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Présentation au Sénat du budget 2006 Médias – Avances à l’Audiovisuel public

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les Sénateurs,

Comme le rappelle Alain Rey dans son Dictionnaire culturel en langue
française – référence qui sera chère à votre Haute Assemblée, qui vient
d’adopter à l’unanimité la proposition de loi de M. Marini relative à l’emploi de
la langue française – la communication est d’abord une mise en commun des
échanges, des idées, des oeuvres, des cultures, entre les hommes.
Dans la nouvelle présentation budgétaire, de la LOLF, comme vous le
soulignez en exergue de votre rapport, Monsieur le Rapporteur spécial, les
crédits de la politique publique de communication de l’Etat sont regroupés
dans deux missions, « Médias » et « Avances à l’audiovisuel public » .

Dans ces domaines essentiels pour la vie quotidienne de nos concitoyens et la
cohésion de notre société, l'action de l'Etat est également confrontée à de
nouveaux défis, à de nouvelles ambitions.

C’est dans cet esprit que l'audiovisuel public, tout en renforçant son identité,
doit s'adapter aux mutations provoquées par les nouveaux supports,
notamment numériques.

Le démarrage de la télévision numérique de terre (TNT) a été conduit avec
succès. Il y a à peine un an, 70% de nos concitoyens ne recevaient que six
chaînes. Six mois à peine après son lancement, la TNT permet désormais à un
Français sur deux de recevoir dix-huit chaînes gratuites. Les ventes des
adaptateurs numériques se poursuivent à un rythme rapide. Plus d’un million
d’adaptateurs ont déjà été vendus ou loués. C’est-à-dire que la TNT est reçue
dans un million de foyers. C'est un progrès formidable auquel le service public
participe pleinement. Je souhaite que les étapes suivantes de son déploiement
soient menées au plus tôt et que la télévision haute définition et la télévision
mobile bénéficient d'un cadre qui permette leur développement. J'y travaille
activement.

L'arrivée des chaînes payantes donnera une assise supplémentaire à la TNT
et contribuera aussi à son succès. L'enjeu est considérable, et il ne vous a pas
échappé : la richesse et la diversité des programmes des chaînes de la TNT
modifient en profondeur l'offre et la manière de regarder la télévision pour un
très large public.

C'est pourquoi la priorité est maintenant de généraliser l'accès à la télévision
numérique gratuite pour tous. Le Gouvernement vient de créer le Fonds
d’accompagnement du numérique qui sera doté dès l’année 2006 de 15
millions d’euros afin d’équiper les consommateurs en adaptateurs dans les
zones où l’extinction de la diffusion analogique sera nécessaire pour lancer la
TNT.

Parallèlement, la mise à disposition des chaînes en clair de la TNT doit être
recherchée à travers l’ensemble des moyens de diffusion, satellite, câble et
ADSL. Il serait notamment de l’intérêt des téléspectateurs raccordés à une
antenne collective de disposer d’offres leur permettant d’avoir accès à ces
chaînes pour un coût total proche de celui de l’acquisition d’un adaptateur TNT.

Je pense en particulier aux habitats collectifs pour lesquels les câblo-opérateurs
assurent la distribution des chaînes. Il leur revient aujourd’hui d’apporter à tous
ces foyers ces programmes auxquels chacun doit avoir accès dans de bonnes
conditions.

Chantier prioritaire de l'audiovisuel public, les contrats d'objectifs et de moyens
ont, dans le domaine des médias, mis en oeuvre la LOLF avant la LOLF.

Le
bilan des contrats souscrits est largement positif. Le secteur des médias a été
précurseur, que ce soit pour l'AFP, France Télévisions ou Arte France et bien
sûr l'Institut national de l'Audiovisuel. Je m'en félicite.

En 2006, la réforme de la redevance audiovisuelle entrera pleinement et
définitivement en vigueur. J’ai entendu les réserves qui se sont exprimées ici ou
là, et notamment celles de votre Rapporteur pour avis, sur cette réforme. Mais
constatez avec moi que cette nouvelle organisation du recouvrement permet
une collecte plus performante d'une taxe plus juste et plus simple.

Au total, le budget du service public de l'audiovisuel qui vous est soumis
augmentera de 109 M- en 2006, soit 3,1%.

Ces contrats seront en pleine cohérence avec la logique de la LOLF, que nous
avons tous à coeur de mettre en oeuvre, dans un souci partagé de transparence
et d'efficacité.

Je tiens à ce que le budget que je vous demande d'adopter permette de
renforcer la qualité et la diversité des programmes, et de financer la
modernisation indispensable des sociétés de l'audiovisuel public.

