Imprimer cet article - Envoyer à un ami

Pourquoi ne pas choisir un Français comme envoyé spécial de l'ONU en Irak ?

Lurgence et la priorité pour rétablir la situation en Irak sont désormais affichées comme politiques, cest-à-dire fondées sur lannonce dun vrai calendrier pour le rétablissement de la souveraineté et de la démocratie… Après la reconnaissance, il y a quelques semaines, par le Président Américain quil ny avait pas de lien entre Saddam Hussein et les attentats du 11 septembre, le changement de cap politique opéré lors de la rencontre G.W Bush et Paul Bremer à Washington est de nature à faire changer fortement le climat entre les États-Unis et la France.

Lurgence et la priorité pour rétablir la situation en Irak sont désormais affichées comme politiques, cest-à-dire fondées sur lannonce dun vrai calendrier pour le rétablissement de la souveraineté et de la démocratie.

« Il y aura des élections pour un nouveau Gouvernement en vertu des clauses dune nouvelle Constitution d’ici avant la fin dannée 2005. Une assemblée transitoire, qui sera élue vers la fin du mois de mai 2004 choisira un Gouvernement provisoire avant fin juin 2004 »

a déclaré le 15 novembre lactuel Président du Conseil du gouvernement transitoire irakien Jalal Talabani au terme de son entrevue avec ladministrateur en chef américain.

Cest le message que la France a tenté ces dernières semaines de promouvoir, non pas pour être un allié décidément inconfortable et encombrant, mais pour être concrètement un pays ami qui prend en compte la réalité du terrain, des menaces et propose une stratégie efficace.

Lorsque nous disions que la coalition ne changerait pas de statut de force doccupation sans préalable politique clair et intelligible directement par le peuple irakien, nous faisions preuve dune lucidité positive et non agressive. Bref ! Ce nest pas utile dépiloguer… L’heure est enfin à laffichage dun vrai processus de reconstruction politique, qui nexclut dailleurs nullement la présence militaire américaine et anglaise, tant il est vrai quincombe à ces Etats une responsabilité directe sur le terrain en matière de sécurité et daction humanitaire.

 Pour que le message passe fortement, sans ambiguïté, des signaux très puissants devront être émis. Incontestables, novateurs, en rupture avec ceux des semaines qui viennent de sécouler, où se sont succédés dans une ronde infernale et malheureusement très contre-productive des postures et des propos très décalés des exigences requises par la situation de la rue irakienne.

Après le temps tragique et inévitable des fermetures dambassades et de représentations des organisations internationales et humanitaires, va venir, espérons-le car ce serait un engrenage enfin vertueux, le moment de lengagement de la communauté internationale dans son ensemble.

Une phase souvrira pour la réconciliation entre ceux qui se sont aventurés dans la guerre sans quelle ne soit légitimée par lONU et ceux qui avaient perçu les risques de déflagration, dembrasement et dexacerbation des dangers et donc refusé de sy engager.

Si les conditions dune telle entente opérationnelle se réinstaurent, pourquoi alors ne pas envisager symboliquement que lenvoyé spécial de lONU soit un Français ou en tout cas un ressortissant dun État ayant refusé la guerre ?

Ce serait un message direct de changement de perspective envoyé au peuple irakien. Les Américains devraient accepter ce symbole, ce geste. Lensemble du « monde libre », de la communauté des Etats démocratiques a intérêt à la résolution du conflit et non à lenlisement ou à limpasse actuelle, qui est lourde de menaces pour le monde.

Alors, tentons de créer les circonstances qui rendent cette idée et ce projet plausibles et réalistes…

Cest le sens de la main tendue par notre Ministre des Affaires Etrangères, Dominique de Villepin, indiquant : « Nous sommes prêts aujourdhui à tous les rendez-vous, à toutes les concertations. Cest une main tendue que je veux adresser à nos amis américains parce que cest de la sécurité du monde quil sagit ».

Lopinion publique américaine bouge. En témoigne larticle dun grand journal de Washington, « National Journal », en date du 8 novembre où léditorialiste Paul Starobin sexclame : «The French were right ». « Les Français avaient raison. Oui, ces singes lâches, bouffeurs de fromages, comme leurs détracteurs aux États-Unis aimaient les appeler, avaient raison » (…)

Suit un long développement très élogieux sur la politique française, dont voici quelques extraits :

« Les Américains, en tous les cas ladministration Bush, n’ont prêté aucune attention aux mises en garde des Français, qui ne défendaient pas simplement lidée que la guerre nétait pas une bonne solution, mais que les conséquences dune invasion pouvaient être nuisibles aux intérêts de lOccident et plus largement à la guerre contre le terrorisme ».

« L’Amérique encourt le risque à court terme de tomber dans le piège de ses propres actions« .

***

« Les Français ont réclamé trois choses, toutes trois défendues avec une intensité plus ou moins forte par le gouvernement. La première était le fait que la menace que représentait Saddam Hussein n’était pas imminente, et cela était confirmé par toutes les preuves disponibles, pas simplement le dernier rapport de linspecteur en armement proche de Bush, David Kay, dans lequel il affirmait quil ny avait pas eu darmes de destruction massive découvertes. La seconde affirmation était que létablissement de la démocratie en Irak serait un processus de longue durée, difficile et entaché de sang – avec la population irakienne tendant à percevoir les Américains comme occupants et non pas comme libérateurs« .

« Mis à part le flux dattaques contre des soldats américains perpétré par différents fanatiques, cette constatation est soutenue par des sondages qui démontrent bien quune majorité dIrakiens souhaiterait que les Américains partent« .

« Troisièmement les Français ont prédit de manière juste que le monde musulman percevrait une intervention dirigée par les Américains sans aval explicite de lONU comme illégitime – et cela inciterait à davantage de colère envers les Etats-Unis« .

Ce retour de lucidité doit être mis au service dune renaissance du lien transatlantique, fondée sur une approche précise et partagée des menaces qui malheureusement font lactualité.

La tragédie dIstanbul est là sil le fallait pour nous rappeler lurgence dune politique antiterroriste intelligente. Qui commence par ne pas exacerber les haines, les frustrations, les humiliations qui jonchent les rues de nombreuses capitales du monde.

Et qui condamne avec dautant de force cette barbarie toujours présente quelle aura su faire respecter le droit international partout et sans dissymétrie.

Laisser une réponse