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Agir c’est partager la fierté

9 novembre 2010

Remise du prix « Doha Capitale Culturelle Arabe » à Abd Al Malik et Renaud Donnedieu de Vabres

Monsieur l’Ambassadeur, cher Mohamed, Madame la Directrice Générale de l’UNESCO, chers amis,

Remercier le Qatar pour l’honneur qui m’est fait, te remercier, cher Mohamed, de m’avoir permis d’exprimer mon admiration et mon affection à un grand artiste français, Abd Al Malik, en liant nos sorts, grâce à ce prix, autour du commun culturel entre le monde arabe et la France, c’est affirmer une volonté, c’est tout simplement agir.

C’est bâtir un véritable arc en ciel, où se conjuguent les talents, les origines, les perspectives, les contraires et les différences, au lieu de laisser s’antagoniser les peurs, les rancurs, les mépris et les haines, qui sont la réponse de plus en plus ordinaire et banale à la crise, le terreau nauséeux dans lequel prospèrent intégrisme, fanatisme et racisme.

C’est construire le « monde-pont » cher au grand poète arabe, Adonis, que je cite :
« Le MONDE-PONT est pareil à la poésie, nous emportant loin de nous-mêmes pour nous rendre plus proche à la fois de notre être profond et des autres. Il est symbolisé géographiquement et culturellement par notre Méditerranée, notre mer-mère commune dont je crois voir les deux rivages se rencontrer dans l’acte de création comme se rencontrent les deux lèvres, ou comme se nouent les deux bras autour d’un même corps, une création qui dit à chacun de nous : tu seras toi-même seulement dans la mesure où tu seras l’autre. »

Agir, c’est partager la fierté, c’est faire rayonner le meilleur de chacun, c’est ouvrir la dynamique de la fraternité par l’hospitalité des lieux, l’audace de la rencontre, la morale de l’énergie, de la création, de la découverte, du respect. Il faut vivre les lieux, incarner les fonctions, habiter les symboles. C’est cela qui porte leur énergie initiale au paroxysme.
Dire cela, à l’ambassade du Qatar, c’est naturellement célébrer l’uvre de Pei et de Jean-Michel Wilmotte pour la création du Musée d’Art Islamique de Doha, c’est attendre avec impatience celle de Jean Nouvel, à Doha pour le Musée National du Qatar.

Mais c’est aussi pour moi évoquer la couverture de la cour Visconti du Louvre qui accueillera grâce à Rudy Ricciotti un magnifique département des Arts de l’Islam, c’est rendre concrète la présence de notre premier Musée National à Lens comme à Abu-Dhabi, c’est se rappeler avec joie et émotion, Cher Abd Al Malik, l’ouverture du Grand Palais aux cultures urbaines ! « Rue au Grand Palais » Ce n’était pas une provocation mais une main tendue. Une réconciliation…

C’est là que nous nous sommes connus, un an après les violences qui avaient marqué les banlieues, où j’avais voulu dédier l’un de nos phares les plus emblématiques de la fierté française à la jeunesse, au rap, au hip-hop, au skate, au graff, aux battles pour que tous ensemble, quelle que soit notre couleur de peau, notre religion ou notre vie personnelle, nous puissions vivre joyeusement notre devise républicaine.

Vous m’avez dédicacé une photo de votre concert avec cette légende maxime :
« Dans le jardin, les fleurs sont multiples, mais l’eau est une . »
« Nous sommes tous issus de la même lumière. »

Evoquer tout cela grâce à toi, cher Monsieur l’Ambassadeur, cher Mohamed, ce n’est pas ressentir une bouffée de nostalgie.
Bien au contraire. C’est prendre l’engagement d’avoir en permanence de beaux réflexes, à chaque fois qu’une perspective se dégage, qu’un choix est à faire, qu’une option est à retenir.

Faire vivre la diversité, c’est chanter le respect, créer de vraies passerelles entre les cultures, entre les époques, entre les religions. Ce n’est pas une posture à éclipses liée aux responsabilités temporaires. C’est une respiration quotidienne. Ce doit être un réflexe exigeant, une ambition permanente.
C’est certainement également une urgence, si l’on veut éviter les incendies, les engrenages et les violences. Cela doit concerner ainsi bien les écoles dans les quartiers de nos villes que les palais prestigieux.

C’est ainsi qu’aujourd’hui, pour l’ouverture du nouveau Royal Monceau, propriété du Qatar, j’ai été heureux et fier avec Alexandre Allard de pouvoir accueillir dans la galerie Art District, première du genre dans un palace à Paris, l’uvre de Jean-Michel Basquiat, grâce au concours amical d’Enrico Navarra, fier et heureux que les photos exposées dans les chambres soient un voyage dans la création mondiale.

C’est ainsi que si nous avons l’honneur de nous occuper de l’avenir de l’Hôtel de la Marine, place de la Concorde, nous y ferons une Villa Medicis qui, dans un même élan fera rayonner les talents français et s’ouvrira sur le monde en étant le point de rencontre des mécènes, des fondations, des artistes, des maîtres d’art, des collectionneurs et des amateurs d’art de tous les pays.

Cette main que nous devons tendre, ce cur que nous devons tous ouvrir, c’est partout où cela est possible.

Le prix que vous nous remettez, Monsieur l’Ambassadeur, met en lumière la volonté particulièrement forte des autorités du Qatar de bâtir la paix et le développement sur l’intelligence, l’éducation, la culture, le respect du passé, des traditions mais aussi la fièvre et l’audace de l’avenir.

Arc électrique des sensibilités et des libertés.
Arc en ciel des talents.
Dialogue des racines, de l’énergie et de la création.

Autant de valeurs et de symboles que porte comme un étendard avec panache Abd Al Malik.

Aujourd’hui où sort votre nouvel album, « Château Rouge » et quelques jours après avoir reçu le prix « Edgar Faure » pour votre livre « la guerre des banlieues n’aura pas lieu », publié aux éditions du Cherche Midi, j’ai choisi de vous citer, j’allais dire d’essayer de vous déclamer tant vos propos sont à la fois un chant, un hymne et une devise !
Je vous ai entendu dire dans une interview cette phrase magnifique et courageuse : « je ne constate pas l’obscurité, j’allume une bougie ».

Voici le texte de l’homme engagé, de l’artiste exceptionnel que vous êtes et que le Qatar met aujourd’hui à l’honneur grâce à une belle complicité qui me relie à vous, Monsieur l’Ambassadeur, ou plutôt qui me relie à toi, cher Mohamed.

« Comment faire pour que, dans un monde globalisé, sur un globe mondialisé, chacun de nous puisse être un, sans se défaire de sa différence singulière qui fait le multiple dans l’un et la beauté du lien ?

Je parle de donner une âme au village global.
Donc, si je parle de moi, je parle de ma cité.
Et si je parle de ma cité, je parle de la France.
Et si je parle de la France, je parle de l’Europe.
Et si je parle de l’Europe, je parle de l’Afrique.
Et si je parle de l’Afrique, je parle du monde.
C’est par ce que ce qui est vrai pour un être est vrai pour un pays.
Et ce qui est vrai pour un pays est vrai pour l’Humanité.
Maintenant, imaginez un être sans âme…
Imaginez un être sans vertu.
Imaginez un être sans générosité, un être sans principe, un être sans éthique, un être sans bravoure, un être sans justice, un être sans regret, un être sans respect, un être sans cause, un être sans rai
son, un être sans mémoire, un être sans sagesse, un être sans savoir, un être sans devoir, un être sans art, un être sans musique, un être sans mystique avec ou sans Dieu.
Imaginez un être sans cur, un être sans amour.
Imaginez un être-animal féroce, drapé dans les oripeaux de l’humanité.
C’est peut-être moi, c’est peut-être vous, c’est peut-être nous, et nos actes témoignent toujours, pour ou contre nous-mêmes.

L’histoire, ou le cheminement, d’un individu particulier est notre histoire à tous,
puisque l’on pleure tous salé,
puisque l’on saigne tous rouge.
L’événement historique est à l’anecdotique ce que le tremblement de terre est au battement des ailes d’un papillon.

C’est le pourquoi de mon récit,
et les questions que se posent – et que nous posent ! – mes personnages sont des réponses que je me suis moi-même donné à force de vivre.
Pour me bouger, pour me lever et essayer d’atteindre l’inaccessible étoile.
Les plus grands voyages commencent toujours par le premier pas…

Je parle de ma voix, je pars de ma voie, celle que j’ai choisie pour être moi, pour être en paix avec moi
et avec les autres, puisque nous devons vivre ensemble.
Voilà mon propos : c’est à chacun de trouver la voie qui lui correspond pour une solution commune.
Et je témoigne simplement, je parle de la réalité de ma voie.
Je parle de la vérité d’un Islam vécu dans le cadre d’un cheminement harmonieux, humblement et authentiquement spirituel.
Et si l’humanisme est la nécessité du collectif et le respect de l’individu, alors l’Islam est un humanisme.
Mais, encore une fois, à chacun sa voie !
Ce sont les mêmes objectifs que l’on doit avoir en partage.
Objectif commun et règle de vie commune : Liberté, Egalité, Fraternité.
C’est la République qui donne le cadre dans lequel chacun pourra sainement trouver sa voie.
C’est la République qui orchestre la concordance des différences.
Etre universel, c’est s’appuyer sur des références peut-être différentes, mais avoir les mêmes idéaux.
Il ne s’agit pas de trouver le remède miracle mais de trouver l’harmonie, entre nous, afin que nous puissions tous ensemble trouver des solutions.
Et l’orage a beau gronder de plus en plus fort de l’autre côté du périphérique, je ne cherche qu’à atteindre celui qui gronde à l’intérieur de moi.
Parce que les lieux ne sont que des métaphores des êtres qui y vivent.
J’insiste. Comprenez bien : un message de paix dans les banlieues est un message universel.
Si vous n’avez pas compris mon récit, voilà ce qu’il signifie !

Qu’on se reconnaisse ou pas, on est tous ces jeunes dans ces cages d’escaliers, tous ces fidèles qui sortent de la mosquée, tous ces jeunes diplômés au chômage, tous ces jeunes qui crachent leur douleur et leur rage dans des disques de rap, tous ces parents brisés par la vie (et accablés par tous ceux qui ergotent sur leur prétendue démission) : puisque nous sommes tous objectivement la France !
Mais on en flicaille certains, toujours les mêmes, pour être sûr, pour vérifier s’ils correspondent à une identité nationale qu’on peine à définir, qu’ils instrumentalisent pour parler de l’immigration, des banlieues et de l’Islam.

