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Hommage à l'action bénévole des Associations d'amis des musées

Mesdames et Messieurs les Présidents et Présidentes des associations
d'amis des musées,

Mesdames et Messieurs les Conservateurs des musées,

Mesdames, Messieurs, Chers Amis des Musées,

Je suis très heureux de vous accueillir ce soir rue de Valois, ce qui est, je
crois, une première, pour vous témoigner toute mon admiration pour votre
énergie et votre dévouement, et ma reconnaissance la plus profonde.

Vous
êtes les partenaires précieux et essentiels de la vie des arts et du
patrimoine de notre pays, auxquels vous apportez un rayonnement qu'on
ne peut atteindre par des moyens purement institutionnels ou budgétaires.

Vous participez activement à la vie de nos musées, par l'enrichissement de
leurs collections, ainsi que par des actions parfois plus confidentielles, mais
tout aussi importantes, d'accueil des publics, de médiation et d'éducation
populaire.

La Fédération Française des amis de musées, dont je tiens à saluer le
Président Jean Michel Raingeard, Olivier de Rohan, administrateur et
membre du bureau, et tous les membres du conseil d'administration,
regroupe aujourd'hui plus de 300 membres. Elle a fêté en 2005 son
trentième anniversaire.

Cela fait donc plus de trente ans que les Amis des musées accompagnent
les institutions dans l'exercice de leurs nobles missions. Trente ans
d'engagement, de générosité, de temps et d'énergie offerts à notre vie
culturelle.

Grâce à vous, nos collections nationales s'enrichissent chaque année de
nouvelles oeuvres majeures. Ces donations ou ces acquisitions, loin de
profiter aux seuls musées nationaux, bénéficient également aux musées en
région. Je ne peux en dresser aujourd'hui la liste exhaustive, qui serait si
longue, si riche ; permettez-moi cependant de citer quelques exemples
révélateurs de votre grande générosité. L'acquisition, pour le musée du
Louvre, de dessins de Watteau ; les quatre chaises provenant de
l'appartement de la comtesse du Barry, pour le château de Versailles ; des
oeuvres remarquables (des études de vitrail, des peintures et des
gravures), pour le musée national du Moyen Âge ; ou encore la donation
des amis du musée d'Ecouen d'un ensemble magnifique de 153 gravures
des XVIe et XVIIe siècles.

Les Amis du musée d'art moderne de Troyes ont permis, depuis dix ans,
l'acquisition de plus de 25 oeuvres d'art, et notamment un bronze d'Henri
Laurens, en 2001.

Le mécénat des Amis du musée de Grenoble a, lui, permis l'entrée dans
les collections de l'oeuvre Pintura Madi de Rhod Rothfuss, première
oeuvre dans un musée français de l'un des maîtres de l'école sudaméricaine
du tournant du XXe siècle.

Je pourrais citer encore le tableau de Paul Huet, acquis pour le musée
des beaux arts de Caen, ou ce portrait de fillette du XVIe siècle, pour le
futur musée de la dentelle de Retournac.

Je tiens à saluer aujourd'hui l'action de ce vaste réseau de générosité et
d'engagement, de passion, également, qui permet à nos musées, sur tout
le territoire, d'enrichir chaque année leurs collections, mais aussi d'ouvrir
leurs portes à un public plus nombreux et plus divers. C'est là, je le sais,
une dimension de votre action à laquelle vous êtes particulièrement
attachés.

Les exemples d'actions menées par les amis de musées en matière de
développement des publics ne manquent pas, mais je tiens à souligner, et
à saluer, plus particulièrement, l'implication des Amis de musées pour la
Nuit des musées, qui a participé au succès de cette opération que je suis
fier d'avoir lancé en mars 2005 et leur mobilisation pour défendre la
gratuité, le premier dimanche de chaque mois, dans les musées en
régions à l'instar des musées nationaux.

Permettez-moi de saluer également, à titre d'exemples, les actions
menées par les amis du musée de Mâcon à l'attention des foyers ruraux,
celles des amis du musée de Montpellier envers les publics les moins
familiers des musées, l'ouverture aux jeunes amis du musée du château
de Pau, ou encore les relations nouées par le musée des Beaux-Arts de
Caen avec le mouvement Aide à Toute Détresse quart-monde.

Enfin, en cette année où elle fête son 100e anniversaire, je souhaite
rendre un hommage tout particulier à l'action exemplaire de la
prestigieuse la Société des amis de Versailles que préside, avec la
passion et le dynamisme qu'on lui connaît, M. Olivier de Rohan. Au
château et au domaine, elle apporte un concours essentiel en matière de
levée de fonds pour le financement des acquisitions et des restaurations.

Je n'oublie pas en effet le rôle qu'elle a tenu dans le sauvetage de
Versailles grâce au mécénat de John D. Rockfeller. De même, elle
contribue très largement à la découverte et au rayonnement de ce fleuron
de notre patrimoine, grâce au travail désintéressé de ses membres et de
ses bénévoles, qui chaque année accueillent plus de 7000 personnes au
cours des visites, des conférences, des voyages et des excursions qu'elle
organise.

Je salue l'ensemble de vos actions, et je souhaite que vos brillantes
expériences, à tous, se renforcent, et qu'elles fédèrent de nouvelles
énergies et de nouvelles volontés, en concertation avec les équipes de
médiation des services de publics des musées de France, et avec trois
priorités : le jeune public, l'accessibilité des personnes handicapées,
l'ouverture à l'Europe et le rayonnement international.

