Le vote irlandais pour l'élargissement de l'UE, une chance pour la France!
23 octobre 2002Le vote de dimanche en Irlande rend possible l’élargissement et contribue à la naissance d’une opinion publique européenne… Nous entendons de trop nombreuses voix dire que le prochain élargissement de l’Union européenne est un danger pour l’Union et pour la France. Il est temps d’expliquer que passer de 15 à 25 membres va certes susciter des problèmes et entraîner des évolutions mais qu’il est une chance. Il s’agit d’un vrai défi mais d’un défi inévitable et positif, d’un défi qu’il faut accepter et gagner. Nous voulons défendre avec force et enthousiasme l’élargissement.
A ce titre le vote irlandais rend possible l’élargissement et contribue à la naissance d’une opinion publique européenne.
Nous devons faire comprendre que ce nouvel élargissement est d’abord la preuve de l’attractivité de notre Union européenne trop souvent décriée. Nous devons rappeler que jamais Jean Monnet et Robert Schuman n’avaient imaginé une Europe limitée aux 6 Etats d’origine. Nous voulons souligner combien il est historique d’accueillir enfin les peuples d’Europe Centrale et Orientale. Ces derniers ont été victimes d’une division de l’Europe qu’ils n’ont pas voulue mais subie. Leur intégration marque le point final du processus né de la chute du mur de Berlin.
Nous rappelons combien cette Europe à 25 donnera à l’Europe une toute autre dimension stratégique, politique et économique. Nous rappelons que cet élargissement est avant tout facteur de paix, la crise des Balkans ayant montré que la guerre n’était pas définitivement derrière nous mais un combat permanent.
Oui, accueillons avec joie ces nouveaux pays. Montrons leur que nous sommes heureux de voir la famille européenne s’agrandir.
Mais ce oui sans hésitation à l’élargissement ne doit pas faire oublier qu’il sera un défi. Disons-le tout aussi clairement et réclamons les moyens de le gagner.
Il faudra adapter nos institutions. Le Traité de Nice a entrepris cette tâche mais, reconnaissons-le, de façon imparfaite. Nous attendons de la Convention un traité constitutionnel qui posera les jalons de cette nécessaire adaptation.
Il faut aussi avoir le courage de dire que l’élargissement aura un coût. Mais rappelons que le budget de l’Union, c’est seulement 1,01 % du PNB des 15, que pour la France le coût supplémentaire de l’élargissement est évalué à 2,5 milliards d’euros soit moins de 0,03 % de notre PNB. En contrepartie, le développement économique des nouveaux Etats membres ne sera pas seulement source de concurrence accrue mais d’abord des marchés à conquérir.
Il faut encore défendre l’idée des coopérations renforcées. A 25, il est normal que l’on ne puisse continuer à avancer tous de la même manière et au même moment. Il ne s’agit pas de construire définitivement une Europe à géométrie variable, à deux vitesses, mais de permettre à certains Etats de montrer le chemin afin qu’un nombre le plus élevé possible d’Etats rejoignent ensuite cette démarche. Gagner le défi de l’élargissement, c’est enfin accepter deux exigences.
En premier lieu, dire clairement que l’Union européenne n’est pas le Conseil d’Europe, qu’elle n’a pas vocation à réunir plus de 40 Etats membres. Il faudra savoir fixer une limite géographique à notre projet européen. Nous proposons d’ailleurs qu’un statut de partenariat privilégié soit créé pour les pays qui veulent poursuivre un rapprochement avec l’Union.
La seconde exigence du succès de l’élargissement, c’est de ne pas attendre le moment de la ratification des traités d’adhésion pour en parler aux Français. Il y a urgence à mieux expliquer la nécessité et les chances de ce défi.
Pour nous qui avons fait de l’Europe, avec la décentralisation et la solidarité, le creuset de notre engagement politique, il est urgent de parler de l’Europe, de cette Europe élargie. 2004 sera, le Premier Ministre le rappelait il y a quelques jours, l’année d’un grand rendez-vous européen avec, nous l’espérons, l’adoption d’une constitution européenne et les élections au Parlement européen. Ce rendez-vous, il faut le préparer, il faut convaincre nos concitoyens d’aller avec nous vers plus d’Europe, synonyme de paix, de démocratie et de développement. Pour ce faire, dès aujourd’hui, faisons de l’Europe, de cette Europe élargie, un grand débat national.
par
Alain Juppé, Renaud Donnedieu de Vabres, Pierre Lequiller, Christian Philip, Françoise Grossetête et René André