Cest l’arbre qui cache la forêt de la crise, de la solidarité qu’on délocalise au fin fond de l’oubli en même temps que les entreprises qui ferment, en même temps que tous ceux qui, avec tout ça, finiront par crever pour de bon.
Et tout va tellement vite…

La crise économique n’est qu’une conséquence d’une crise bien plus profonde.
C’est l’Humanité qui est en crise.
Vidée de l’intérieur, elle devient avide à l’extérieur, monstrueuse et sans cur.
On est par rapport à ce qu’on a.
Les centres-villes représentent le Nord et l’Occident,
Et les banlieues le Sud et les damnés de la terre.
Ce qui est vrai pour un être est vrai pour le monde, on est d’accord.
Si l’on arrive à pacifier l’être, à résoudre cette crise intérieure, à combler ce vide essentiel, on aura les outils au-dedans pour que le changement se fasse au-dehors.
Brandir la littérature comme on brandirait un fusil et tirer en l’air : PAN ! J’ai votre attention ?
S’arrêter un instant, s’asseoir sereinement sous l’arbre à parole.
Ecouter, donc, et prendre de la distance tout en étant là, tout en restant là.
De la tenue…intellectuelle, de la retenue…émotionnelle.
Et témoigner, partager, s’apaiser les uns les autres, apaiser les uns et les autres.

La banlieue sera peut-être demain le lieu du début et de la fin de la quête de tous ceux qui sont à la recherche de la paix perdue.
Ces quartiers, que l’on accuse d’être à l’origine de tous les maux qui gangrènent notre société, seront peut-être le lieu où tous viendront chercher le salut.
Et parce que le spirituel ne se traduit pas nécessairement par du religieux, alors, c’est sûr, tout le monde s’y rendra dans cette cité qui sera redevenue alors un peu grecque…
C’est ce à quoi je m’attelle, ce qui me met en mouvement en tant qu’homme, en tant qu’artiste et en tant que citoyen.
La guerre des banlieues n’aura pas lieu… (insh’Allah !)

Apollinaire , Claude Pompidou , Bernadette Chirac , la dialectique de l’Ordre et de l’Aventure …………

7 septembre 2010

40è anniversaire de la Fondation Claude Pompidou
7 septembre 2010

Avec autant d’élégance que de simplicité, autant d’intelligence que de discrétion, autant d’indépendance d’esprit que de sens du devoir, Madame Pompidou a assumé sa fonction de Première Dame de France, accompagnant le Président Pompidou dans les moments de réussite politique comme dans les duretés des épreuves physiques qu’il a connues.
Claude Pompidou – elle aurait aimé que je dise Madame Georges Pompidou – était une femme d’action, d’engagement. Sa curiosité intellectuelle était en permanence en éveil. Rien ne lui échappait de la pointe de la création, ni des illusions et des fausses valeurs. Comme protégée par son humour, elle avait un jugement sûr, précis et parfois très clair, lorsqu’elle n’aimait pas quelque chose ou quelqu’un. Elle avait aussi le culte de l’amitié vraie et authentique avec d’infinies attentions.
Elle a mis son talent, son énergie et sa générosité au service de la cause qui ce soir nous réunit à nouveau.
Se souvenir avec émotion, c’est agir. C’est continuer le chemin. C’est avoir le goût du résultat, sans jamais se satisfaire de l’uvre accomplie, mais en regardant devant tout ce qui reste à faire. En recherchant l’addition des énergies avec l’Etat et l’ensemble des acteurs de la santé et de la solidarité sociale.
Témoigner la ferveur de notre fidélité à la magnifique générosité humaine de Madame Pompidou, c’est aujourd’hui accompagner Madame Chirac dans sa mission de Présidente de la Fondation Claude Pompidou.
Il y a comme un lien sacré et naturel entre Madame Pompidou et vous-même, Madame. Nous sommes les témoins de la très belle et frappante unité qui vous relie à elle : l’exigence personnelle, le dévouement sans limite et aussi une volonté de fer pour faire aboutir les projets, qui sont un espoir concret et attendu pour de nombreuses familles françaises.
Bref, face à autant de mobilisation et de passion, nous devons tous ensemble ce soir prendre l’engagement lors de ce 40° anniversaire de la Fondation de continuer le chemin de la solidarité active, avec la belle devise qu’elle aimait citer « N’être utile à personne c’est n’être utile à rien ».
En vous donnant la parole Madame la Présidente, et avant que nous découvrions le film particulièrement émouvant de Gilles Paquet-Brenner – écrit par Serge Joncour et par le réalisateur, d’après le magnifique roman de Tatiana de Rosnay, et avant d’applaudir les interprètes d’ « Elle
s’appelait Sarah » produit par Stéphane Marsil, notamment Kristin Scott-Thomas,
je voudrais lire quelques vers d’Apollinaire, extraits de l’Anthologie de la Poésie Française du Président Georges Pompidou, qui a été une sorte de livre de chevet pour Madame Pompidou, dans lequel elle aimait se réfugier chaque soir, après la disparition de son mari.

Le titre du poème est « La Jolie Rousse » :
A travers ce texte, Madame Pompidou revit quelques instants, même si dans nos curs elle ne nous a jamais quittés :
« …
Je juge cette longue querelle de la tradition et de l’invention
De l’Ordre et de l’Aventure
Vous dont la bouche est faite à l’image de celle de Dieu
Bouche qui est l’ordre même
Soyez indulgents quand vous nous comparez
A ceux qui furent la perfection de l’ordre
Nous qui quêtons partout l’aventure
Nous ne sommes pas vos ennemis
Nous voulons nous donner de vastes et d’étranges domaines
Où le mystère en fleurs s’offre à qui veut le cueillir
Il y a là des feux nouveaux des couleurs jamais vues
Mille phantasmes impondérables
Auxquels il faut donner de la réalité
Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait
Il y a aussi le temps qu’on peut chasser ou faire revenir
Pitié pour nous qui combattons toujours aux frontières
De l’illimité et de l’avenir
Pitié pour nos erreurs pitié pour nos péchés
Voici que vient l’été la saison violente
Et ma jeunesse est morte ainsi que le printemps
O Soleil c’est le temps de la raison ardente
Et j’attends
Pour la suivre toujours la forme noble et douce
Qu’elle prend afin que je l’aime seulement
… »

Madame la Présidente, chère Bernadette, je vous donne la parole !

Renaud Donnedieu de Vabres

L’ école de la République, c’est celle de la fraternité et du respect

1 septembre 2010

A quelques heures de la rentrée des classes, dans une conjoncture marquée par la violence politique au plan international comme au plan intérieur, comment ne pas avoir envie de lancer « l’hymne à l’école de la République et à la jeunesse de France »?

Il y a la transmission du savoir. C’est primordial!

Il y a la préparation de la vie active. C’est essentiel!

Il y a la maturation vers l’âge adulte et la qualité du citoyen libre et responsable. C’est vital!

L’école est le creuset des valeurs qui fondent l’esprit d’un peuple.

Le respect dû à autrui, à son professeur, à sa famille, à son pays est un des fondamentaux qu’il est juste de rappeler, de célébrer et d’inculquer.

Ce n’est pas une posture réactionnaire et rétrograde. C’est une maxime positive.

Fixer des lignes jaunes, donner des repères, transmettre quelques principes de vie, c’est cela la morale républicaine. C’est la grandeur de la mission de l’école que d’en faire un atout et non une contrainte stérile.

Bon courage aux enseignants! Grande vigilance aux parents! Vive la jeunesse de France, pour qu’elle soit la plus épanouie, libre et prometteuse possible!

« Les loups sont entrés dans Paris »…

29 juin 2010

Je dédie la magnifique chanson de Serge Reggiani  » Les loups sont entrés dans Paris » à tous ceux qui aujourd’hui leur ressemblent, en attaquant de manière ignoble Eric Woerth dans l’exercice de ses fonctions. Lorsqu’il s’agit d’anciennes personnalités politiques de « haut rang » c’est pitoyable, pour ne pas dire plus…

Vivement, comme le dit la chanson, que ces loups-là sortent de Paris  » charmante Elvire »!

Les hommes avaient perdu le goût
De vivre, et se foutaient de tout
Leurs mères, leurs frangins, leurs nanas
Pour eux c’était qu’du cinéma
Le ciel redevenait sauvage,
Le béton bouffait l’paysage… alors

Les loups, ououh! ououououh!
Les loups étaient loin de Paris
En Croatie, en Germanie
Les loups étaient loin de Paris
J’aimais ton rire, charmante Elvire
Les loups étaient loin de Paris.

Mais ça fait cinquante lieues
Dans une nuit à queue leu leu
Dès que ça flaire une ripaille
De morts sur un champ de bataille
Dès que la peur hante les rues
Les loups s’en viennent la nuit venue… alors

Les loups, ououh! ououououh!
Les loups ont regardé vers Paris
De Croatie, de Germanie
Les loups ont regardé vers Paris
Tu peux sourire, charmante Elvire
Les loups regardent vers Paris.

Et v’là qu’il fit un rude hiver
Cent congestions en fait divers
Volets clos, on claquait des dents
Même dans les beaux arrondissements
Et personne n’osait plus le soir
Affronter la neige des boulevards… alors

Des loups ououh! ououououh!
Des loups sont entrés dans Paris
L’un par Issy, l’autre par Ivry
Deux loups sont entrés dans Paris
Ah tu peux rire, charmante Elvire
Deux loups sont entrés dans Paris.

Le premier n’avait plus qu’un il
C’était un vieux mâle de Krivoï
Il installa ses dix femelles
Dans le maigre square de Grenelle
Et nourrit ses deux cents petits
Avec les enfants de Passy… alors

Cent loups, ououh! ououououh!
Cent loups sont entrés dans Paris
Soit par Issy, soit par Ivry
Cent loups sont entrés dans Paris
Cessez de rire, charmante Elvire
Cent loups sont entrés dans Paris.

Le deuxième n’avait que trois pattes
C’était un loup gris des Carpates
Qu’on appelait Carêm’-Prenant
Il fit faire gras à ses enfants
Et leur offrit six ministères
Et tous les gardiens des fourrières… alors

Les loups ououh! ououououh!
Les loups ont envahi Paris
Soit par Issy, soit par Ivry
Les loups ont envahi Paris
Cessez de rire, charmante Elvire
Les loups ont envahi Paris.

Attirés par l’odeur du sang
Il en vint des mille et des cents
Faire carouss’, liesse et bombance
Dans ce foutu pays de France
Jusqu’à c’que les hommes aient retrouvé
L’amour et la fraternité…. alors

Les loups ououh! ououououh!
Les loups sont sortis de Paris
Soit par Issy, soit par Ivry
Les loups sont sortis de Paris
Tu peux sourire, charmante Elvire
Les loups sont sortis de Paris
J’aime ton rire, charmante Elvire
Les loups sont sortis de Paris…

Il est urgent de défendre les indépendants !

22 juin 2010

Qu’il s’agisse d’une librairie, d’un éditeur, d’un café, d’une maison de production, d’une petite salle de spectacles et de concert, d’une galerie, d’un restaurant, l’indépendance, au sens de l’authenticité, de la qualité, de l’unicité, du charme, de l’original, du rare doit être fermement soutenue et défendue.