Je me réjouis que votre Fédération ait créé une " filiale " européenne.
Vous savez combien j'attache d'importance à la construction de l'Europe
de la culture, et un projet comme le vôtre apporte une pierre solide à cet édifice. Vous participez activement, également, aux travaux de la
Fédération mondiale des amis des musées.

Pour toutes les raisons que je viens d'évoquer, et qui démontrent, s'il en
fallait une nouvelle preuve, l'apport essentiel de votre engagement, je
souhaite que vos actions soient mieux reconnues, et mieux valorisées.

Permettez-moi de saisir cette occasion, cher Jean-Michel Raingeard, pour
répondre à certaines inquiétudes, exprimées ça et là, à propos du
rayonnement international de nos musées, mais aussi d'un prétendu
désengagement de l'Etat, inquiétudes récemment attisées par certaines
interprétations du rapport de MM. Jean-Pierre Jouyet et Maurice Lévy sur
l'économie de l'immatériel. Tout d'abord, je tiens à dire que les
propositions et les analyses contenues dans ce rapport n'engagent que
leurs auteurs. Elles ne sont pas celles de ce gouvernement et de cette
majorité. Elles ne sont pas les miennes. Il n'est pas question, en
particulier, de revenir sur l'inaliénabilité des oeuvres appartenant au
patrimoine de l'Etat, de la nation. Mais de grâce, n'opposons pas, de
façon manichéenne et réductrice, l'aspect symbolique du patrimoine, d'un
côté, qui prend en compte le sens et la valeur sociale, démocratique des
oeuvres, et de l'autre côté, son aspect " public ", touristique, économique,
de la culture.

Passons sur l'aspect caricatural de cette opposition, démentie par votre
action quotidienne, comme par celle de tous ceux qui ont à coeur de
décloisonner et d'ouvrir l'univers des musées. C'est en effet un discours
que l'on entend parfois de la bouche des quelques rares adversaires du
mécénat, et de toute forme de partenariat et d'ouverture entre les
institutions publiques et la société civile, ouverture que vous incarnez tous
ici, de façon éminente.

Passons également sur mon opposition la plus absolue, la plus claire et la
plus nette à toute entorse au sacro-saint principe de l'inaliénabilité de nos
collections publiques, que j'ai exprimée à de nombreuses reprises, mais
aussi sur mon engagement soutenu, et constant, depuis mon arrivée rue
de Valois, pour faire à la culture, et aux oeuvres, une place à part dans le
droit international, une place dégagée de toutes les " pressions
mercantiles ". Passons sur son succès, avec la signature, puis la mise en
oeuvre de la convention sur la diversité culturelle, à l'UNESCO, qui inscrit,
une fois pour toutes, dans le droit international, le principe selon lequel les
biens et les services culturels, les oeuvres d'art et de l'esprit, ne sont pas
des marchandises, et qui entrera en vigueur le 18 mars.

Passons enfin sur l'augmentation du budget de la culture qui a été, sous
cette législature, et avec cette majorité présidentielle, deux fois supérieure
à celle de la période précédente, et qui doit, une fois pour toute, exorciser
le spectre, le fantasme, la vieille antienne du prétendu désengagement de
l'État. L'Etat ne se désengage pas. Mais il est pleinement conscient du
capital d'avenir qu'il a entre les mains.

Tel est le sens du projet du Louvre Abou Dabi, musée universel, pour
lequel j'ai signé, mardi dernier, au nom du gouvernement français, un
accord historique de coopération culturelle avec les Emirats Arabe Unis.
Quel plus beau symbole que ce projet de musée à vocation universelle,
qui contribuera à la compréhension mutuelle, au dialogue et à l'amitié de
deux pays, de deux civilisations, dont il sera à la fois le témoin et le
carrefour ?

Les objectifs culturels resteront au coeur de la finalité de ce musée. Son
programme scientifique et culturel, comme sa réalisation architecturale,
confiée à Jean Nouvel, répondront aux critères les plus exigeants, critères
scientifiques, artistiques techniques, déontologiques et éthiques, qui ont toujours été ceux de la France ? En ce qui concerne les oeuvres, auxquels
nous sommes tous, bien évidemment attachés, faisons confiance aux
conservateurs et historiens d'art français, qui définiront le projet
scientifique, et dont l'excellence, l'expertise et la déontologie sont une
référence inébranlable. Faisons-leur confiance à Abou Dabi comme nous
leur faisons confiance au sein de nos frontières.

Devons-nous rougir des retombées financières importantes de ce projet ?

Devons-nous rougir de la chance qu'elles représentent, non pas
seulement pour le musée du Louvre, mais pour tous les musées de
France, sur notre territoire, qui se porteront volontaires pour participer à
cette belle aventure, à ce magnifique projet ?

Je ne le crois pas, comme je ne crois pas que défendre la création d'un
grand musée du XXIe siècle, amené à devenir une référence scientifique
et culturelle, sur la base du savoir-faire, de l'expertise et du rayonnement
de notre pays, pour les institutions muséales du monde entier.

Permettez-moi de citer une phrase qui exprime la pensée profonde de
celui qui fut le premier ministre de la Culture, auquel je suis fier d'avoir
rendu hommage, ici même, le 23 novembre dernier, à l'occasion du 30e
anniversaire de sa mort, parce qu'il continue à inspirer mon action : " La
France n'a jamais été aussi grande que lorsqu'elle l'est pour les autres. "

Je vous remercie.

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