L'adaptation des programmes aux personnes sourdes et malentendantes
constitue également, comme vous l’avez relevé dans vos rapports, un objectif
prioritaire du Gouvernement. France Télévisions et Arte France ont engagé un
plan progressif de sous-titrage qui concernera 50% des programmes dès 2006.

J’ai souvent eu l’occasion de souligner l’identité et le rôle particuliers des
antennes du service public de l’audiovisuel. Ils devront être approfondis et
mieux déclinés. A cet égard, le Président de la République a annoncé le 22
novembre dernier, un ensemble de mesures destinées à améliorer la
représentation à l'antenne de la diversité des origines et des cultures de la
société française. Je veillerai donc à ce que les programmes du service public
contribuent de manière exemplaire à promouvoir les valeurs d'intégration, de
solidarité qui sont celles de la République.

Pour ce faire, un projet de loi modifiant la loi de 1986 sur l'audiovisuel est
actuellement à l'étude afin d'inscrire des mesures relatives à la lutte contre les
discriminations et en faveur de la cohésion sociale dans les objectifs, les
missions et les obligations du CSA. Elles vous seront soumises très
prochainement. Les cahiers des charges des chaînes publiques seront modifiés
pour mettre en place des obligations précises en ce domaine.

Dans le même sens, France Ô, programme édité par RFO et diffusé en
métropole sur le câble et le satellite, sera diffusé sur la TNT et l'État préemptera
un canal à cette fin.

L’ensemble de ces mesures contribuera, dans les meilleurs délais, à ce que le
paysage audiovisuel français, et singulièrement le service public, reflète mieux la diversité de la société française et joue pleinement son rôle dans la création
du lien social et républicain.

France Télévisions consacrera la majeure partie de ses moyens
supplémentaires, soit 53 M- HT, résultant de l'augmentation de 3 % de la
dotation publique du groupe et des économies réalisées, à l'amélioration de
l'offre de programmes.

Les priorités pour 2006 sont notamment :

– le renforcement de l'attractivité de France 4 et de France 5 ;

– l'affirmation pour RFO de son identité de diffuseur public de proximité ;

– la participation au développement des nouveaux modes de consommation
audiovisuels avec notamment la haute définition et la télévision mobile ;

– un engagement encore accru dans la création, et dans la production
audiovisuelle et cinématographique ;

– Arte France, qui bénéficiera d'une augmentation de 3,1% de sa dotation
publique par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2005, s'attachera
à consolider sa grille de programmes. Elle maintiendra son effort en faveur
de la création d'oeuvres audiovisuelles innovantes, dans le contexte de
l'élargissement de sa diffusion permis par la TNT.

– Radio France renforcera sa capacité d'innovation et se rapprochera de tous
les auditeurs.

– Radio France Internationale devra consolider sa place de média de
référence. Dans l'attente de la signature du premier contrat d'objectifs et de
moyens entre RFI et l'État, ce projet de budget lui permet de poursuivre la
numérisation de sa production, engagée depuis 2003.

– La sauvegarde et la mise en valeur de notre patrimoine audiovisuel par
l'Institut national de l'Audiovisuel (INA) constituent un chantier d'ampleur
que j'ai souhaité inscrire dans le long terme. Il y va de la mémoire
audiovisuelle. L'accélération du " plan de sauvegarde et de numérisation "
qui permettra de numériser à l'horizon 2015 l'intégralité des fonds
audiovisuels en fonction de leur état de dégradation, est l'une des priorités
du projet de budget qui vous est soumis pour 2006, justifie une dotation en
progression de 4,1 % avec une hausse de 3 M- HT. Le contrat d'objectifs et
de moyens de l'INA, que j’ai approuvé, va donner une lisibilité pluriannuelle
à ces missions essentielles de l’INA.

Comme vous le relevez dans votre rapport écrit, Monsieur le Rapporteur pour
avis, la presse est en crise, au sens étymologique de ce terme, c’est-à-dire,
qu’elle est à un tournant décisif. Elle doit se régénérer pour assurer son avenir
et faire face à l'émergence de nouvelles habitudes de consommation, à l'essor
toujours accéléré des nouvelles technologies, au développement d'une culture
de la gratuité, et à l'ensemble des évolutions structurelles qui bousculent les
repères anciens.

Le projet de budget que je vous présente pour 2006 consolide à la hausse
l'effort sans précédent consenti en 2005.

Cette constance dans le soutien à la presse écrite marque la cohérence de
l'action du Gouvernement, en même temps que notre volonté de préparer
efficacement l'avenir.