L’annonce dans une colonne d’un grand quotidien de la vente d’un des plus jolis « bistrots » de Paris « chez Georges » rue du Mail, à 2 pas de la place des Pyramides, rend profondément triste sur l’évolution et forge une vraie détermination à agir!

Les charges, les horaires de travail, les coûts divers tout cela explique ce toboggan vers le standardisé, le formaté, le reproductible et reproduit à l’infini… Mais attention, il y va de l’essentiel de notre capital d’attractivité. Espérons que l’esprit restera, intact et préservé, avec cet art de vivre et de recevoir aussi simple que parfait!

Un lieu, celui ou celle qui l’habite, le fait vivre, fonctionner et rayonner, ceux qui y travaillent, ce sont tous ensemble nos trésors nationaux vivants, qu’il faut savoir défendre, protéger mettre à l’abri des lois implacables du marché…

L’hymne aux indépendants passe par une vraie stratégie d’actions concrètes. Ce n’est d’ailleurs pas un enjeu seulement français mais un défi européen, si nous voulons sérieusement valoriser nos atouts et conserver notre identité d’excellence.

Le guide du « sel européen » doit rassembler et mettre en réseau ces espaces façonnés par le travail de l’homme et l’esprit du temps, par l’histoire et par le charme d’être…

« Forum de Doha:la culture, une priorité stratégique. »

31 mai 2010

C’est une chance magnifique d’intervenir dans le Xè Forum de Doha pour parler de culture, d’attractivité, de développement, de liberté, d’égalité.

Car la dynamique orchestrée magistralement sur la scène internationale par le Qatar et ses dirigeants est véritablement exemplaire.

Lorsque de part le monde, partout dans la planète, la fureur, la violence, la pauvreté, l’oppression, le fanatisme sont des menaces et des réalités, la réponse qui s’impose est celle de la volonté politique, du droit, du respect, de la liberté, de l’égalité, de la fraternité, du développement.

C’est une stratégie, ce n’est ni une habileté conjoncturelle ni une ruse circonstancielle.
Ce doit être une démarche construite et programmée, qui repose sur une vision, mais qui suppose beaucoup d’énergie et de résolution au quotidien.

Considérer que face à la crise la culture est une priorité stratégique ne va pas de soi.

Rares sont les esprits « éclairés » et clairvoyants, tant il est vrai que lorsque l’on parle de recherche on dit facilement que c’est une priorité, mais que l’on dit tout aussi facilement que la culture est une dépense…Les mots ne sont pas neutres…

Et bien, nous devons affirmer ici tous ensemble que le choix de la culture est dans le monde actuel d’une urgence stratégique. C’est l’investissement de l’avenir, au même titre que la recherche, la santé, la technologie.

Je suis heureux de pouvoir mettre en lumière les liens féconds et stratégiques qui existent entre la politique, l’économie et la culture.

Il peut paraître étonnant qu’un ancien Ministre de la culture et de la communication parle attractivité, développement économique, emplois, tourisme, marché, diversité et rayonnement.

C’est pourtant essentiel de changer les regards sur cette réalité des échanges mondiaux.
La culture n’est pas un simple divertissement, un plaisir ou une élégance.

Pour des raisons politiques, c’est un élément essentiel pour garantir la paix, combattre le terrorisme, car il est question de respect, de fierté, d’égalité entre les peuples, les cultures, les religions. De liberté de l’esprit, de la conscience.

Pour des raisons économiques, qui ne voit se bâtir des stratégies fortes et audacieuses de rayonnement et de puissance fondées sur de grands projets culturels et artistiques. Les grands architectes, les collections des musées et des trésors, la création et l’intelligence, toutes les formes du spectacle vivant incarnées dans de prestigieux festivals, sont les piliers du rayonnement d’un pays, d’une culture, d’un peuple. La mondialisation créée aussi une effervescence et une émulation utiles.

Dans la crise boursière et financière actuelle, dont on peut craindre les conséquences globales sur l’économie, la croissance et l’emploi, les projets culturels apparaissent prometteurs pour l’avenir.

Il y a une solidité de l’art qui résiste davantage aux aléas conjoncturels que certaines valeurs boursières !

Où peut-on mieux le dire et le ressentir, qu’ici à Doha, cette capitale qui a ouvert un Musée d’Art Islamique qui est non seulement une merveille, mais un signal mondial de respect pour les trésors de cette immense culture, cette ville phare qui se veut le nouvel eldorado pour le monde de la science, de la recherche, de la santé et des nouvelles technologies.

Sans arrogance, il nous faut reconnaitre qu’il n’y a pas de culture mondiale, une suprématie culturelle absolue d’un monde contre un autre.

C’est le sens de la convention de l’Unesco sur la diversité culturelle que nous avons tous ensemble fait adopter comme un hymne flamboyant à l’égalité des cultures.

Nous devons bâtir des foyers de création, de valorisation du patrimoine, de mise en valeur des uvres d’art des plus anciennes aux plus contemporaines.

Cela concourt à la richesse et à la prospérité.

Cela permet également d’éviter ce fameux « choc des civilisations », en faisant que la fierté d’un peuple aille de pair avec l’emploi, l’activité, le bien-être de chacun.

Tout cela n’est pas chimérique. C’est l’actualité des grands projets que chacun dans son pays a la passion de réaliser.

Le retentissement du Musée d’Art Islamique ici a été mondial. Le talent conjugué de Pei et de Jean-Michel Wilmotte a permis de créer un écrin qui donne au monde à voir de vrais trésors.

Les collections exceptionnelles sont pour le monde musulman le chant de la fierté et de la reconnaissance de l’égale dignité des cultures, des intelligences, des religions. Cela nous éloigne des caricatures et des amalgames entre islam et islamisme, entre humanisme et intégrisme.

De la même manière, je souhaite que l’ouverture aux collections d’Art Islamique du Louvre de la Cour Visconti, rénovée par la création d’un espace contemporain imaginé par Rudy Ricciotti, soit un signal très fort du respect que la France a pour toutes les cultures et les religions du monde.
C’est ce que nous avons voulu faire avec le Musée du Quai Branly à Paris qui présente les chefs d’uvres de toutes les civilisations du monde.

Les phares s’allument, se programment, s’additionnent.

Un grand projet peut être petit par sa taille mais immense dans son rayonnement.

La préservation d’un savoir-faire traditionnel, la protection d’un métier d’art précieux – comment ne pas penser ici à la culture de la perle – la restauration d’un petit lieu au charme puissant, sont des réponses concrètes à la crainte d’un univers uniforme, standardisé et aseptisé.
En ce sens, il s’agit grâce à la culture de créer un sentiment puissant d’égalité.

Certes, il y a les différences de moyens pour investir, pour créer, pour donner à une uvre ou un talent toute sa chance.

Il faut donc dans l’aide au développement ne pas oublier un des engagements que nous avons tous ensemble pris à l’Unesco.

***

L’actualité, dans sa brutalité et sa violence, trouble en permanence nos concitoyens. Au fur et à mesure que les horizons resplendissants d’un univers mondialisé semblent s’ouvrir, le ciel politique en fait s’assombrit, la réalité quotidienne rappelant à chacun la dureté du temps.

Plus l’étranger est proche, plus les frontières s’estompent, plus les marchés et les marques s’universalisent, plus grand est en fait le besoin de s’identifier, de se localiser, de s’appartenir.
De se retrouver, de revivre le rare, l’unique, le beau, l’exceptionnel, le physique, le petit, le proche, le vrai.

L’individu, confronté à des cultures, des religions, des modes de vies qui ne lui sont pas familiers, se sent parfois ignoré, broyé, méprisé. Pour savoir « accueillir » l’autre, quel qu’il soit, il faut être soi-même en situation de rayonnement, de réussite, d’harmonie. Il faut se sentir porter par sa propre dynamique.

Dès lors que s’enclenche la peur de l’autre, s’ouvre la spirale du repli, de la fermeture, du racisme, de la xénophobie.

Il est urgent et impératif de parler de culture à tous les citoyens du monde, à chaque peuple.
Faire de la mise en valeur du patrimoine, de l’accueil à la création contemporaine, de la circulation des uvres et des artistes, de l’éducation artistique de vraies priorités politiques, n’est plus aujourd’hui l’expression nécessaire d’un simple supplément d’âme ou la manifestation élégante de la vie artistique, c’est plus fondamentalement une réponse à l’attente consciente ou inconsciente des peuples.

Célébrer une langue, cultiver une tradition, accueillir l’architecture contemporaine, faire vivre les expressions culturelles nouvelles, honorer le répertoire et la tradition, se projeter dans l’avenir grâce à l’histoire, donner le goût de la découverte et de l’innovation, préserver objets et métiers d’art, s’ouvrir aux cultures urbaines sont autant de projets de réconciliation qui permettent même l’affirmation de notre identité et la reconnaissance de chacun.

Il n’y a pas de contradiction entre le monde des arts et la révolution numérique, pas de conflit entre la dimension spirituelle et l’impératif du progrès social, pas d’opposition véritable entre la singularité d’une langue à protéger et la nécessité de la traduction, qui selon Umberto Eco est « le langage de l’Europe, la langue de l’Universel. » Ce sont des forces qui se nourrissent les unes des autres, dont nous pouvons et devons êtres fiers.

Comment ne pas voir, en outre, que notre attractivité et notre développement économique sont principalement fondés sur notre capital culturel et artistique, sur notre potentiel d’intelligences, de savoirs, de créativité et d’imagination ? Culture et croissance sont une rime riche de sens et de conséquences concrètes pour le citoyen.

Face à l’intégrisme et aux violences, face à l’uniformisation excessive de nos sociétés, le primat de la culture est notre « nouvelle frontière ».

C’est le chant des fiertés, la fécondation des racines par la création, la célébration de nos capacités de rayonnement. C’est aussi le respect dû à chacun, à chaque peuple, à son histoire et à son devenir. C’est l’essence même de la démocratie, de tout projet politique humaniste.

Parler d’attractivité, c’est affirmer une volonté, c’est célébrer la fierté de la main de l’homme, c’est bâtir une stratégie. C’est se sentir héritier proactif, c’est-à-dire artisan de son propre avenir.

Célébrer le patrimoine n’est pas se laisser gagner et envahir par la nostalgie. Ce n’est pas faire un arrêt sur image, se replonger dans le passé qui serait un astre mort, c’est au contraire se projeter dans le futur, en prenant son élan dans le respect de l’Histoire, dans le ressort de l’énergie initiale, dans l’hymne à la création permanente, dans l’affirmation de la diversité comme une chance, une vraie richesse.

Osons dire que ce qu’on appelle familièrement et avec affection les « vieilles pierres » ont l’insolence de la jeunesse, la résistance à l’usure du temps des diamants, le charme des mythes éternels.

Architectes, charpentiers, tailleurs de pierres, paysagistes, doreurs, marbriers, ébénistes, décorateurs, brodeurs, orfèvres, cristalliers, autant de métiers, de vocations, de talents, qui sont l’arc en ciel du patrimoine, de vrais trésors nationaux vivants comme ils sont nommés à juste titre au Japon.

