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CONFERENCE DE PRESSE « VIVRE ENSEMBLE »

Monsieur le Président, Cher Jean-François,

Mesdames, Messieurs, Chers amis,

Devant la multiplication d’actes de violence, d’intolérance et, en particulier, d’actes à
caractère raciste et antisémite, à la demande du Président de la République, le Premier
Ministre a mobilisé le gouvernement dès l’automne 2003. Un comité interministériel de lutte
contre le racisme et l’antisémitisme, vous le savez, a été créé et se réunit régulièrement.

La mission qui a été confiée à Jean-François Hébert, Président de la Cité des sciences et de
l’industrie avait pour objet, dans cette perspective, de préparer des propositions pour que les
actions conduites par les institutions culturelles, qui dépendent du Ministère de la culture et
de la communication fassent progresser, la tolérance, le respect des différences et le désir
de vivre ensemble.

L’ensemble de mon ministère et de ses services s’est rassemblé autour de cette mission.

Toutes les composantes du monde de la culture et de la communication : les directions
d’administration centrale du ministère, les établissements publics qui lui sont rattachés, les
directions régionales des affaires culturelles, et naturellement aussi les sociétés nationales
de radio et de télévision ont répondu présents.

Je me réjouis que plusieurs de leurs présidents, de leurs directeurs et de leurs responsables
soient parmi nous ce matin. Car ils sont les premiers acteurs d’une mobilisation générale en
faveur de la tolérance et des valeurs qui fondent notre société, notre vivre ensemble.

La mission conduite par Jean-François Hébert n’a pas débouché sur la création d’une
nouvelle journée nationale ou d’un événement commun à des institutions aussi différentes
dans leur nature ou dans leur fonctionnement. Ce que nous vous présentons ce matin, c’est
un véritable programme d’actions en profondeur, un programme concret, qui s’inscrit dans la
durée, puisqu’il est décliné jusqu’en février 2006.

Dans un premier temps, il s’agit de mieux faire connaître les actions déjà organisées par les
institutions culturelles, comme les cycles de concerts des musiques du monde, les
rencontres internationales des écritures de l’exil, par exemple.

Mais j’ai tenu à ce que le ministère aille plus loin dans l’engagement du monde culturel en
faveur de la tolérance.

J’ai souhaité que nos institutions culturelles amplifient leur action, en inscrivant dans leurs
programmes d’activités respectifs de nouvelles manifestations, afin de susciter chez nos
concitoyens une véritable prise de conscience.

Nos Directions régionales des affaires culturelles se sont mobilisées pour soutenir les
initiatives par des associations, des institutions culturelles, des collectivités.

Parmi ces multiples initiatives, je signale notamment à la Cité des sciences et de l’industrie,
un cycle de manifestations consacrées aux bâtisseurs de la paix, qui se déroule en ce
moment même.

Nous célébrerons l’an prochain le centenaire de la loi du 9 décembre 1905 de séparation des
Eglises et de l’Etat. Ce grand texte fondateur de la laïcité, qui a modelé notre République,
est fondamentalement un texte de tolérance, inspiré par la neutralité de l’Etat et le respect de
la pluralité des cultes. Sa raison d’être est d’assurer la liberté de conscience et de garantir le
libre exercice des cultes. Comme l’a montré la commission Stasi, cette grande loi de la
République a permis de prendre en compte le fait religieux dans sa diversité et de
reconnaître le droit de s’exprimer dans l’espace social.

Le rôle du Ministère de la culture et de la communication, c’est, de nous donner les moyens,
pour emprunter les mots de Jorge Semprun, de construire « une mémoire pour fonder notre
avenir ».

De nombreuses manifestations seront organisées par plusieurs services départementaux et
communaux d’archives avec le soutien de la direction des archives de France.

A l’occasion de ce même centenaire, à l’initiative de la direction du livre et de la lecture, une
journée professionnelle d’échanges intitulée « Lire ensemble, vivre ensemble » se tiendra en
avril 2005.

Dans le même esprit, les sociétés nationales de radio et de télévision et l’institut national de
l’audiovisuel feront vivre notre mémoire commune, avec sa part de lumière, et en n’occultant
rien de sa part la plus sombre, avec par exemple la diffusion de Shoah de Claude Lanzmann
par ARTE en janvier prochain et également sur France 3, pour la première fois, en intégralité
à l’occasion de la commémoration de la libération des camps ; nous donnant ainsi les
moyens de tirer des leçons de notre Histoire, et faire oeuvre de pédagogie.

Faire vivre la mémoire, c’est aussi reconnaître et mettre en valeur la place des immigrés
dans la construction de la France. En apportant son soutien à la création de la “ Cité
nationale de l’histoire de l’immigration ” dont l’ouverture en 2007 au Palais de la Porte Dorée
a été solennellement annoncée par le Premier ministre, le Ministère de la culture et de la
communication ouvre un centre d’histoire et de mémoire vivante. Ce sera plus qu’un musée :
largement ouvert au grand public et aux scolaires. Il devra fédérer autour de lui les initiatives
déjà existantes pour les rendre accessibles à l’ensemble de la population française.