A cet égard, je me réjouis de ce que, Monsieur le Rapporteur pour avis, vous
ayez salué les efforts que nous avons accomplis pour rationaliser le dispositif
des aides directes à la presse. Comme vous le soulignez très justement, ce
dispositif est désormais, grâce aux différentes réformes entreprises, plus lisible,
plus cohérent avec un coeur de cible clairement identifié, la presse quotidienne d’information politique et générale, et plus efficace car privilégiant les aides aux
projets.

Au total, le projet de budget que je vous propose d’adopter traduit les quatre
priorités de notre politique en faveur de la presse : contribuer à la diffusion la
plus large de la presse écrite ; soutenir la modernisation du secteur ; respecter
les engagements de l'État, avec le souci de la plus grande efficacité ; enfin,
favoriser le développement à long terme du lectorat, en menant une action
spécifique en direction des jeunes lecteurs, dont vous soulignez à juste titre
l’importance dans votre rapport, Monsieur le Rapporteur pour avis, et je tiens à
vous en remercier. L'objectif est clair : contribuer à la diffusion la plus large de
la presse écrite française.

Plus de 60 millions d'euros seront mobilisés en 2006 pour accompagner la
modernisation du secteur, afin de soutenir les initiatives dites structurantes ou
innovantes.

L'effort en faveur de la modernisation du réseau des diffuseurs sera renforcé,
afin de prendre en compte notamment les besoins liés à l'informatisation des
points de vente. Les crédits correspondants seront portés à 4 M-, soit une
progression de près de 15 % par rapport à 2005.

Les crédits du fonds d'aide à la modernisation de la presse, destinés aux
projets de modernisation des entreprises augmentent, dans ce projet de
budget, de près de 20 %, comme vous le soulignez Monsieur le Rapporteur
spécial. A cet égard, je me félicite comme vous que la question des reports ait
été résolue.

La budgétisation du compte d'affectation spéciale, que vous aviez souhaitée,
améliore sa lisibilité.

Enfin, de nouvelles mesures, et c'est tout à fait essentiel, sont destinées à
améliorer l'autonomie financière et la capacité d'investir des entreprises de
presse, afin de remédier au défaut de fonds propres qui les caractérise.

La création d'un fonds de garantie dédié aux entreprises de presse au sein de
l'Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC)
facilitera leur accès aux prêts bancaires nécessaires au financement de leurs
investissements. Il fonctionnera dès le 1er janvier 2006.

La dotation prévue pour les abonnements de l'État à l'Agence France-Presse
est conforme à la norme de progression fixée dans le contrat d'objectifs et de
moyens conclu avec l'Agence.

Pour l'aide au transport postal de la presse d'information politique et générale
aussi, l’Etat tient les engagements pris dans le cadre de l'accord signé le 22
juillet 2004 entre l'État, la presse et La Poste.

L'aide à la distribution de la presse quotidienne nationale d'information politique
et générale, créée en 2002, est maintenue.

L'engagement traditionnel de l'État en faveur du pluralisme est poursuivi et
renforcé. Ainsi, l'aide aux quotidiens nationaux d'information politique et
générale à faibles ressources publicitaires, qui est au coeur de notre action,
verra sa dotation progresser de 7,5 %.

Enfin, je vous l’ai dit, l'effort spécifique en direction des jeunes lecteurs, amorcé
en 2005, sera prolongé et amplifié en 2006. Une première série de projets
innovants a été mise en route cette année.

Je veux terminer par la chaîne d'information internationale qui vous tient à juste
titre tant à coeur, Mesdames et Messieurs les Sénateurs.

Il s’agit d’un projet cher au Président de la République, Jacques Chirac, qui
porte ce projet depuis plusieurs années. Il en a eu l’idée et c’est bien grâce à
son énergie et à sa détermination que la chaîne internationale voit le jour
aujourd’hui.

Dominique de Villepin, fort de son expérience internationale, a, vous le savez,
donné une impulsion décisive à ce projet.

Je voudrais enfin remercier tous ceux qui, à commencer par les Parlementaires,
ont travaillé à la conception de ce projet – qui n’était pas simple, je le reconnais
– et nous ont encouragés. Il y a eu le temps nécessaire des options, des
débats. Comme je l’ai souligné à l’occasion de la communication que j’ai
présentée au conseil des ministres mercredi dernier, nous sommes maintenant
dans celui de l’action.

Il était nécessaire, pour des raisons stratégiques, que cette chaîne soit lancée
sans tarder.

Ses objectifs sont ambitieux, son organisation est réaliste, son financement est
assuré – si vous adoptez ce projet de budget – et son rôle sera complémentaire
de celui rempli par les autres acteurs de l’audiovisuel extérieur ; TV 5 et
l’Agence France Presse, qui continueront, dans leurs domaines respectifs, à
animer notre dispositif audiovisuel international.