Ce n’est pas une posture rétrograde ou réactionnaire, mais une manifestation d’énergie créatrice que de proclamer avec intensité que les lieux du patrimoine incarnent l’élan de la vie, l’audace de l’imagination, la force du temps pour peu qu’ils soient « habités » par une vision, par un projet, par une générosité humaine, par un appétit d’ouverture, par une soif de découverte.

Nombreux sont les lieux, sur la planète qui attendent en fait d’être aimés, adoptés, réanimés.
Leur sanctuarisation frileuse peut être une sorte de requiem petit bras, de même que leur dénaturation sacrilège peut s’apparenter à un homicide volontaire.

Nous devons être des jardiniers attentifs, scrupuleux, exigeants, passionnés de notre capital historique. Pour le faire vivre, pour le faire irradier et rayonner au maximum de son «être».

Pour le porter au paroxysme de sa puissance originelle.

Y a-t’il de plus grandes audaces que celles qui président à la décision de construire, de créer? Y a-t’il plus grands défis que de faire vivre le passé, en retrouvant ses traces, sa réalité, son histoire authentique, en le restaurant, c’est-à-dire en le respectant sans l’asphyxier?

Sachons rendre hommage à celles et ceux qui nous ont légué ce patrimoine qui fonde aujourd’hui nos espoirs d’attractivité et de rayonnement économiques. Et sachons nous situer au niveau requis d’exigence, qui est cette alchimie complexe de l’hier et de l’aujourd’hui.

Le vrai respect, n’est évidemment pas le mépris ou l’oubli, ce n’est pas non plus la reproduction figée. Le vrai respect c’est le principe vital. C’est une fécondation. C’est une naissance. C’est une renaissance. Nous n’avons tout simplement pas le droit de passer à côté des trésors qui jonchent et pavoisent nos villes. Nous mériterons le qualificatif de « mécréants » si nous trouvons de fallacieux alibis pour justifier notre myopie, notre impuissance et notre lâcheté.

Nous devons tenir un langage de vérité extrêmement convaincu et fort pour que soit davantage reconnue la dimension économique de la culture, du patrimoine, de la création.

Est en jeu d’attirer vers nous les citoyens du monde en quête de cette alliance rare entre le patrimoine et la création, entre l’histoire et le futur, entre le local et l’universel.

La stratégie de puissance détruit, fait table rase du passé, oublie la filiation et la complexité, l’histoire. Elle s’enivre du neuf. Elle reproduit à l’infini au risque de créer la saturation.

La stratégie d’intelligence respecte l’unique, l’original, le traditionnel, l’emblématique, mais l’enrichit pour une sorte d’avidité et de désirs permanents de l’autre, du nouveau, du différent, du provocateur. Le progrès alors est une synthèse, une addition, un élan sans fin, une découverte permanente.

Un lieu qui n’est pas visité vieillit. C’est le regard des visiteurs qui donne de la jeunesse, de la vie, de l’avenir.

Un lieu sans projet généreux dépérit. Il est le gâchis d’une chance possible, d’un accueil, d’une main tendue, d’une aventure partagée. Chacune de nos villes prend des initiatives pour que s’additionnent, sans se contredire en fait, l’attraction des lieux de mémoire et d’histoire et l’effervescence des gestes de créations.

Lieux d’histoire, lieux de création, lieux de respect, lieux de dépassement de soi, lieux de mémoire, lieux d’effervescence, lieux d’harmonie.

***

Il y a une vraie urgence à traiter de la culture au cur des sociétés, et d’en faire une priorité politique. Un axe majeur pour la paix, la prévention des conflits et les progrès de la démocratie.
Nous ne sommes pas ici dans le domaine du loisir intelligent, du supplément d’âme élégant, de l’esthétique. Nous sommes bien au delà du symbolique. Nous devons nous situer de plein pied dans le champ du politique et du stratégique, c’est-à-dire de la volonté et de l’action.

Ce forum réunit dans une même dynamique partagée, dans un élan mobilisateur et fécond, des hommes et des femmes venus du monde entier.

Nous sommes un arc en ciel, fort de nos différences, de notre diversité. Nous, nous avons conscience de cette richesse issue directement de nos singularités, de nos affinités, de nos liens.
Mais la rue ? Mais le peuple ? Mais la jeunesse ?

Il y a un devoir de lucidité que tout humaniste doit avoir, sans peine d’être sourd, aveugle, autiste aux violences du monde.

Il y a une exigence urgente de résultats que tout démocrate doit porter, sous peine de laisser s’accumuler les nuages noirs de la haine et les volcans du terrorisme.

Il y a un impératif vital que tout citoyen humaniste doit savoir accepter comme tel, sous peine, de se laisser submerger par la marée noire des peurs, des rancunes, des racismes et des intolérances .

N’ayons pas le réflexe des élites pour lesquelles « l’autre » est naturellement un « frère », « le différent » évidemment un « enrichissement », « l’ailleurs », sincèrement un « idéal » ».

Ouvrons les yeux sur la fureur du monde, que nous côtoyons tous à des degrés divers, dans chaque quartier, dans nos rues, dans nos immeubles, nos écoles.

Ouvrons nos curs face aux engrenages qui jour après jour créent des fossés, des anathèmes, les nouveaux murs de la haine ordinaire. Mais surtout décidons nous à agir, à nous placer dans l’action, l’immédiat, le proche ; commençons par ce voisinage fécond, magique, porteur d’espoir et de valeur qui se nomme Forum de Doha.

Réagir à temps, c’est fonder la croissance, l’emploi, le progrès sur l’ardeur culturelle, l’exigence artistique.

C’est faire de la dynamique générée par la force de notre patrimoine et de notre culture vivante une chance économique.

Mesurons aussi que c’est un magnifique projet politique.

A l’heure où les risques du terrorisme, du fanatisme, de l’intégrisme enflamment de nombreuses parties du globe, l’affirmation de la culture comme valeur et comme stratégie est une réponse humaniste à cet engrenage de haine qui nous menace. C’est un enjeu de paix.

Respect, égalité, universalité, civilisation autant de maitre-mots qu’il faut graver aux frontons de nos écoles, de nos châteaux, de nos tours, de nos cathédrales, et de nos mosquées et que nous devons fredonner avec entrain dans chaque ville.

C’est peut-être le nouvel Hymne à la Joie qu’il nous appartient à nous d’envoyer comme message au monde. C’est le serment de Doha !

CULTURE AND DEVELOPMENT STRATEGY

31 mai 2010

Discours de Renaud Donnedieu de Vabres,
L’ancien ministre français de la Culture et de la communication
Forum de Doha 10e
Mardi 1er Juin 2010

C’est une magnifique occasion d’être invités à s’adresser au Forum de Doha, pour parler de la culture, l’attrait, le développement, la liberté et l’égalité.
Pour la dynamique – magistralement orchestré sur la scène internationale par le Qatar et ses dirigeants – est véritablement exemplaire.
Alors que partout dans le monde, dans tous les coins de la planète, la fureur, la violence, la pauvreté, l’oppression et le fanatisme sont une menace et une réalité, la réponse qui doit être à venir est celle de la volonté politique, de la loi, du respect, de liberté, de l’égalité, de fraternité, de développement.
C’est une stratégie, il n’est ni un droit découlant de la situation économique, ni une ruse fondée sur les circonstances.
Ceux-ci doivent être soigneusement construites et les mesures envisagées, fondé sur une vision, mais qui exigera beaucoup d’énergie et de résoudre tous les jours.
croire que la culture est une priorité stratégique dans le face à cette crise n’est pas évident.
Ces «éclairés» et des esprits perspicaces sont rares, c’est vrai que quand on parle de recherche, il est facile de dire que c’est une priorité, alors que tout comme avec désinvolture nous disons que la culture est une dépense … Les mots ne sont pas neutres …

Nous devons, par conséquent, tous affirmer ici, ensemble, que choisissant la culture dans le monde d’aujourd’hui est urgent stratégique. C’est un investissement dans l’avenir, de la même manière que la recherche, de soins de santé et de la technologie.

Il me fait grand plaisir d’être en mesure de mettre en évidence les riches, les liens stratégiques qui existent entre la politique, l’économie et la culture.
Il peut sembler surprenant qu’un ancien ministre de la Culture et de la communication devrait parler de l’attrait, le développement économique, l’emploi, le tourisme, le marché, la diversité et l’influence.
Mais il est essentiel que nous changions notre façon de regarder la réalité de ces échanges au niveau mondial.
La culture n’est pas simplement une question de divertissement, de plaisir ou d’élégance.
Pour des raisons politiques, il est un élément essentiel pour assurer la paix et la lutte contre le terrorisme, car c’est une question de respect, de fierté, de l’égalité entre les peuples, les cultures et les religions. Une question de liberté de l’esprit et de conscience.
Qui n’a pas vu – pour des raisons économiques – forte et des stratégies audacieuses d’influence et de puissance fondée sur les grands projets culturels et artistiques? Les grands architectes, les collections des musées et des trésors, la créativité et l’intelligence et toutes les formes de spectacle vivant incarné par festivals prestigieux, tels sont les piliers de l’influence d’un pays, de sa culture, de son peuple. La mondialisation a également produit une effervescence et une émulation utile.

Dans le marché actuel des stocks et la crise financière, dont les conséquences sur l’économie mondiale, la croissance et l’emploi sont redoutables, des projets culturels semblent prometteuses pour l’avenir.
Il ya une force de l’art, qui résiste mieux que l’incertitude économique des valeurs du marché!
Quel meilleur endroit pour l’État ou de se sentir, que ici, à Doha, cette capitale qui a ouvert un musée d’art islamique, qui n’est pas seulement belle, mais un signal dans le monde de respect pour les trésors de cette culture immense, cette ville historique qui serait le nouvel Eldorado pour le monde de la science, la recherche, la santé et les nouvelles technologies.
Avec humilité, nous devons reconnaître qu’il n’y a pas la culture de chacun mondiale, aucune suprématie absolue culturelles d’un monde sur une autre.
Tel est le sens de la Convention de l’UNESCO sur la diversité culturelle dont l’adoption nous avons tous pris en charge comme un hymne vibrant à l’égalité des cultures.
Nous devons bâtir des centres de création, de développement de notre patrimoine, pour renforcer nos uvres les plus anciennes de l’art ainsi que le plus contemporain.
Cela contribue à la richesse et de prospérité.
Il permet également d’éviter le fameux « choc des civilisations», en veillant à ce que l’orgueil d’un peuple va de pair avec l’emploi, des affaires et le bien-être de tous.
Rien de tout cela est fantaisiste. Il est la réalité actuelle dans les grands projets que tout le monde est passionné par la création dans son propre pays.

