UNESCO pour s’en féliciter.

– Ce texte reconnaît la spécificité des biens et services culturels, c’est une de nos priorités et
la raison d’être de la convention.

– Il reconnaît la primauté des Droits de l’homme internationalement garantis.

– Il encourage les Etats à renforcer la coopération et la nécessaire solidarité en faveur des
pays en développement.

– C’est un texte normatif qui vient combler le vide juridique existant dans le domaine de la
protection et de la promotion de la diversité culturelle.

Débat communautaire

En tant que Ministre d’un des Etats membres de l’Union européenne, il me paraît utile de
vous informer des débats en cours au niveau communautaire concernant la Convention. Mes
collègues estonien ou portugais souhaiteront peut-être compléter mes propos.

Les travaux en cours à l’UNESCO peuvent, à mon avis, donner à l’Union européenne une
nouvelle occasion de réaffirmer son engagement en faveur de la diversité culturelle – un
engagement qui est aussi une obligation inscrite dans l’actuel Traité de l’Union et qui est
élevé dans le projet de Constitution européenne au rang des valeurs et des objectifs de
l’Union. L’ambition européenne étant d’unir les peuples de ses 25 Etats membres, et pas
seulement de bâtir une zone de libre-échange, le respect de la diversité culturelle et
linguistique à l’intérieur de l’Union est un principe fondamental. C’est notamment pourquoi le
projet d’article de la Constitution européenne sur la politique commerciale commune, prévoit
que les Etats membres peuvent s’opposer à tout accord commercial qui porterait atteinte à la
diversité culturelle.

Nous nous réjouissons que les 25 Etats membres de l’Union, soutenus activement par la
Commission, puissent tous ensemble peser dans cette négociation en vue de son succès.

Déroulé de la négociation

Je voudrais conclure en rappelant que pour la France l’objectif est d’aboutir à l’adoption d’un
texte en 2005. Cela ne veut bien sûr pas dire un texte “ bâclé ”. Les membres du RIPC
peuvent continuer d’être une force vive de propositions et travailler activement avec leurs
délégations permanentes auprès de l’UNESCO pour continuer à améliorer ce texte et aboutir
à un projet que nous pourrions adopter à la prochaine Conférence générale à l’automne
2005.

Rôle du RIPC – déclaration finale

Le Réseau international sur la politique culturelle doit continuer, en relation avec l’UNESCO,
à faire entendre sa voix. Certains parmi vous sont membres du comité de rédaction qui vient
d’être créé et qui est ouvert à tous. Nous pouvons donc tous faire entendre notre voix. Les
Ambassadeurs auprès de l’UNESCO de nos pays pourront se rassembler pour défendre nos
positions, ainsi qu’ils l’ont déjà fait par le passé. Un autre groupe, celui des pays
francophones, auquel je suis très attaché et dont plusieurs membres sont présents
aujourd'hui, a lui aussi un rôle de coordination et de proposition à jouer à l’UNESCO.

Je vous propose, si vous en êtes d’accord, de rappeler avec force, dans la déclaration finale,
les principes directeurs de ce projet de convention auxquels nous tenons et que nous
voulons voir clairement indiqués. Je vous invite également à reprendre dans les contributions
écrites que nos Etats doivent faire parvenir à l’UNESCO d’ici le 15 novembre, ces éléments
que nous partageons tous au sein du RIPC :

– la reconnaissance de la spécificité des biens et services culturels

– l’affirmation sans aucune ambiguïté du droit des Etats à développer des politiques
culturelles

– la nécessité de développer la solidarité culturelle internationale afin de contribuer à un
rééquilibrage des échanges de biens et services culturels et de favoriser le pluralisme des
expressions culturelles

– l’obligation de conformité des dispositions de la future convention au régime applicable aux
droits de l’homme internationalement garantis

– l’affirmation de la non subordination de la convention aux autres traités existants.

Avant de terminer je voudrais évoquer une difficulté que nous rencontrons pour que cette
convention soit effective. Il s’agit de la rédaction de l’Article 19 : cet article a, me semble-t-il,
fait beaucoup parler de lui. C’est celui qui traite de la relation de la convention en cours de
négociation à l’UNESCO avec les autres instruments juridiques existants.

Il me semble que
subordonner cette convention aux autres instruments la viderait de son sens et lui ôterait
toute efficacité. Nous sommes tous ici, convaincus de l’importance de la diversité culturelle
et de la nécessité de cette convention, nous devons donc inscrire cette convention sur un
pied d’égalité avec les autres textes et lui donner une chance, en cas d’atteinte aux principes
de la diversité culturelle, de dire le droit et protéger les Etats qui s’en réclameraient.

Autre point que je voudrais rapidement évoquer, celui des Mécanismes de suivi et règlement
des différends : ils ont suscité également de nombreuses réactions lors de la première
réunion des experts gouvernementaux à l’UNESCO. J’en retiens qu’il faut effectivement
veiller à ce que les mécanismes ne soient pas inutilement lourds et onéreux mais je pense
que, si nous souhaitons une application juste et équilibrée de cette convention, un suivi
efficace est nécessaire. Essayons de l’améliorer ensemble. De la même façon le mécanisme
de règlement des différends est nécessaire à une convention contraignante et je me félicite
de la mention de la Cour internationale de justice comme organe suprême de recours.

En conclusion je voudrais chaleureusement féliciter ici le rapporteur de ces journées (Artur
Wilczynski, président du groupe de travail sur la diversité culturelle au sein du RIPC) qui, m’a
t-on dit, et j’ai pu le constater en lisant son rapport, a fait un travail remarquable avec un
professionnalisme et une rigueur que nous pouvons tous apprécier ici.

Je vous remercie

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