Imprimer cet article - Envoyer à un ami

Pour l’Europe, c’est triste de devoir penser que le référendum est un risque…

Le traité simplifié sur les institutions de l’Union Européenne est un magnifique pas en avant, qui a permis de sortir de la crise née du rejet par le peuple en France et aux Pays Bas du projet de Constitution Européenne.

L’Europe va pouvoir s’incarner d’avantage, agir plus efficacement et plus lisiblement sur la scène internationale, prendre des décisions de façon plus opérationnelle qu’aujourd’hui. Certains symboles sont tristement sacrifiés, mais l’essentiel est préservé. Bref, il s’agit d’un progrès sans révolution ! Un point d’équilibre à partir duquel il est possible de rassembler le plus grand nombre.

Le projet politique européen doit devenir authentiquement populaire pour bénéficier durablement du soutien démocratique majoritaire. Et là le réalisme nous conduit à penser qu’il y a un vaste chemin à parcourir !

L’argument de la paix, garantie par l’Europe depuis plus de 60 ans, semble ne plus « marcher », alors que c’est évidement un acquis précieux. Avoir aujourd’hui l’impression qu’elle est « naturelle », « garantie », gravée sur les frontons est en soi une victoire incroyable, dès lors que l’on se souvient des barbaries qui ont souillé le sol européen à deux reprises au 20è siècle.

L’argument de l’emploi, de la croissance, de la facilité des échanges liée à l’euro se heurte bien sûr aux statistiques du chômage, aux questions du pouvoir d’achat, à l’inflation liée à l’euro.

L’argument de la diversité protégée par l’Europe semble contredit par la marchandisation de nos sociétés, par la mondialisation destructrice des identités, par les délocalisations liées à l’émergence des pays en développement, par le tumulte des cultures et des religions qui bousculent les racines et les certitudes.

Bref, il faut convaincre de la pertinence du projet européen. Nous nous étions accrochés à la réussite d’Airbus et de l’A380 comme la preuve d’un succès industriel éclatant, jusqu’à ce que les aléas de tout projet de cette envergure ne nous contraignent à plus d’humilité.

Alors, franchissons l’étape institutionnelle avec conviction mais modestie. C’est un instrument nécessaire pour que la mécanique de la prise de décision soit plus opérationnelle et plus efficace. Rien de plus, rien de moins.

La ratification par le Parlement ne prive pas le peuple d’un pouvoir décisif dans une matière où il n’y a pas de changement radical.

Rappelons ici que les futurs élargissements, qui eux portent sur l’essence même du projet européen, relèvent du référendum. La constitution française a été expressément révisée pour la garantir et nul n’envisage de remettre cela en cause.

Ainsi, si l’Europe s’engageait dans la voie de l’adhésion de la Turquie, il est du pouvoir du peuple français de dire non, ce qui bloquerait le processus, l’unanimité étant en la matière requise.

Espérons qu’un jour prochain, lorsque les institutions européennes auront créé de vrais résultats tangibles aux yeux de nos concitoyens, un bon sondage sur l’Europe, comme celui publié par « Aujourd’hui » montrant que 68% des Français voteraient oui à un référendum sur le traité simplifié, serait confirmé quelques semaines après par les urnes. Notre dernière expérience a été de ce point de vue cuisante. La retenter serait malheureusement dangereuse pour notre idéal européen. C’est un constat lucide, qui doit conduire à encore plus de pédagogie européenne. Sans incantation, sans tabou, mais avec foi.

3 Réponses à “Pour l’Europe, c’est triste de devoir penser que le référendum est un risque…”

  1. Nemrod a écrit:

    Enfin nous sommes sortis de la situation de blocage créée par les non français et néerlandais au référendum. Le traité institutionnel doit maintenant être ratifié par les 27, et ensuite la mécanique européenne pourra se remettre en marche.

    Mais LA QUESTION DU SENS reste posée. Europe politique et/ ou marché unifié ? Europe des nations ou Europe fédérale ? Elargissement ou approfondissement ? Libre-échange ou modèle social européen ? Ouverture ou protection ?

    Dans une interview au Point cette semaine à l’occasion de son autobiographie (« Une vie » Stock), Simone Veil dit : « On pense mondialisation, on surfe sur Internet mais en même temps on ressent un besoin fort d’identité, de proximité. En 1979, quand j’ai été élue au Parlement européen, je pensais encore qu’on évoluerait vers un système de type fédéral. Aujourd’hui, je ne crois plus que le cadre national puisse être dépassé. L’Union Européenne de demain ressemblera moins à un édifice monolithique qu’à un emboîtement de poupées russes. »

    Seul le sens permettra de réconcilier durablement l’Europe et les opinions publiques et poursuivre sa construction. Cette construction originale doit conjuguer identité et globalisation, compétitivité économique et modèle social, dialogue entre les civilisations et respect des droits de l’homme.

    L’Europe doit aussi prendre en compte rapidement le besoin de protection ressenti face à la mondialisation, face à des économies dont la compétitivité s’appuie fortement sur des monnaies sous-évaluées, des systèmes sociaux insuffisants et le destruction de l’environnement par le pillage des ressources et la pollution atmosphérique. Les entreprises européennes, soumises à des contraintes fortes en matière sociale, et qui le seront de plus en plus et à juste titre en matière environnementales, ne sauraient être durablement compétitives face à celles qui s’en affranchissent et dont les produits franchissement facilement les frontières de l’Union, favorisées par une monnaie sous-évaluée. Ce n’est pas du protectionnisme, c’est une question de réciprocité.

  2. Catadioptre a écrit:

    C’est marrant comme notre Président de la République tient compte du résultat du référendum : la France et la Hollande ont dit non. Pas de problème ! On reprend le même texte, on le dépoussière un peu et on l’intitule « traité simplifié » et zou ! on le fait voter par le Parlement. Mais surtout pas par le peuple… Ah ben non, il ne comprend rien, le peuple ! Alors que les parlementaires, eux, c’est différent.

    Alors pour plaire à tout le monde, on a modifié le texte : pour plaire aux Anglais, le ministre des Affiares étrangères ne s’appelle plus « ministre » mais « haut représentant de l’Union » ; pour plaire aux Hollandais, tous les symboles qui pouvaient faire penser que l’Europe devenait un super Etat (drapeau, hymne, devise) ont été supprimés ; pour calmer les antilibéraux « la concurrence libre et non faussée » (la mise à bas des services publics) se retrouve plus discrètement dans un protocole annexé…

    Le père de la Constitution, Giscard, avait lui même expliqué qu’avec « quelques changements cosmétiques » elle serait « plus facile à avaler »… Et tout ça, évidemment, sera passé en force et en vitesse pour court-circuiter les opposants (dont les socialistes complètement atomisés).

    On avait cru qu’il n’y avait pas de plan B, alors qu’il suffisait simplement de s’asseoir sur le vote démocratique du 29 mai 2005… ça doit être ça la droite décomplexée…

  3. christian a écrit:

    suis d’accord avec Catadioptre.
    Comme il s’agit de remplasser un texte refusé par référendum il faut refaire passer ce texte devant les français.

Laisser une réponse