Les répercussions du Musée d’art islamique ici ont été mondiale. Les talents conjugués de Pei et Jean-Michel Wilmotte a créé une vitrine permettant le monde de voir certains de véritables trésors.
Pour le monde musulman, les collections exceptionnelles donner une voix à la fierté et la reconnaissance de l’égale dignité des cultures, de l’intelligence et des religions. nous éloigne de la caricature et les confusions entre islam et islamisme, entre l’humanisme et de l’intégrisme.
De la même manière, j’espère qu’une fois que la Cour Visconti de l’ à Paris – en cours de rénovation pour créer un espace contemporain conçu par Rudy Ricciotti – s’ouvre à des collections d’art islamique, qu’il enverra un signal très fort au sujet du respect que la France a toutes les cultures et religions à travers le monde.
C’est ce que nous voulions atteindre avec les Musée du Quai Branly qui célèbre toutes les civilisations du monde.
Les balises sont allumées, planifié, construit en place.
Un grand projet peut être de petite taille mais grande d’influence.
La préservation du savoir-faire traditionnel, la protection d’une embarcation de précieux artistique – il est difficile ici de ne pas penser à la culture de perles – la restauration d’une petite place encore fortement de charme, sont des réponses concrètes à la peur d’un monotone, standardisés et aseptisés monde .
En ce sens, il est sur la culture contribue à créer un sentiment puissant de l’égalité.
De toute évidence, il existe différents niveaux de ressources à investir, de créer ou d’offrir un travail ou un talent toutes les chances de réussir.
Ainsi, lorsque nous aidons au développement, nous ne devons jamais oublier l’un des engagements que nous avons tous faite à l’UNESCO.

***

La brutalité et la violence de l’actualité est une préoccupation constante de nos concitoyens. Comme la perspective glorieuse d’un monde globalisé progressivement semblait s’ouvrir, le ciel politique en fait sombre, la réalité quotidienne d’un rappel à tout le monde de la façon dont les temps sont durs.
Les pays étrangers plus devenir, le plus brouillé les frontières deviennent de plus universel et le les marchés et les marques. Ainsi, plus le besoin devient de nous identifier, à notre place et d’appartenir. Pour nous retrouver, et revivre ce qui est rare, unique, magnifique, exceptionnel, physique, petite, étroite, c’est vrai.
Les gens, lorsqu’ils sont confrontés par les cultures, les religions ou modes de vie dont nous ne connaissons pas, parfois, se sentent ignorés, écrasés, méprisés. Afin d’être en mesure de « bienvenue » d’autres, quels qu’ils soient, nous devons être dans une position d’influence, le succès et l’harmonie. Nous avons de se sentir soutenus par le dynamisme de notre propre vie.

A partir du moment que la peur de l’autre est engagé, la spirale de retrait, la fermeture de l’esprit, le racisme et la xénophobie métiers.

Il est urgent et indispensable de parler de la culture à tous les citoyens du monde, à tous les peuples.
Prendre le développement du patrimoine, l’accueil de la création contemporaine, la circulation des artistes et leurs uvres, et de l’éducation artistique dans de véritables priorités politiques, n’est plus l’expression nécessaire d’un supplément d’âme simple ou la démonstration élégante artistique la vie, il est plus fondamentalement une réponse à des gens conscient ou inconscient attentes.
Célébrer une langue, cultiver une tradition, se félicitant de l’architecture contemporaine, offrir de nouvelles expressions culturelles à la vie, honorant le canon et la tradition, de la planification pour l’avenir, avec l’aide de l’histoire, en passant sur un goût pour l’exploration et l’innovation, de préservation des uvres et des pratiques artistiques , et l’ouverture à la culture urbaine sont tous les projets de réconciliation qui nous permettent d’affirmer notre identité et à reconnaître chacun de nous.
Il n’ya aucune contradiction entre le monde de l’art et la révolution numérique, pas de conflit entre la dimension spirituelle et l’impératif du progrès social, pas d’opposition véritable entre la singularité d’une langue à protéger et le besoin de traduction, qui, selon Umberto Eco est «la langue de l’Europe, la langue de l’universel ». Ce sont des forces qui se nourrissent l’une l’autre, que nous pouvons et devons être fiers.
D’ailleurs, comment ne pas voir que notre attractivité et notre développement économique sont principalement fondés sur notre capital culturel et artistique, sur notre potentiel d’intelligence, de connaissances, la créativité et l’imagination? Culture et de la croissance sont une rime riche de sens et les conséquences pour les citoyens.
Face à l’intégrisme et la violence, face à la normalisation excessive dans nos sociétés, la primauté de la culture est notre «nouvelle frontière».
C’est le son de la fierté, la fertilisation des racines à travers la création, la célébration de notre capacité à influencer. Il est également sur le respect dû à chaque personne, à tous les peuples, leur histoire et leur avenir. Telle est l’essence même de la démocratie, de toute politique politique humaniste.

Parlant de l’attractivité, , cela signifie affirmer une volonté, pour célébrer la fierté de la participation de l’homme, la construction d’une stratégie. Il s’agit de se sentir comme un héritier proactive, en d’autres termes l’artisan de son propre avenir.
célébrant le patrimoine ne signifie pas être séduite et envahi par la nostalgie. Cela ne signifie pas en appuyant sur pause, et la plongée dans les étoiles fanées qui est le passé, au lieu cela signifie la planification pour l’avenir, gagner dynamique à partir d’un respect de l’histoire, dans le lecteur tirés de l’énergie initiale, dans l’hymne à la création perpétuelle, et dans l’affirmation de la diversité comme une chance, une richesse véritable.
Osons dire que ce que nous familièrement et affectueusement appeler « vieilles pierres » ont encore l’insolence de la jeunesse, la force de diamants pour résister à l’usure du temps et le charme de mythes éternels.
Architectes, charpentiers, maçons, paysagistes, doreurs, marbriers, ébénistes, décorateurs, brodeurs, les orfèvres et les responsables de cristal, artisanat autant, les vocations et des talents, qui sont arc-en-Patrimoine; réel, trésors vivants nationaux tels qu’ils ont été si dignement intitulé au Japon.
Ce n’est pas un arrière ou réactionnaire posture, mais une démonstration de l’énergie créatrice proclamant avec une intensité que les lieux où le patrimoine se trouve sont l’incarnation de la force de vie, l’audace de l’imagination, la force du temps aussi longtemps car ils sont «habités» par une vision, un projet, la générosité de l’homme, l’appétit pour l’ouverture, ou par une soif d’explorer.
Il existe de nombreux endroits sur cette planète qui n’attendent que d’être aimé, adopté et relancé.
timidement les transformer en réserves apparaît comme un requiem du bout des lèvres, de la même manière que leur altération peut ressembler à un sacrilège assassiner.
Nous devons être attentifs jardiniers , scrupuleux, exigeante et passionnée au sujet de notre capitale historique. Ainsi, nous pouvons lui donner vie, la faire fleurir et émettre au maximum de son «être».
pour le porter à la hauteur de sa puissance originelle.
Y at-il l’audace plus grande que celle qui préside à offrir la décision de construire ou de créer? Y at-il un plus grand défi que d’amener le passé à la vie, de trouver sa trace, sa réalité, sa véritable histoire, et la restauration, c’est-à-dire avec respect et sans l’étouffer?
Faisons en sorte que nous rendons hommage à ces hommes et ces femmes qui nous ont légué ce patrimoine sur lequel sont fondées nos espoirs d’attractivité et d’influence économique. Et faisons en sorte que nous savons à quel point demandent à être, dans cette alchimie complexe entre passé et présent.
Real égard est clairement ni dans le mépris, ni oubli, ni la reproduction stérile. respect réel est le Principe Vitae. Il est la fécondation. C’est la naissance. C’est la renaissance. Nous n’avons tout simplement pas le droit d’ignorer les trésors qui ornent nos villes en si grand nombre. Nous méritent d’être appelés les « infidèles » si nous devions trouver des alibis pour justifier notre fausse myopie, notre impuissance et notre lâcheté.
Nous devons garder à un discours extrêmement robuste et convaincante de la vérité afin d’assurer une plus grande reconnaissance de la dimension économique de la culture, le patrimoine et la création.
Le défi consiste à attirer à nous, citoyens du monde à la recherche d’alliance rare que entre le patrimoine et la création, l’histoire et l’avenir, entre le local et universel.
La stratégie de puissance inférieure ou détruits / strong lingettes> sur le passé, oublie la lignée et de la complexité, même histoire elle-même. Il est ivre de la nouvelle. Il reproduit à l’infini, entraînant un risque de saturation.
La stratégie du respecte l’unique, l’original, le traditionnel et le symbolique, mais elle l’enrichit avec une sorte d’ardeur et de désir perpétuel de l’autre, le nouveau, le différent, celui qui provoque. Le progrès est une combinaison, un ajout, dynamique sans fin et l’exploration continue.
Un lieu qui n’est pas visité, âgés de . Il est aux yeux des visiteurs qui donnent aux jeunes, la vie, un avenir.
Un endroit sans suffisamment whithers projets généreux. Il est une occasion perdue possible pour un accueil, une main tendue, une aventure partagée. Chacun de nos villes prend des initiatives pour accroître, sans contredit, l’attrait des lieux de mémoire et de l’histoire et l’effervescence des gestes créatifs.
Lieux de l’histoire, les lieux de création, lieux de respect, de lieux de réalisation exceptionnelle, des lieux de mémoire, des lieux d’effervescence, les lieux de l’harmonie.

***

Il ya une urgence réelle pour lutter contre la culture au cur des sociétés, et d’en faire une priorité politique. Un vecteur majeur pour la paix, la prévention des conflits et de progrès pour la démocratie.
Ici nous ne sommes pas dans le domaine des loisirs intelligents, de l’élégant supplément d’âme, ou l’esthétique. Nous sommes bien au-delà du symbolique. Nous devons nous placer carrément dans le domaine de la politique et la stratégie, ce qui signifie que de volonté et d’action.
Ce forum rassemble dans la même commune dynamique, avec une énergie enthousiaste et fertile, les hommes et les femmes de partout dans le monde.
Nous sommes un arc en ciel, la force donnée de nos différences, de notre diversité. Nous sommes conscients que cette richesse découle directement de notre singularité, de nos affinités, nos relations.
Qu’en est-il la rue? Qu’en est-il le peuple? Qu’en est-il des jeunes?
Chaque humaniste doit avoir un devoir de lucidité, défaits par être aveugles, sourds ou autistes de la violence dans le monde.
Il ya une nécessité urgente pour les résultats que toute démocratie doit prendre en charge, sous peine de laisser les nuages noirs de la haine et les volcans du terrorisme à s’accumuler.
Il est un impératif vital que tout citoyen humaniste doit être en mesure d’accepter en tant que tels, sous peine de se laisser submerger par la marée noire de craintes, de vieilles rancunes, le racisme et l’intolérance.
Laissez-nous ne partageons pas le réflexe de l’élite pour qui «l’autre» est naturellement un « frère », « les différentes » manifestement « l’enrichissement », « ailleurs » Vu sincèrement que « l’idéal ».
Ouvrons nos yeux à la fureur dans le monde, que nous vivons tous côtés à des degrés divers, dans tous les districts, dans nos rues, dans nos maisons, nos écoles.
Ouvrons nos curs à la face des pièges que chaque jour de créer des lacunes et des anathèmes, les nouveaux murs de la haine ordinaire. Mais surtout, nous allons prendre la décision d’agir, de s’engager dans l’action, l’immédiat, la proximité, nous allons commencer avec cette fertile, magique, l’espérance et la valeur portant quartier qui est le Forum de Doha.
Répondre en temps moyen fonder la croissance, l’emploi et le progrès sur la passion culturelle et artistique exigeant d.
Il s’agit de tourner la dynamique générée par la force de notre patrimoine et notre culture de vie en une opportunité économique.
Prenons ainsi qu’il s’agit d’un magnifique projet politique.
À une époque où les risques de terrorisme, le fanatisme et l’intégrisme sont enflammer de nombreuses régions du globe, l’affirmation de la culture comme une valeur et une stratégie est une réponse humaniste à la trappe la haine qui nous menace. C’est un défi pour la paix.
Respect , l’égalité, l’universalité, la civilisation, tous les mots clés de graver sur les entrées de nos écoles, des châteaux, des tours, des cathédrales et des mosquées, et que nous devrions réciter avec enthousiasme dans toutes les villes.
Il peut être la nouvelle Hymne à la Joie que c’est à nous d’envoyer un message au monde. Il est le Sermon de Doha!

