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"Etre ou ne pas être" proche de Tony Blair!

Tony Blair est percutant, malgré les difficultés générées par la grève générale des pompiers, qui commence à paralyser nombre d’activités dans le pays. L’armée est réquisitionnée pour garantir la sécurité des édifices et des moyens de transport performants mais vulnérables… Mardi 19 novembre. Il est tôt à la gare du Nord, où j’ai rendez-vous avec Alain Juppé, Jean-Claude Gaudin, Philippe Douste-Blazy que j’accompagne, en tant que Président du groupe parlementaire d’amitié France – Grande Bretagne et Irlande du Nord, pour une journée à Londres.

Eurostar. Le tunnel sous la Manche. Que de découvertes ! Un peu de retard. Attention à la répétition car cela remet l’avion dans le coup… L’arrivée à Waterloo Station au cœur de cette ville magnifique, certes contrastée, mais rayonnante d’une vraie puissance. Paris ne doit pas s’endormir !

Nous arrivons en retard dans les splendides locaux du Parlement pour rencontrer le leader du parti conservateur, Mr. Duncan Smith. Cet homme élégant et intelligent nous « signifie » sa conception de l’Europe. Il est notre « homologue », notre partenaire logique ! Il faudra que l’eau coule sous les ponts de Londres et de Paris pour que se crée une dynamique européenne entre nous. Mais c’est l’objectif que rappelle avec tact et mesure Alain Juppé. Je comprends la fierté du leader conservateur, sa volonté de défendre les couleurs de son pays, de sa famille politique. A nous de le rendre moins sensible aux sirènes « européennes » de Philippe de Villiers…

Déjeuner dans un prestigieux Club anglais avec de nombreux chefs d’entreprises français. Lieu magique. « L’atmosphère » rare et impressionnante de la grande tradition britannique. Les siècles façonnent une perfection décontractée et chaleureuse. Mais attention à la fausse note dans cet univers rituel et parfait.

Une magnifique bibliothèque abrite des échanges vifs et directs où se mêlent les clichés sur les différences entre les deux pays, les expériences vécues, racontées avec la passion justifiée par le risque et la réussite, la volonté pour nous de défendre malgré tout le « modèle » français qui doit se réformer – c’est notre objectif politique – mais que nous aimons ! Curieux dialogue parfois entre des Français que séparent désormais un mode de vie et un système de valeurs assez différents de ceux que l’hexagone façonne…

En présence de nos amis journalistes, à plusieurs reprises, Alain Juppé sauve la France !

Au fur et à mesure que nous nous rapprochions du moment fort de la journée – la rencontre avec le Premier Ministre Tony Blair – me revint en mémoire avec brutalité et ivresse son discours à l’Assemblée Nationale au cours de la dernière législature.

Dans un français parfait, avec l’efficacité conférée par le talent, le charisme et l’esprit d’à propos, il a désespéré définitivement ses « amis » socialistes français par l’évocation d’un souvenir estudiantin aux contours tectoniques !

Saint Germain des Prés. Un bar. Un patron. Des clients. Des pourboires. Une caisse pour les déposer sans délai. Une promesse de répartition équitable en fin de mois… La fin de non recevoir du patron ! D’où la conclusion, torride, définitive, jubilatoire pour la droite : « ce jour-là j’ai compris le socialisme à la française… » Nous debout ! Eux, le gouvernement et la majorité socialiste furieux, amers, trahis, provoqués, impuissants, venimeux, anti-anglais !

10 Downing Street. Je croyais que c’était une petite maison au bord d’une rue passante… C’est un lieu protégé – ce qui est plus que normal – et « habité » à tous les sens du terme. Ni bureau solennel, ni résidence accessible, tout à la fois le siège du pouvoir et le lieu vivant, prestigieux mais chaleureux. Au moment de la photo finale, les exclamations du jeune Léo, le fils de Tony Blair que le protocole n’a pas cherché à éloigner.

Alain Juppé rencontre tout d’abord en tête à tête Tony Blair. Le « messager » préféré de Jacques Chirac avait certainement un objectif… Nous discutons dans la salle du Conseil avec l’équipe du Premier Ministre. Atmosphère directe, amicale, conviviale, constructive. Les divorces rituels entre nous n’arrivent pas à éliminer la proximité culturelle, politique, humaine.

L’entrée de Tony Blair restera longtemps dans ma mémoire. Une vraie lumière. Celle de l’âme, du physique, de l’être. En chemise. Sans veste. Sans huissier. Avec l’apparat de ce qu’il est.

Un grand Européen, résolu à convaincre son peuple de la nécessité de l’Euro… Ce qui est un défi à sa portée ! Un  homme au rayonnement exceptionnel.

Fin de l’entretien. Il disparaît dans son bureau, contigu. Un coup de fil avec Bush… Non ! Il va chercher sa veste pour la photo finale.