Pour lutter contre toutes les formes d’exclusion, l’action du Ministère de la culture et de la
communication doit s’orienter résolument vers l’accès plus effectif à la culture de tous les
publics.

D’abord, parce que les publics les moins familiers des institutions culturelles, notamment
ceux issus de milieux très défavorisés, sont probablement plus menacés que d’autres par
certaines formes d’intolérance. Ensuite parce que, pour eux, la visite d’un lieu culturel
constitue, par elle-même, une expérience de rencontre et de partage souvent marquante.

Cette mobilisation, je tiens à le souligner, concerne l’ensemble des services, des
établissements et des organismes dépendant du Ministère de la culture et de la
communication et l’ensemble de leurs actions à destination de tous les publics, mais aussi
de leurs agents, pour faciliter l’accès de tous les talents aux métiers de la culture et de la
communication.

“ Donner sa chance à chacun ”, tel est l’objectif recherché en matière de recrutement.

Nombre d’établissements comme le Louvre, la Cité de la musique, le Parc de la Villette, la
Cité des sciences et de l’industrie ont ainsi mis en place des dispositifs visant à favoriser
l’emploi de jeunes en difficulté.

Des mesures du même ordre ont été prises par France Télévisions pour favoriser l’accès
des Français issus de l’immigration, et plus largement de milieux défavorisés, dans le cadre
de son plan d’action positive pour l’intégration.

Je tiens à ce que le Ministère de la culture et de la communication et les organismes qui en
dépendent soient exemplaires.

Nous encourageons et soutenons bien d’autres initiatives emblématiques. Jean-François
Hébert pourra vous en présenter quelques-unes, et elles sont toutes recensées dans le
document qui vous est distribué. Je veux citer en exemple la mise en oeuvre d'une banque
de programmes radiophoniques favorisant l'intégration en France des populations issues de
l'immigration, et la lutte contre les discriminations.

Plus de 100 radios associatives sont aujourd'hui partenaires et adhérentes, radios
généralistes, radios d'expression multiculturelle, radios scolaires ou universitaires.

Promouvoir la tolérance à travers une grande diversité de manifestations de nature à
susciter chez nos concitoyens une prise de conscience, toucher de nouveaux publics,
notamment ceux qui ne fréquentent pas les lieux culturels, faire en sorte que ces lieux soient
eux-mêmes exemplaires, tel est l’engagement du monde de la culture.

Il est concret, durable, il est surtout lucide. Il est le fait d’hommes et de femmes qui savent
bien que la culture ne peut pas tout résoudre. Qui savent aussi qu’elle est porteuse
d’ouverture, de fraternité, d’espérance. mobilisons nous donc, tous ensemble, en faveur de
la culture contre l’intolérance.

J’en citerais pour finir deux exemples récents et encourageants.

Les 18 et 19 septembre 2004 derniers , les portes du Palais Royal se sont ouvertes à près
de dix mille personnes, qui ont pu, de façon exceptionnelle, consulter le document original de
l’Edit de Nantes, un premier acte de tolérance religieuse dans une Europe divisée par la
fracture de la Réforme. J’ai tenu à présenter ce document, sorti, des Archives nationales,
pour montrer à quel point notre patrimoine est fondé sur des valeurs communes, en
l’occurrence sur un message universel de tolérance religieuse et civile, qui demeure plus que
jamais actuel dans le monde d’aujourd’hui.

A Jérusalem, le 25 novembre dernier, l’auditorium de l’église Notre Dame résonnait « d’une
seule voix » pour un concert exceptionnel, qui a réuni dans une même mosaïque de chants
des artistes juifs, musulmans, et chrétiens, exprimant au-delà de ces chants sacrés combien
la musique, l’art, le patrimoine, la culture, la création, ont un rôle essentiel à jouer pour
construire une nouvelle harmonie fondée sur le dialogue. Dialogue des cultures, dialogue
des religions, dialogue des civilisations.

Oui, vivre ensemble, au sein comme en dehors de nos frontières, c’est se donner les outils
pour comprendre les autres et créer les moyens d’un projet de vie en commun.

Oui, la culture, ce sont des repères, des idées, des goûts et des émotions, que l’on partage
avec les autres. La culture, c’est avant tout ce qui relie les hommes aujourd’hui, ce qui
permet de mieux se comprendre, de communiquer, de vivre ensemble.

Les quelque cent
manifestations que nous vous présentons ce matin, programmées jusqu’en février 2006,
vous en apportent la preuve vivante.

Je vous remercie.

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