 » Méditerranée : vers un choc ou une alliance des civilisations ?  »

3 mai 2010

Il y a une vraie urgence à traiter de la culture au cur des relations méditerranéennes, et d’en faire une priorité politique. Un axe majeur pour la paix, la prévention des conflits et les progrès de la démocratie.

Nous ne sommes pas ici dans le domaine du loisir intelligent, du supplément d’âme élégant, de l’esthétique. Nous sommes bien au delà du symbolique. Nous devons nous situer de plein pied dans le champ du politique et du stratégique, c’est-à-dire de la volonté et de l’action.

Ce forum réunit dans une même dynamique partagée, dans un élan mobilisateur et fécond, des hommes et des femmes des 2 rives.

Nous sommes un arc en ciel, fort de nos différences, de notre diversité. Nous, nous avons conscience de cette richesse issue directement de nos singularités, de nos affinités, de nos liens.

Mais la rue ? Mais le peuple ? Mais la jeunesse ?

Il y a un devoir de lucidité que tout humaniste doit avoir, sans peine d’être sourd, aveugle, autiste aux violences du monde.

Il y a une exigence urgente de résultats que tout démocrate doit porter, sous peine de laisser s’accumuler les nuages noirs de la haine et les volcans du terrorisme.

Il y a un impératif vital que tout citoyen de la Méditerranée doit savoir accepter comme tel, sous peine, de se laisser submerger par la marée noire des peurs, des rancunes, des racismes et des intolérances .

N’ayons pas le reflexe des élites pour lesquelles « l’autre » est naturellement un « frère », « le différent » évidemment un « enrichissement », « l’ailleurs », sincèrement un « idéal » ».

Ouvrons les yeux sur la fureur du monde, que nous côtoyons tous à des degrés divers, dans chaque quartiers des villes méditerranéennes des 2 rives, dans nos rues, dans nos immeubles, nos écoles.

Ouvrons nos curs face aux engrenages qui jour après jour créent des fossés, des anathèmes, les nouveaux murs de la haine ordinaire. Mais surtout décidons nous à agir, à nous placer dans l’action, l’immédiat, le proche ; commençons par ce voisinage fécond, magique, porteur d’espoir et de valeur qui se nomme bassin méditerranéen.

Les mots sont parfois des armes. Des slogans dangereux. Des poignards mal aiguisés et prêts à être dégainés avec fureur.

La Méditerranée, elle, est un chant, un hymne, un appel, le plus beau des symboles.

Il nous appartient d’en faire un espace de fiertés identifiées, assumées et rayonnantes, d’identités plurielles et réconciliées, de consciences respectées et respectueuses. Une civilisation riche de toutes les couleurs de terre et de peau qu’elle porte comme un étendard lumineux.

Pour reprendre l’expression de Pessoa, une Méditerranée qui « parle d’une seule voix, mais dans toutes ses langues et de toutes ses âmes. »

Mais il se fait tard….

Jamais nos destins n’ont été aussi étroitement mêlés. Et pourtant jamais l’indifférence n’a paru si menaçante. Notre communauté de destin prend forme dans un monde hanté par le vertige du chaos et la multiplication des risques.

Il y a le risque pour chaque Etat, pour chaque individu d’une vulnérabilité plus grande. Les crises financières et les affrontements se représentent en chaîne aux quatre coins de la planète. Chacun de nous semble désormais convoqué qu’il le veuille ou non sur la scène mondiale. Tout résonne et se propage, s’imbrique et communique.

Il y a le risque d’une fuite en avant effrénée. D’une humanité enchaînée à une logique militaire et mercantile, obéissant uniquement aux lois de l’accumulation et du profit, et d’où serait absente la dimension humaine.

Il y a le risque enfin d’un monde muet sur les échanges commerciaux mais composé d’individus repliés sur eux-mêmes, figés par la peur de l’autre et de l’avenir. Au Moyen-âge, l’essor des échanges avait fait des cités italiennes comme Venise des pôles de la culture et de partage entre le monde occidental et le monde arabe. Au XXIe siècle doit-elle conduire à une sécheresse intellectuelle, un refus du mouvement, un rejet de l’autre ?

Tous rassemblés, ces risques menacent le monde d’un éclatement brutal, d’une rupture des liens que nous avons mis des siècles à tisser.

Dans cet environnement global menaçant, il faut affirmer la spécificité, l’exception méditerranéenne. Il faut en fait en prendre conscience et la bâtir résolument.

Le monde méditerranéen n’a pas cessé depuis des siècles d’être écartelé entre l’esprit des croisades et l’esprit du dialogue, il n’a pas cessé d’être tiraillé entre la haine et la fraternité, il n’a pas cessé d’hésiter finalement entre la civilisation et la barbarie.

Le temps est venu de passer du dialogue à la politique.
C’est un effort que chacun doit faire sur lui-même, pour partager l’amour, avec ce cri d’Antigone il y a 2500 ans : « Je suis née pour partager l’amour, non pour partager la haine » sans oublier sa version plus récente « Tout, tout de suite ou alors je refuse… »

Agir, nous mobiliser.

Nous devons, en tant qu’Européens, nous « réapproprier » la Méditerranée.

Certes, les enjeux sont planétaires. Certes la compétence de l’ONU est mondiale et son universalité nécessaire et précieuse.
Mais le conflit israélo-palestinien est à l’agenda politique de l’Europe, de la Méditerranée.

Mare nostrum…

Peut-on accepter le sentiment d’impuissance face à une telle crise majeure et lourde de conséquences. Nous sommes voisins, riverains, frères.

Ayons le courage de reconnaître que les apparences donnent le sentiment que le règlement de cette guerre « éternelle » n’est plus la priorité de certains.

Alors, à nous Européens, à nous tous les Méditerranéens de prendre nos responsabilités.

Cette impuissance est en train d’apparaitre suspecte, injuste, complice des coups de force, des violences et des barbaries qui sont perpétués.

Il faut trouver les moyens d’une paix juste et durable pour chacun.

« Faire le rêve des 2 rives », pour reprendre une expression de Dominique de Villepin, c’est défendre la justice pour tous.

Aujourd’hui, le conflit israélo-palestinien cristallise les frustrations, en donnant des prétextes et des armes aux fanatismes d’où qu’ils viennent.

Pour mettre un terme à la logique de la violence, il ne peut y avoir deux poids deux mesures : il n’y aura de paix que juste, c’est-à-dire reposant sur la coexistence de deux Etats, à l’intérieur de frontières sûres et reconnues, garantissant la sécurité aux Israéliens et offrant aux Palestiniens une vie normale et digne dans un Etat viable. Il n’y aura de paix que fondée sur le règlement de l’ensemble du conflit régional entre Israël et ses voisins.

Force est de constater que les attentats du 11 septembre, d’une monstruosité satanique, ont eu une paradoxale conséquence : fixer d’autres priorités, définir d’autres terrains pour combattre le terrorisme, ce qui renforce le sentiment d’impasse et d’indifférence face au conflit israélo-palestinien.

Or n’oublions pas que le nom de l’Europe, vient de l’autre rive. Il se veut l’écho de celui d’une jeune princesse de Tyr en Phénicie…

Il y a une urgence à nous mobiliser si l’on veut faire autour de la Méditerranée un espace de paix, de prospérité et de culture, mobilisé par un vrai projet politique et humaniste.

Choc ou alliance des civilisations ? Quelles initiatives concrètes ?

Je n’ai pas oublié la feuille de route de notre rencontre.

Moi je ne pouvais pas faire l’impasse sur cette exigence vitale, urgente, prioritaire et préalable à de vraies initiatives culturelles.

La paix israélo-palestinienne conditionne l’avenir de la Méditerranée toute entière.

Et bien au-delà d’ailleurs.

Parler culture, dans ce contexte, est stratégique ; Car le mot « culture » rime avec connaissance, respect, dépassement de soi, altérité, diversité, célébration, identité, fierté.

La culture peut donner une dimension populaire extrêmement vivante à l’aventure méditerranéenne ! Elle peut même réconcilier.

Prenons l’exemple de la très belle initiative diplomatique d’Union pour la Méditerranée. Pour lui donner toute l’ampleur citoyenne qu’elle mérite. Je suggère que soit lancée à la prochaine rencontre au sommet des chefs l’Etat l’idée d’une « Nuit de la culture Méditerranéenne », diffusée en direct sur toutes les chaines des pays européens et méditerranéens des 2 rives. Avec un calendrier précis et des engagements concrets opérationnels.

Cela permettrait de faire émerger le sentiment d’identité mais de fierté partagée, d’histoire patrimoniale exceptionnelle mais d’ouverture sur la création contemporaine dans tous les domaines. Imaginons un « voyage télévisuel », toute une soirée où nous passerions du Caire à Istanbul, de Barcelone à Athènes, de Marseille à Tel-Aviv etc. avec à chaque fois dans un lieu exceptionnel un spectacle musical, chorégraphique, une présentation d’arts plastiques offrant les facettes du répertoire classique et de la création la plus actuelle.

Le peuple méditerranéen découvrirait sa propre unité respectueuse de toutes ses diversités, sa force de rayonnement digne d’une grande civilisation.

Le message culturel et artistique deviendrait immédiatement un symbole très politique.

Face aux risques de marchandisation, d’uniformisation et de disparition, ressentis fortement par les peuples, ce serait en outre un appel et un espoir : Nous avons en nous-mêmes et par nous-mêmes la possibilité de rayonner et de bâtir une stratégie de puissance et de rayonnement culturels aussi fort que le continent américain.

