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« Arrête de parler de culture » !…

Posted By admin2011 On 22 octobre 2007 @ 13:43 In Blog | 20 Comments

A de très nombreuses reprises, certains autour de moi à Tours m’ont amicalement lancé en guise de conseil stratégique pour les prochaines municipales : « arrête de parler de culture, parle plutôt de l’emploi et du développement économique » !

Je ne méconnais naturellement pas l’urgence à faire baisser le chômage, comme l’impérieuse nécessité d’améliorer le pouvoir d’achat de nos concitoyens. Je mesure également parfaitement la précarité de nombreuses disciplines artistiques, et le fait que la stabilité de l’emploi n’y soit malheureusement qu’un leurre en raison même des rythmes de la création, de la répétition et de la production. Mais je sais également qu’une ville ou un pays, dans le contexte actuel de la mondialisation, sans projet culturel fort est voué à la perte d’influence, et donc à l’échec ou au ralentissement économique.

Face à l’inquiétude persistante liée à la recherche d’emploi et à l’impatience sur ce sujet que je ressens chez mes concitoyens, nous devons rechercher toutes les pistes pour favoriser la croissance, le développement, l’activité.

Que de chemin à parcourir pour faire comprendre que pour une ville comme pour notre pays la culture n’est pas seulement un art de vivre, une respiration et une liberté personnelles, mais une source considérable de richesses, d’emplois, d’activités professionnelles, d’attractivité !

Nous avons un capital entre les mains lié à notre capacité de création et d’imagination et à notre patrimoine tout à fait considérable. C’est essentiel pour l’emploi si on sait avec volonté et résolution valoriser nos atouts, à commencer par la reconnaissance des métiers artistiques dans leur infinie variété. Avec l’objectif d’éviter les délocalisations pour relocaliser, créer de nouveaux emplois et éviter la destruction d’anciens métiers.

Le défi c’est de réussir à parler économie, finances, profession, formation dans le champ culturel et dans celui de la communication sans pour autant gommer l’aspect immatériel de l’acte culturel, sans brutaliser toute la dimension spirituelle et libre de la création artistique.

Le champ des possibles est infini. La diversité des lieux et des initiatives est essentielle. A Tours comme en France, il y a place pour l’acte gratuit, loin de tout aspect marchand, comme peuvent également rayonner et créer de la richesse un lieu phare, un spectacle fort, un festival rayonnant.

Les fêtes de la Loire à Orléans ont rassemblé près de 500 000 personnes. Les quais de la Loire peuvent avoir une magie exceptionnelle pour peu qu’on s’en donne les moyens… Pourquoi pas chez nous ? …

C’est une offre globale, large, riche de sa diversité qu’il faut générer. C’est essentiel pour la vie quotidienne de chaque habitant, c’est indispensable pour attirer de nombreux touristes qui viennent en Touraine, mais ne passent ou ne restent pas assez à Tours.

Alors, parlons des enjeux avec réalisme et énergie.

Si on ne bouge pas, « ça » se passera ailleurs. Les mesures qu’en son temps j’ai prises pour le cinéma, la production audiovisuelle, les jeux vidéo, le marché de l’art, ont permis de créer ou de conserver de nombreux emplois.

Les nouvelles technologies doivent pouvoir être des chances tant la nécessité des contenus est désormais vitale, pour peu qu’on aide un nouveau modèle économique à émerger, où le payant et le gratuit, l’unitaire et le forfaitaire réussissent à se concilier.

Chaque lieu peut être une chance. Doit l’être. Ouverture des portes, décloisonnement, interdisciplinarité, accueil, valorisation des indépendants, mise en réseau, accueil le soir, autant de maîtres mots qui ont des conséquences très concrètes. Est-on de ce point de vue au maximum du possible à Tours ? …

La réussite récente au Cloître de la Psalette des créateurs prouve qu’il y a un public, du désir, une curiosité.

Alors, pour parvenir à cette réconciliation entre culture et emploi, création et activité, sans tomber dans l’écueil du tout marchand, de l’uniformisation, de la standardisation et du nivellement destructeur des identités, il faut comme toujours que se rencontrent les acteurs concernés.

La parole en l’occurrence est une palabre utile.

J’ai à de nombreuses reprises évoqué le « Davos de la Culture », c’est-à-dire la réunion libre du monde politique, économique et culturel.

Non pour se confondre, s’amalgamer, s’inféoder. Bien au contraire pour se différencier dans une synergie, dans une stratégie ouverte et libre.

Comment ne pas voir pour la France qu’il s’agit de l’avenir, des métiers de l’intelligence, de la valorisation de nos atouts pérennes ?

Pourquoi ne pas l’organiser en avant coureur à la Grange de Meslay ?

Au bout du compte, on me dira peut-être un jour : parler de culture, c’est vital. Aussi bien pour l’épanouissement individuel que pour l’emploi.

Il y a beaucoup d’esprits à convaincre et beaucoup de résistances à vaincre… C’est compréhensible, tant la culture a longtemps été perçue comme une sorte de fin de discours…


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