Malgré la force de cette rencontre, qui n’a pas besoin de support sur papier, je veux l’immortaliser. Il me faut les coordonnées du photographe de l’agence Gamma, qui était avec nous. C’est urgent et impératif ! Pas par orgueil personnel. Pour fixer ce moment fort de ma vie politique.

J’admire Alain Juppé face à la presse, cherchant avec malice, « sadisme » et intelligence à nous faire avouer notre proximité, notre complicité avec Tony Blair, même si sa réussite – soyons juste – repose sur les fondations de Margareth Thatcher…

Il résiste. Du coup, ils cherchent à lui faire annoncer la date du prochain sommet franco-britannique… Histoire de créer l’harmonie entre lui et Dominique de Villepin ! ! !

Dimanche 24 novembre. Eurostar. Rebelote ! Pour être à l’heure, le lendemain matin, à une conférence « ministérielle » sur le crime organisé dans l’Europe du sud-est, où Dominique de Villepin m’a fait le clin d’œil amical de me désigner pour diriger la délégation française…

Journée étonnante à bien des égards ! Je révélerai pourquoi le moment venu, que j’espère le plus proche possible !

Journée précédée par un dîner avec une équipe de diplomates français, particulièrement intelligents et accueillants, et une nuit dans cette très belle ambassade dont le nouveau maître est aussi subtil que prospectif, attentif à tout et à chacun, parfaitement à l’aise dans cette grande fonction républicaine.

Je retrouve le Ministre des Affaires Etrangères du Royaume-Uni, Jack Straw, que nous avions rencontré mardi. Précis. Volontaire. Energique. Fier d’être l’inspirateur de ce rassemblement de la Grande Europe, qui doit rester proche des réalités citoyennes pour ne pas devenir une utopie élitiste.

Il introduit le véritable responsable de la lutte contre la criminalité organisée, Mr. David Blunkett.

Quelle belle revanche sur l’adversité de la vie. Un Ministre de l’Intérieur aveugle, dont l’autorité naturelle, la fermeté rayonnante et l’intelligence particulièrement percutante sont un pied de nez au handicap.

Au terme de son brillant discours, de la mobilisation souhaitée par le Royaume-Uni et l’Union Européenne contre les mafias, les trafics, les crimes d’origine balkanique, il repart de la magnifique salle richement décorée de Lancaster House, escorté par son chien. Quelle vision incroyable ! Quelle grande capacité au respect que celle de l’opinion publique britannique… En serions-nous capables ? C’est un beau défi symbolique à relever – Un de plus !

Je débute l’après-midi par la séance de questions d’actualité à la Chambre des Communes, grâce à l’hospitalité improvisée mais chaleureuse du « speaker » de la Chambre. Dans ce temple de la démocratie parlementaire, je suis frappé par la vivacité des débats, mais aussi par le respect de l’institution. En entrant dans la salle des débats, où gouvernement et majorité font ensemble face à l’opposition, chaque parlementaire marque un temps d’arrêt sur une bande blanche fixée au sol et salue d’un mouvement de tête. Une sorte de purification avant le débat démocratique…

Tony Blair est percutant, malgré les difficultés générées par la grève générale des pompiers, qui commence à paralyser nombre d’activités dans le pays. L’armée est réquisitionnée pour garantir la sécurité des édifices et des moyens de transport performants mais vulnérables.

Il essaye de justifier la fermeté de son gouvernement par la nécessité d’éviter l’extension des revendications à l’ensemble des services publics.

Pourquoi priver les uns de ce que les autres auraient obtenu ? C’est en règle générale, en Grande-Bretagne comme en France, la difficulté d’une négociation à chaud.

Au moment de ces débats, je pense à la « méthode Raffarin » et à l’habileté de Gilles de Robien qui permettent de sortir du risque de paralysie du pays. Au-delà des problèmes des transporteurs routiers, si nous réussissons la réforme des retraites en 2003, la pratique gouvernementale française fera référence… européenne !

Dernière étape de la journée : la prise de contact avec Madame Joyce Quin, Député, mon homologue à la présidence du groupe d’amitié parlementaire britannico-français.

Elle a été Ministre des Affaires Européennes. Elle parle remarquablement français – je me trouve nul car mon anglais est loin d’être parfait ! Sa vivacité d’esprit, son humour élégant et sa tranquille fermeté me permettent d’envisager un travail fructueux pour célébrer dans un an le centenaire de l’entente cordiale… qu’auront d’ici-là certainement fêté le Président de la République Jacques Chirac et Tony Blair ! ! !

Je lui propose d’assister à la rencontre de rugby le 15 février France – Angleterre… Je comprends que ce n’est pas son sport favori… Je transformerai l’essai une autre fois !

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