La jeunesse de Tanger peut danser sur Bénabar et celle de Marseille sur celle du groupe de rock palestinien Khalas…

Ce deviendrait une évidence très visible et très joyeuse !

Parler culture, c’est faire des propositions ayant trait à la circulation des idées, des uvres et des artistes, à la mise en valeur des lieux patrimoniaux et contemporains afin d’y programmer des événements de qualité et populaires. C’est s’attacher, avec le courage de la parole, à la connaissance et au respect par chacun des religions, des courants spirituels, des mouvements de pensée qui fleurissent autour du bassin méditerranéen et dans chacune de nos villes.

Innombrables sont les actions entreprises…

Mais elles doivent être davantage soutenues et « revisitées » dans leur dimension politique essentielle.

Umberto Eco disait que « La traduction est le langage de l’Europe ». Ajoutons-y la langue de la Méditerranée…

Il est essentiel que les livres soient plus souvent traduits, que les petits lieux de culture indépendants que sont les librairies, les galeries, les centres d’arts, les cafés, les maisons d’édition, les producteurs, les salles de spectacle et les théâtres soient protégés, mais en réseau et placés sur le devant de l’offre culturelle, artistique et touristique.

Il est primordial que les musiciens, les chanteurs, les danseurs soient les messages populaires de l’âme méditerranéenne.

La Méditerranée est riche à l’infini de toutes ces étoiles vivantes. Encore faut-il qu’elle prenne davantage conscience qu’il s’agit de son avenir, dans cette compétition sauvage qui s’annonce entre les continents.

D’Est en Ouest, du Nord au Sud doivent s’organiser de multiples tournées et diffusions artistiques. Des efforts sont faits. Ils sont insuffisants. L’Europe doit s’engager davantage pour que cette communauté de destin se nourrisse de ses propres talents.

Il nous faut avoir partout l’esprit « Villa Medicis ». Chaque lieu de culture doit s’ouvrir à l’autre rive, chaque expression artistique se confronter à l’au-delà de soi et s’enrichir de l’autre.

C’est la raison pour laquelle nous avons décidé le Louvre d’Abu-Dhabi, qui est un magnifique projet d’alliance des cultures, quoique certains détracteurs étroits d’esprit aient pu en dire…

Quel magnifique message de paix et d’humanisme que l’acquisition et la présentation au public d’une sculpture Christ en croix datant de la Renaissance, première uvre achetée par les Emirats pour constituer la collection permanente. Quelle claque donnée aux septiques parfaitement bornés et totalement racistes et xénophobes !

Oui, il se fait tard…Il est donc urgent de refonder notre destin politique commun sur la jeunesse, le savoir, l’histoire, la fièvre de l’avenir.

Je suggère un livre d’Histoire de la Méditerranée destiné à tous les collégiens de toutes les rives et dans toutes leurs langues.

Certes, le comité de rédaction aura à travailler pour définir une approche « vraie » et pacifiée de toutes les blessures qui ont marqué notre histoire commune. La tâche ne sera pas facile. C’est la raison pour laquelle elle est urgente.

Ne rien farder. Mais regarder devant.

Ne rien oublier. Mais nous concentrer sur l’avenir à construire.

Ne rien censurer. Mais créer l’envie d’agir ensemble.

Nous devons également multiplier, grâce aux nouvelles technologies, les vecteurs de savoir, de connaissance et de culture, d’informations. Je garde une très grande fierté de la création de France 24 !

Bâtissons le portail de la Méditerranée. Cela nous donnera le goût de nous-mêmes, la conscience sans arrogance de notre immense potentiel dans tous les domaines.

Puisse cela être également un message de paix, avec beaucoup d’humilité. Celle que nous devons avoir en raison même des barbaries passées et des atrocités présentes commises dans ces vieux territoires qui ont souvent préféré la haine à l’humanisme, le massacre à la main tendue.

Nous devons enfin enseigner à l’école comme un principe philosophique et culturel le contenu de chacune des grandes religions méditerranéennes. Chrétiens, juifs et musulmans doivent se sentir reliés, proches, frères.

Il ne s’agit pas d’un nouvel esprit de croisade à caractère religieux, mais d’extirper fantasmes et anathèmes souvent alimentés par l’ignorance et la caricature.

Il ne s’agit pas de convertir, mais d’informer.

Il ne s’agit pas de prosélytisme mais d’éducation éclairée.

Il ne s’agit pas d’endoctrinement mais de respect.

En conclusion, pour rendre hommage à son courage, je voudrais citer un extrait du discours du Ministre algérien ici présent Mustapha Cherif devant la jeunesse de l’UOIF rassemblée au Bourget en avril dernier.

Je le fais avec d’autant plus de nostalgie qu’en trois ans et demi lorsque j’étais Ministre de la culture et de la Communication, il n’a jamais été possible que j’aille en Algérie, et que aujourd’hui nous avons devant nous à y fonder une nouvelle alliance, aux contours qui semblent encore malheureusement très incertains…

Parler de la Méditerranée et de la culture, c’est dire la vérité à chacun, dans sa cruauté comme dans sa beauté. Dans son exigence comme dans sa dynamique de responsabilité.

« Les xénophobes et les islamophobes dénient à autrui différent le droit de vivre selon ses convictions et ses multiples appartenances. Vous avez le droit de vivre selon votre foi, de prier ensemble, de préserver le licite, de vous garder de tout ce qui porte atteinte aux nobles valeurs de la religion, de refuser des comportements dégradants contraires aux préceptes islamiques et de garder vivante votre mémoire, tout en vous ouvrant sur le monde…Vous êtes confrontés à des difficiles épreuves. Une question se pose : quelle responsabilité des citoyens occidentaux de confession musulmane face aux défis de notre temps ?
Compte tenu du fait qu’il est attendu des musulmans esprit d’interprétation, d’inventivité et de renouveau, je suis dubitatif et interrogatif au vu de comportements de certains, heureusement minoritaires, qui, par leur repli, nuisent à ce qu’ils voudraient défendre, compliquent la situation des citoyens musulmans en Occident déjà difficile et folklorisent la pratique religieuse. Leurs excès passent à tort pour dictés par le Coran. Ils le font sans doute par naïveté, par ignorance, par inculture, par désespoir, ou parce qu’ils sont manipulés. Il faut qu’ils sachent que lorsqu’ils se replient et pratiquent le rigorisme ils provoquent les incompréhensions et alimentent la peur d’autrui. Il ne faut pas les laisser aggraver leur dissidence morale. En se comportant ainsi, ils prêtent le flanc à la critique et apporte de l’eau au moulin des islamophobes et des xénophobes. Ces comportements et dérives il faut le dire à haute voix et sereinement, car on nous reproche de ne pas assez les dénoncer sont l’anti-islam et portent préjudice à l’image des musulmans. »

« L’islamophobie est ancienne, elle date de quatorze siècles, depuis l’avènement de la troisième religion céleste. Cependant, en ce début du XXIe siècle, elle prend des proportions alarmantes. Le monde actuel est confronté à trois défis :

– Premièrement, la désertion de la religion de la vie, marquée par une marginalisation des principes moraux, éthiques et spirituels.

– Deuxièmement, le recul de la démocratie, marqué par l’injustice, les inégalités et le libéralisme sauvage.

– Troisièmement, la remise en cause de la possibilité de penser, inhibée par la domination de la pensée unique.
Ce sont les trois questions fondamentales qui se posent avec acuité : du sens, de la justice, et du savoir.

Ainsi depuis, la chute du mur de Berlin, en 1989, puis après le 11-septembre 2001, les amalgames, la stigmatisation et la propagande du choc des civilisations occupent le terrain masquant opportunément les injustices et les responsabilités. Cependant, tous les occidentaux, vos concitoyens, ne confondent pas fanatisme et islam, et savent que les civilisations sont hétérogènes et par définition perméables, malgré les contre vérités, les préjugés et le matraquage médiatico-politicien, qui ne sont plus l’apanage du délire des sinistres adeptes d’extrême droite.

Il faut comprendre que les réactions aveugles, les comportements rigoristes, rétrogrades et passéistes soulèvent chez les citoyens des interrogations légitimes et des critiques fondées alors que la cause des exclus, des opprimés ou tout simplement de ceux qui veulent vivre selon leur foi est juste. Dans ce contexte de dialogue de sourds et d’incompréhension, vous, citoyens occidentaux de confession musulmane, ambassadeurs d’une si belle religion et témoins porteurs d’un haut sens de l’humain, avez à engager votre responsabilité individuelle et collective. Vous pouvez contribuer à mettre fin aux faux dilemmes, aux faux débats et aux impasses, dans lesquels, d’un côté, des imposteurs qui usurpent le nom de l’islam, de l’autre, des xénophobes qui contredisent les valeurs des Lumières cherchent à vous entraîner. »

« Non seulement il faut arrêter de vous enfermer dans une position de victimes, vous devez certes être fiers de votre foi, mais il faut cesser d’opposer passé et présent, origine et devenir, dès lors que tant de dimensions et d’enjeux vous lient à vos concitoyens. Tout en sachant que vous avez le droit de faire vivre et de préserver votre singularité. La chance et l’épreuve sont mutuelles : votre occidentalité est une chance et une épreuve et votre islamité est une chance et une épreuve pour tous, c’est l’occasion d’un enrichissement réciproque. »

Cet appel pourrait s’appliquer à chaque religion, tant il est vrai que malheureusement l’intégrisme n’a pas de monopole…

Le débat sur la Méditerranée n’est pas seulement une question de politique étrangère, de relations pacifiques et harmonieuses entre Etat, entre peuples souverains.

C’est une affaire de politique intérieure dans chacun de nos pays. La circulation des personnes, l’amour, les mariages, la jeunesse ont donné à chaque culture, à chaque peuple, son identité méditerranéenne.

Il faut la célébrer et non la renier.

Elle n’est ni un carcan, ni une morale unique, ni un espoir en soi.

C’est une réalité qu’il faut faire vivre comme une chance.

Personne, aucune tradition, aucune culture ne doit se sentir menacée dans son existence même par l’autre.

Chacun doit avoir sa propre fierté, pour qu’il n’y ait pas de différences de dynamique de rayonnement.

Mais chacun doit avoir soif de découvertes, d’inattendu, de novateur.

Chacun doit avoir en raison même de la splendeur passée faim d’avenir.

C’est cela l’esprit de la Méditerranée que nous devons célébrer avec ferveur et passion. En agissant au quotidien avant qu’il ne soit trop tard.

A Buchenwald, respecter les morts c’est se poser la question : qu’aurais-je fait ?

11 avril 2010

Le souvenir doit forger la volonté. Pour aujourd’hui et pour demain.

Le vrai tombeau des morts, en ce 65ème anniversaire de la libération du camp de Buchenwald, c’est le cur des vivants.

Le respect que nous devons à la mémoire des victimes de la barbarie nazie doit s’accompagner d’une question simple et brutale : qu’aurais-je fait ?