J’en viens aux objectifs, à l’organisation, aux moyens et au calendrier de cette
grande ambition nationale.

La chaîne aura pour objectif d’offrir une information pluraliste sur l’actualité
mondiale, en portant une attention particulière à l’actualité européenne et
multilatérale, en même temps qu’une ouverture sur la culture française et sur
les débats de société.

La société devra faire preuve d’une grande réactivité dans le traitement de
l’actualité. Elle s’efforcera de couvrir immédiatement les événements majeurs
de l’actualité mondiale.

La chaîne présentera aussi des magazines sur la culture et le patrimoine
touristique français. Elle s'attachera également à mettre en valeur nos réussites
technologiques, scientifiques et économiques.

Cette chaîne devra être très rapidement diffusée en anglais, en arabe puis en
espagnol – ce qui la différenciera de TV5, qui oeuvre de façon remarquable pour
la défense du français et de la francophonie.

Financée par l'argent public, il est légitime qu'elle soit également diffusée en
France.

La diffusion sera assurée par satellite en mode numérique, par le câble, et
j’insiste sur ce point, par Internet, grâce au haut débit, ce qui lui donnera très
vite une plus vaste diffusion.

Les zones de diffusion seront larges ; la société a ainsi pour vocation première
de diffuser ses programmes à destination de l’ensemble des pays du monde.

Dans un premier temps, sur le câble et le satellite, des négociations seront
entamées pour que cette chaîne puisse proposer ses programmes à l’Europe, à
l’Afrique, au Proche et au Moyen Orient.

Pour répondre à l’une des questions prémonitoires de votre Rapporteur pour
avis, l’organisation retenue s’inspire des propositions faites par Bernard
Brochand en 2003, dans son rapport remis au Premier ministre, Jean Pierre
Raffarin, et je l’en remercie.

Elle s’appuiera sur le professionnalisme et les talents des deux plus grands
groupes audiovisuels français dans le cadre d’une société commune, détenue à
50 % par chacun des deux opérateurs, régie par un pacte d’actionnaires et des
statuts qui en garantissent le bon fonctionnement.

Le projet tel que l’a voulu et souhaité le Premier ministre et que j’ai présenté en
conseil des ministres, prévoit la constitution d’une rédaction autonome, dotée
de correspondants dans les principales villes du monde, permettant à la chaîne
de disposer de sa propre capacité de production d'information et d'images.

L’Etat allouera à la chaîne française d’information internationale les moyens
nécessaires à l’accomplissement de ses missions de service public. Dès cette
année, une subvention de 15 millions d’euros sur les crédits du Premier
ministre sera versée, dont 13 millions pour engager, dès maintenant, les
besoins d’investissements de lancement. Les besoins de la CFII en 2005
n’excédant pas ce montant, 15 M- prévus dans la dotation initiale de 30 M- sont
annulés.

Le projet de budget que je vous soumets pour 2006 concourt à hauteur de 65
millions d’euros au fonctionnement et à l’équipement. S’agissant d’un projet
nouveau, en phase de lancement, il s’agit d’un budget réaliste.

A compter de 2007, et jusqu’à 2010, l’Etat s’engagera à hauteur de 70 millions
d’euros par an.

J’en viens maintenant au calendrier. L’ensemble des problèmes juridiques sont
résolus, la société sera bientôt immatriculée, son budget est prêt.

S’ouvre donc une phase immédiate de travail.

Avant Noël, l’assemblée générale des actionnaires désignera le conseil de
surveillance qui procédera à la nomination du directoire.

Le premier semestre 2006 doit être mis à profit pour élaborer une grille de
programmes, constituer les équipes, créer l’habillage de la chaîne, négocier
toutes les conventions de diffusion et les contrats d’association avec l’ensemble
des autres partenaires, et définir une stratégie de marketing et de distribution
commerciale.

Je vous donne deux rendez vous :
au plus tard à la fin du mois de juin pour vous présenter l’état d’avancement de
ce dossier ; et dans le courant du second semestre 2006, pour le lancement
opérationnel de cette nouvelle chaîne, qui rassemblera les énergies et les
talents, et concourra au rayonnement de la France dans le monde.

Notre combat, c’est celui du respect de la diversité culturelle, celui de la
diversité d’expression des idées.

C’est aussi le combat de la défense de nos valeurs dans le monde. Au-delà de
la nomenclature budgétaire, c’est l’une des plus belles missions de la culture et
de la communication, et l’une des meilleures raisons d’adopter le projet de
budget que je soumets à votre approbation.

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