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Remise des insignes de Chevalier dans l’ordre national du Mérite à Gérard Bourgeois

Cher Gérard Bourgeois,

Je suis très heureux de vous accueillir ce soir rue de Valois pour
honorer en vous un compositeur mythique, qui a écrit parmi les plus
belles pages de la chanson française. Nos plus grands interprètes ont
trouvé en vous, plus qu’un auteur, un partenaire fidèle, talentueux,
prolifique et éclectique.

C’est à une carrière d’ingénieur que vous vous destinez tout d’abord,
lorsque, votre baccalauréat en poche, vous bûchez sur les bancs d’une
classe préparatoire scientifique. Mais votre imagination vogue déjà vers
d’autres horizons et votre fibre artistique vous fait rêver à l’écriture de
chansons. Votre père, qui travaille alors à Pathé Cinéma, entend parler
d’un disque que souhaite enregistrer Brigitte Bardot. Il vous défie
d’arrêter vos études, pour faire chanter la moue la plus célèbre de
l’époque.

Doux rêve qui vous berce d’illusion pendant quelques mois, jusqu’à ce
que vous rencontriez, totalement par hasard, chez une de vos amies,
un certain Jean-Max Rivière, ami d’enfance de l’actrice légendaire, qui
travaille sur le projet. Qui peut alors se douter que naît alors, pendant
cette surboum, le tandem d’auteur-compositeur parmi les plus célèbres
de la seconde moitié du siècle ?

Et pourtant, le lendemain même, vous rejoignez Jean-Max Rivière, au
studio Waker, place de Clichy, où vous écrivez, la même journée, C’est
rigolo et La Madrague, tube planétaire, souvent appelé Sur la plage
abandonnée, qui a enflammé la France et le monde entier, en restant
par exemple longtemps numéro un au Japon.

Tout démarre alors très vite pour vous : ces deux premières chansons
marquent le début d’une collaboration de dix ans avec Jean-Max
Rivière, et d’une grande complicité avec Brigitte Bardot, pour qui vous
composez vingt-cinq chansons, libres, mutines et sensuelles, à son
image. Car tel est bien le secret de votre art, l’invention de couleurs
originales, propres à chaque artiste.

Votre talent explose en pleine période « Yé-Yé », et vous devenez
rapidement, avec Jean-Max Rivière, les partenaires très sollicités des
étoiles des années soixante, telles que Sylvie Vartan, Antoine, Richard
Anthony, Françoise Hardy, Dick Rivers, France Gall, pour ne citer
qu’elles.

Mais votre virtuosité excelle dans tous les genres, et des artistes aussi
différents que Marcel Amont, Georges Brassens, Petula Clark, Annie
Cordy, Juliette Gréco et Luis Mariano demandent rapidement des
chansons du fameux tandem « Rivière et Bourgeois ».

Je ne vais pas citer ici, faute de temps, toutes les perles que vous avez
offertes au répertoire de la chanson française, tous ces titres mythiques
que vous avez composés pour les plus grands interprètes.

Je pourrais citer la chanson que vous composez en 1966 pour Dalida, El
Cordobès, qui devient en à peine 48 heures numéro un en France, puis
en Espagne, avant d’enflammer l’Amérique du Sud. Luis Mariano la
reprend, et les grands accordéonistes, tels q Aimable, André Verchuren,
et Bruno Lorenzoni s’en emparent à leur tour. On compte aujourd’hui
150 enregistrements de ce tube planétaire.

Je pourrais citer également les nombreux succès que vous avez offerts
à Brigitte Bardot, et notamment la célèbre chanson Une histoire de
plage.

Je pourrais citer enfin les tubes que vous avez composés pour Serge
Reggiani, Il suffirait de presque rien et Gabrielle.

Mais ce serait passer sous silence trop d’airs inoubliables, de Rendez-vous
d’automne de Françoise Hardy à T’es belle comme une locomotive
de Michel Delpech, trop de chansons cultes, trop de refrains qui sont
aujourd’hui emblématiques de cette époque sensationnelle, qui vit fleurir
le rock and roll aux côtés des grands chanteurs à texte.

Vous montez en 1966 votre propre société d’édition musicale, baptisée
« Tilt Music », et vous devenez sociétaire définitif de la Sacem.

Vous volez ensuite de vos propres ailes, et poursuivez votre travail de
composition pour, notamment, Nicoletta, Daniel Guichard, Enrico
Macias, et Nicole Croisille.

Vous faites également une rencontre essentielle, avec l’émouvante, la
mystérieuse et fascinante Barbara, qui vous inspire plusieurs chansons,
notamment L’homme en habit rouge, et que vous suivez en tournée
dans toute la France.

Très ouvert, mais surtout très libre et audacieux, vous vous lancez dans
la comédie musicale, mais aussi dans des compositions pour la
télévision et le cinéma.

Infatigable, toujours prêt à vous lancer dans de nouvelles aventures,
vous dirigez aujourd’hui des ateliers « piano, musique et chansons », au
sein de l’association Salut l’artiste, qui réalise l’animation culturelle du
site du Futuroscope, près de Poitiers.

Vous nous avez offert parmi les plus beaux airs du répertoire de la
chanson française. Vous avez inspiré les plus grands artistes, dont vous
êtes devenu un complice précieux, un partenaire fidèle, enthousiaste et
talentueux.

Cher Gérard Bourgeois, au nom du Président de la République, et en
vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous faisons chevalier
de l’Ordre National du Mérite.

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