On ne partage jamais vraiment la douleur, on ne peut totalement imaginer l’atrocité de la vie quotidienne dans un camp malgré les témoignages poignants des survivants – cette cuillère de soupe que chaque affamé savait donner à plus moribond que lui – on n’arrive qu’ « après » à comprendre l’engrenage implacable de l’horreur voulue, du projet politique abject conduit avec la précision des tenants de l’enfer.

Alors, pour faire silence, pour nous recueillir, pour célébrer l’héroïsme quotidien des détenus des camps, pour faire triompher la vérité sur les falsifications de l’Histoire, pour affronter l’extrémité monstrueuse de l’homme qui rode et guette ses nouvelles proies, à nous les générations de la liberté et de la démocratie – que nous avons reçues en héritage – d’avoir l’exigence permanente de la lucidité crue et du vrai courage : Aurais-je su dire « non », au péril immédiat de mon intérêt voire de ma vie. Aurais-je été résistant ? Aurais-je tenu sous la torture ? Serais-je resté un homme là où l’on voulait faire de moi un animal ? Aurais-je trouvé l’énergie de consacrer le peu de force disponible à aider mon prochain à survivre ou à mourir dans mes bras ?

Ces interpellations ne doivent pas être des gestes à éclipses, des remords cantonnés au temps de la mémoire.

Elles doivent vivre en nous à chaque instant de notre vie.

C’est la seule manière d’apaiser la souffrance des survivants.

Pour qu’ils puissent le moment venu dormir en paix, nous devons leur donner la certitude de notre combativité permanente, de notre inlassable volonté de ne rien tolérer dès que s’enclenche l’engrenage de la barbarie.

Sur nos fronts, mais surtout dans nos crânes le « plus jamais çà » doit être le réflexe que nous offrons aux morts, aux rescapés, à leurs familles.

Il y a le soleil de la mémoire vivante. Il console, il apaise, il réconcilie. Il est le regard de l’amour de son prochain. Il est la fête de la vraie fraternité. Il donne au plus profond de soi la force de l’humanisme. Il est un élan créateur, un dépassement de soi, une nouvelle page d’histoire qu’ensemble nous devons écrire.

Il y a la lumière de la vérité. Elle doit guider nos pas dans la recherche permanente du juste, de l’humain, de l’humaniste, de l’équitable, du civilisé.

Ne rien oublier, mais construire.
Ne rien excuser, mais agir.
Ne rien pardonner, mais nous engager.

C’est pour aujourd’hui notre devoir.

Dans cette capitale européenne de la culture, dans la ville de Goethe et de Schiller, de Bach et de Liszt, au cur de cette Europe qui porte de nouveau comme un magnifique étendard les valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité, devant cette stèle à la mémoire des morts de Buchenwald, devant vous les rescapés et les familles des déportés, affirmer notre détermination à transmettre la mémoire et à construire la paix, la garantir, la protéger est un serment que nous avons l’obligation morale de prendre. Ensemble. Tous ensemble.

Le rappel de l’égale dignité des cultures, des religions, de l’absolue égalité des êtres humains, est le nouveau refrain du chant des partisans que nous devons chanter avec force face aux engrenages des fanatismes, des intégrismes, des racismes qui resurgissent comme d’immondes survivances de la barbarie de la 2ème guerre mondiale.

Dans l’arc en ciel des opinions et des projets politiques que toute grande démocratie a la fierté de garantir comme un bien sacré, l’Europe humaniste et culturelle est une urgence parce qu’elle est une affirmation positive de valeurs, un refus de l’anéantissement de la dignité humaine.

C’est parce que nous avons extirpé cette bête immonde qui a souillé le sol européen que notre responsabilité est lourde, immédiate et sans concession.

Je le dis devant les vétérans américains auxquels nous devons notre liberté pour leur témoigner reconnaissance et affection.

Pour nous aider à faire ce parcours avec l’allégresse et l’énergie nécessaires, je souhaite que Schiller, Victor Hugo et Goethe nous entraînent par leurs mots sur les chemins du respect, de la mémoire, de l’amitié entre les peuples scellée solidement par la réconciliation franco allemande afin que se réalisent leurs prophéties magnifiques.

Hymne à la joie de Schiller :

« Mes amis, cessons nos plaintes !
Qu’un cri joyeux élève aux cieux nos chants
de fêtes et nos accords pieux !
Joie !
Joie ! Belle étincelle des dieux
Fille de l’Élysée,
Nous entrons l’âme enivrée
Dans ton temple glorieux.
Tes charmes relient
Ce que la mode en vain détruit ;
Tous les hommes deviennent frères
(original de Schiller :
Ce que l’épée de la mode sépare;
Les mendiants seront frères avec les princes)
Là où tes douces ailes reposent.
Que celui qui a le bonheur
D’être l’ami d’un ami ;
Que celui qui a conquis une douce femme,
Partage son allégresse !
Oui, et aussi celui qui n’a qu’une âme
À nommer sienne sur la terre !
Et que celui qui n’a jamais connu cela s’éloigne
En pleurant de notre cercle !
Tous les êtres boivent la joie
Aux seins de la nature,
Tous les bons, tous les méchants,
Suivent ses traces de rose.
Elle nous donne les baisers et la vigne,
L’ami, fidèle dans la mort,
La volupté est donnée au ver,
Et le chérubin est devant Dieu.
Heureux, tels les soleils volent
Sur le plan vermeil des cieux,
Courrez, frères, sur votre voie,
Joyeux, comme un héros vers la victoire.
Qu’ils s’enlacent tous les êtres !
Un baiser au monde entier !
Frères, au plus haut des cieux
Doit habiter un père aimé.
Tous les êtres se prosternent ?
Pressens-tu le créateur, Monde ?
Cherche-le au-dessus des cieux d’étoiles !
Au-dessus des étoiles il doit habiter.
Joie ! Belle étincelle des dieux
Fille de l’Élysée,
Soyez unis êtres par million !
Qu’un seul baiser enlace l’univers ! »

Discours du congrès de la paix prononcé par Victor Hugo en 1849

« Un jour viendra où les armes vous tomberont des mains, à vous aussi ! Un jour viendra où la guerre paraîtra aussi absurde et sera aussi impossible entre Paris et Londres, entre Pétersbourg et Berlin, entre Vienne et Turin, qu’elle serait impossible et qu’elle paraîtrait absurde aujourd’hui entre Rouen et Amiens, entre Boston et Philadelphie. Un jour viendra où vous France, vous Russie, vous Italie, vous Angleterre, vous Allemagne, vous toutes, nations du continent, sans perdre vos qualités distinctes et votre glorieuse individualité, vous vous fondrez étroitement dans une unité supérieure, et vous constituerez la fraternité européenne, absolument comme la Normandie, la Bretagne, la Bourgogne, la Lorraine, l’Alsace, toutes nos provinces, se sont fondues dans la France. Un jour viendra où il n’y aura plus d’autres champs de bataille que les marchés s’ouvrant au commerce et les esprits s’ouvrant aux idées. Un jour viendra où les boulets et les bombes seront remplacés par les votes, par le suffrage universel des peuples, par le vénérable arbitrage d’un grand Sénat souverain qui sera à l’Europe ce que le parlement est à l’Angleterre, ce que la Diète est à l’Allemagne, ce que l’Assemblée législative est à la France ! (Applaudissements.)
Un jour viendra où l’on montrera un canon dans les musées comme on y montre aujourd’hui un instrument de torture, en s’étonnant que cela ait pu être ! (Rires et bravos.) Un jour viendra où l’on verra ces deux groupes immenses, les Etats-Unis d’Amérique, les Etats-Unis d’Europe (Applaudissements), placés en face l’un de l’autre, se tendant la main par-dessus les mers, échangeant leurs produits, leur commerce, leur industrie, leurs arts, leurs génies, défrichant le globe, colonisant les déserts, améliorant la création sous le regard du Créateur, et combinant ensemble, pour en tirer le bien-être de tous, ces deux forces infinies, la fraternité des hommes et la puissance de Dieu !(Longs applaudissements.)
Et ce jour-là, il ne faudra pas quatre cents ans pour l’amener, car nous vivons dans un temps rapide, nous vivons dans le courant d’événements et d’idées le plus impétueux qui ait encore entraîné les peuples, et, à l’époque où nous sommes, une année fait parfois l’ouvrage d’un siècle.
Et Français, Anglais, Belges, Allemands, Russes, Slaves, Européens, Américains, qu’avons-nous à faire pour arriver le plus tôt possible à ce grand jour ? Nous aimer. »

Dans cette forêt de hêtres, ce Buchenwald devenu par la faute de l’homme le siège de l’enfer le plus monstrueux, puissions nous faire nôtre avec allégresse et volonté ce vers magnifique de Goethe « Kennst du das land wo die zitronen blühen ? »

Vive notre mémoire active ! Vive l’amitié franco-allemande ! Vive l’Europe de la paix et de la fraternité ! Nous vous le devons…

Le peuple, le Président et la meute…

31 mars 2010

Les lendemains d’échecs électoraux sont toujours l’occasion d’une valse politique à 3 temps, le peuple, le Président et la meute…

Je trouve généralement beaux et attachants les chiens de chasse à courre. En tout cas élégants et racés.

Le spectacle de certains dans la majorité présidentielle s’apparente davantage aux marécages et aux bas-fonds qu’aux allées majestueuses de nos forêts où gambadent de très beaux animaux. Il y a parfois une atmosphère de meute affamée qui provoque un vrai dégoût.

La précipitation pour se démarquer, se déclarer, se diviser est pitoyable.

Certes, lorsque le peuple s’est exprimé, il faut étudier avec attention le sens de son choix. Et tirer d’utiles conséquences. Vive la liberté d’expression! Vive la proposition! Mais non aux règlements de compte suicidaires!

Les Français ne nous demandent pas de nombrilisme électoraliste prématuré pour l’heure. Les pré-positionnements tactiques peuvent continuer d’éloigner les citoyens de leurs élus. Je ne parlerai jamais de classe politique … Même si parfois certains jeux politiciens donnent l’image d’un ghetto, d’un huis clos monstrueux.

Ce qui importe aux Français ce sont les résultats concrets, l’effectivité des conséquences des réformes, la sincérité et l’ardeur des acteurs publics.

Le seul critère qui vaille pour sélectionner les équipes c’est l’engagement, le courage, l’énergie, la loyauté, l’activisme. Ce n’est ni l’origine politique, ni le nuancier des sensibilités, ni la ruse ou l’habilité factice. Ni la prétention à occuper d’ultérieures fonctions, même si chaque ambition devient le jour venu légitime.

L’urgent, c’est l’unité dans la diversité de la majorité présidentielle.

L’impératif, c’est la dynamique de l’action.

L’essentiel, c’est la vraie synergie entre tous les acteurs, sans perte d’énergie en ligne…

Le vital, c’est le refus de la démagogie, le courage de la vérité, la force d’être totalement dans le réel, car la réalité que nous devons transformer c’est celle de la vie quotidienne des Français!